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Le pape au Tea Party : «Je ne suis pas marxiste»

Le pape François a tenu à préciser dans une interview qu’il n’était pas un adepte de la théorie de Karl Marx. En novembre 2013, il s’en était pris au capitalisme financier, qu’il avait qualifié de «nouvelle tyrannie invisible». Des propos critiqués par les ultra-conservateurs américains,
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le pape François au Vatican le 1er avril 2013. (Reuters - Stefano Rellandini)
«L'idéologie marxiste se trompe. Mais dans ma vie, j'ai connu nombre de marxistes qui étaient des personnes très bien», a expliqué le souverain pontife dans une interview au quotidien italien La Stampa, publiée le 15 décembre 2013.

Il précise que sa condamnation des inégalités engendrées par le système économique global actuel ne prétendait pas être une analyse d'expert. Mais qu'elle s'inscrivait dans la doctrine sociale de l'Eglise catholique. «Cette condamnation ne fait pas de moi un marxiste», précise le pape, ancien archevêque de Buenos Aires sous le nom de Jorge Mario Bergoglio.

Dans une exhortation apostolique intitulée «Evangelii Gaudium» (La joie de l’Evangile), publiée le 26 novembre, François avait condamné «l’idolâtrie de l’argent» et plaidé pour un «retour de l’économie et de la finance à une éthique en faveur de l’être humain». Il demandait alors aux principaux dirigeants du monde de lutter contre les injustices créées par le capitalisme financier, qualifié de «nouvelle tyrannie invisible». Il s’en était aussi pris à la théorie selon laquelle «chaque croissance économique, favorisée par le libre marché, réussit à produire en soi une plus grand équité (…) dans le monde. Cette opinion, qui n’a jamais été confirmée par les faits, exprime une confiance grossière et naïve et dans la bonté de ceux qui détiennent le pouvoir économique et dans les mécanismes sacralisés du système économique dominant».

Le texte a été mal reçu par les extrémistes conservateurs américains. Rush Limbaugh, un animateur de radio méthodiste très écouté, a exprimé sa «tristesse» de voir François publier un texte qui ne serait que l’expression d’un «marxisme pur». Un membre du Tea Party, Jonathan Moseley, a jugé utile de préciser que, selon lui, «Jésus était un capitaliste prêchant la responsabilité personnelle, pas un socialiste». Et un autre commentateur de la chaîne conservatrice Fox, Stuart Varney, de religion anglicane, a accusé le pape d'être un tenant du «néo-socialisme».

Selon ses biographes, Bergoglio n'a rien d'un marxiste. Bien au contraire. Sans être jamais un hyper-conservateur, il s'est heurté frontalement aux prêtres jésuites d'extrême gauche tentés par le marxisme. Selon un livre du journaliste argentin Horacio Verbitsky, en 1976, pendant la dictature militaire, celui qui était alors responsable des jésuites argentins, aurait livré aux autorités deux jeunes clercs exerçant leur sacerdoce dans des bidonvilles. Lesquels furent par la suite torturés. Cette affaire polémique n’a jamais été éclaircie.

Face à la théologie de la libération, très en pointe en Amérique latine dans les années 1970, le pape propose une «théologie du peuple» non marxisteSa famille, d’origine italienne, avait été ruinée par la crise de 1929. Il a par ailleurs vu dans les rues de Buenos Aires les ravages du libéralisme en Argentine au cours des dernières décennies. Au début des années 2000, 14 millions d’habitants (sur 36 millions) vivaient sous le seuil de pauvreté dans un pays étouffé par la crise financière.

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