Législatives en Suède : le paradoxe de la tentation de l'extrême droite dans une économie florissante
En Suède, l'intégration des migrants est à la peine, alors que le chômage est plutôt bas. Une situation dont pourrait profiter un parti néonazi, lors des élections législatives de dimanche.
En Suède, l'extrême droite pourrait enregistrer un score sans précédent lors des les élections législatives du 9 septembre. Les débats ont beaucoup porté sur l'immigration et l'accueil des Syriens pendant la crise de 2015. Mais malgré des voyants économiques au vert, il semble que le pays n'ait pas réussi à intégrer ses migrants.
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Si les élections portaient sur l'économie, la gauche au pouvoir l'emporterait. La croissance est florissante, le chômage s'établit à 6% et plus de 300 000 emplois ont été créés en quatre ans. Pourtant, les immigrés ont du mal à s'intégrer sur ce marché du travail. Le chômage atteint même 20% chez les étrangers. De nombreux réfugiés manqueraient de diplômes et de compétences, selon Lars Calmfors, professeur d'économie.
Lars Calmfors explique qu'en Suède, où le salaire légal minimum n'existe pas, les accords de branches fixent les revenus. "Et les salaires les plus bas en Suède sont bien plus élevés que dans les autres pays européens", affirme l'économiste.
C'est un problème pour les patrons parce qu'ils ne vont pas employer quelqu'un sans compétence ou peu productif. Ils auraient l'impression de le payer plus que sa valeur réelle sur le marché.
Lars Calmfors, professeur d'économieà franceinfo
Même lorsque les immigrés sont diplômés, tous ne trouvent pas de travail, témoigne une Syrienne, arrivée en Suède il y a six mois. C'est qu'elle doit franchir plusieurs étapes. Elle attend son permis de résidence. "Si j'ai ce permis, je bénéficie de cours gratuits de suédois. Sans ces cours, je ne peux pas m'intégrer", déplore-t-elle.
Je dois et je veux apprendre la langue. Je suis dans l'attente du permis de résidence et dans l'angoisse. Pour l'instant je ne peux pas travailler.
Une Syrienne, arrivée en Suède en 2018à franceinfo
En Syrie, la jeune femme était institutrice. À présent, elle perçoit 200 euros d'aide par mois et loge dans un hôtel réservé aux migrants à Eskilstuna, à une centaine de kilomètres de Stockholm.
L'apprentissage du vote et de la démocratie
Dans cette ville, les migrants se retrouvent régulièrement dans une salle du quartier d'Arby, pour participer à des ateliers culturels. Ils suivent aussi des "cours de démocratie". Charlotte Kvarn-hem, responsable d'une association qui promeut la citoyenneté, explique aux migrants comment voter en Suède, où le système est complexe. Les électeurs votent pour trois élections le même jour, mais les immigrés ne peuvent participer qu'à deux scrutins. "Nous sommes nés dans ce système. Depuis qu'on est petit, on sait comment cela fonctionne, dit Charlotte Kvarn-hem. On a appris à l'école comment voter et surtout pourquoi."
On doit apprendre à ceux qui arrivent en Suède, ce qui nous a pris une vie entière à comprendre. La politique est le seul moyen de changer la société à grande échelle.
Charlotte Kvarn-hem, responsable d'une association citoyenneà franceinfo
Cette Suédoise, très impliquée dans la vie de la cité, souhaite aussi un changement des mentalités. Il faudrait aussi que les Suédois ne se renferment pas sur eux-mêmes et laissent entrer les immigrés dans leur société, poursuit Charlotte Kvarn-hem.
Lors de la crise migratoire de 2015, la Suède a accueilli 160 000 Syriens. Le pays, à la réputation d'État consensuel, a montré les limites de la politique d'ouverture. Et il semble qu'aujourd'hui les habitants soient en plein conflit entre intérêt personnel et altruisme.
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