Les extrémistes hutus ont été déclarés responsables de l'attentat contre Habyarimana, déclencheur du génocide en 1994
Telles sont les conclusions de l'enquête rwandaise sur cet attentat qui a coûté la vie à l'ex-président rwandais, Juvénal Habyarimana.
L'attentat est considéré comme le premier acte d'un "coup d'Etat" militaire destiné à empêcher tout partage du pouvoir avec la rébellion tutsi du Front patriotique rwandais. Le FPR, actuellement au pouvoir.
Le "comité indépendant" créé en avril 2007 et présidé par Jean Mutsinzi, le juge de la Cour suprême du Rwanda, conclut à la responsabilité de haut gradés des Forces armées rwandaises (FAR) dans l'attentat.
"Le comité a passé au crible les différentes hypothèses et a fini par être convaincu que la responsabilité des ex-FAR est pleinement engagée dans la préparation et l'exécution de l'attentat qui a coûté la vie aux présidents Habyarimana et Burundais, Cyprien Ntaryamira, à l'équipage français du Falcon 50 et aux passagers rwandais et burundais qui l'accompagnaient".
Le soir du 6 avril 1994, l'avion transportant notamment MM. Habyarimana et Ntaryamira avait été abattu en phase d'atterrissage à Kigali par des missiles sol-air. Habyarimana, un Hutu, était de retour de Dar es-Salaam en Tanzanie, où il avait participé à un sommet consacré notamment au processus de négociations avec la rébellion du FPR. A l'appui de la thèse d'une implication d'extrémistes hutus, le comité souligne que "la position prise par le président Habyarimana (...) d'appliquer les Accords d'Arusha ne pouvait aboutir qu'à la mise à l'écart évidente de plusieurs ténors des FAR, parmi les plus extrémistes".
"Sur le plan technique, (...) selon les informations versées au domaine public par les révélations des FAR elles-mêmes, celles-ci disposaient de missiles sol-air qu'elles disent avoir récupéré sur le Front patriotique rwandais en 1991, et avaient, si ce fait est avéré, les moyens de commettre l'attentat", poursuit le rapport. "Les tenants de cette thèse précisent aussi que la zone de tir présumée était sous le contrôle effectif des FAR et que l'infiltration (d'éléments de la rebellion) n'était pas quelque chose de faisable".
La France mise hors de cause
Le comité rwandais ne retient pas une responsabilité de la France dans l'attentat, mais insiste sur le fait que des militaires francais en poste au Rwanda dans le cadre de la coopération militaire avec le régime d'Habyarimana avaient eu accès à l'épave de l'avion le soir de l'attentat et dans les jours qui ont suivi, emportant avec eux, selon le comité, la boîte noire de l'appareil et des débris d'un missile.
L'enquete rwandaise donne une version diamétralement opposée de celle soutenue par une enquête judiciaire francaise confiée dans un premier temps au juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière, qui mettait en cause la responsabilité de la rebellion du FPR dans l'attentat. Le juge Bruguière avait lancé en novembre 2006 des mandats d'arrêt contre neuf responsables de l'actuel regime rwandais, entraînant une rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.
Kouchner à Kigali
Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, est arrivé mercredi soir à Kigali pour une visite de 24 heures destinée à parachever la reprise des relations diplomatiques entre la France et le Rwanda, après trois ans de rupture. Les deux pays ont en effet annoncé la reprise de leurs relations le 29 novembre.
Accueilli non pas par son homologue rwandaise, Louise Mushikiwabo, comme initialement prévu, mais par la directrice du protocole de la présidence rwandaise, Rose Kabuye, Bernard Kouchner rencontrera jeudi le président rwandais Paul Kagame.
Le génocide rwandais a fait, selon l'ONU, au moins 800.000 morts, essentiellement parmi la minorité tutsi.
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