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Le spectre de l’athéisme hante l’islam sur les réseaux sociaux
Depuis les attentats du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center à New York, le déclenchement des printemps arabes en 2011 et plus récemment la tuerie contre la rédaction de «Charlie Hebdo» le 7 janvier 2015 au nom d’Allah, un phénomène paradoxal frappe de plein fouet la religion du prophète Mahomet: l'athéisme gagne du terrain en terre d'islam.
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Alors qu’un processus de conversions à l’Islam et de radicalisation est enregistré dans les sociétés occidentales, une vague d’abandon de la religion de la «soumission» à Dieu est de plus en plus perceptible, grâce aux réseaux sociaux, dans les sociétés arabo-musulmanes. Un mouvement de révolte parallèle aux mouvements politiques et sociaux qui ont réussi à faire chuter plusieurs dictateurs sans toucher pour autant au pouvoir des religieux.
Bravant les risques de fatwa, de peines de mort et autres châtiments prévus par la charia selon les pays, ils et elles sont désormais des milliers à exprimer librement sur le Web leur rejet de tout pouvoir suprême et de toute idéologie religieuse.
Profession de non foi
Avant-garde de cette renonciation aux dogmes et enseignements de l’islam, le Forum des Ex-Musulmans qui affiche près de 20.000 abonnés sur Twitter et plus de 5000 sur Facebook. En exergue de leur compte figure leur profession de non foi : «Nous sommes d’anciens musulmans d’origines et de croyances diverses. Nous sommes pour le sécularisme (séparation de la religion et de l’Etat), la liberté de conscience et d’expression. Nous sommes contre la bigoterie, l’extrémisme et les lois sanctionnant l’apostasie (le rejet d’une croyance).»
Défense des droits des femmes
Parmi les abonnés à ce forum, on trouve Mariam Namazie une femme politique libre-penseuse dissidente de la République Islamique d’Iran et militante pour les droits des femmes. Sur son compte twitter, où on dénombre près de 15.000 abonnés pour elle seule, elle lutte contre la ségrégation sexuelle du régime des mollahs et multiplie les messages en faveur de l’athéisme et de la rationalité. Elle prend également la défense de ceux qui sont persécutés pour ces choix.
Un Palestinien publie un brûlot contre l’islam
Comme par exemple le jeune palestinien Waleed al-Husseini. Arrêté à l’âge de 21 ans par l’autorité palestienne en Cisjordanie pour apostasie, il a purgé dix mois de torture physique et psychologique à la prison Qalqilya en Cisjordanie sans renoncer à ses choix. Il est aujourd’hui réfugié politique en France où il a fondé le Conseil des ex-musulmans. Une semaine après la tuerie de Charlie, il publie sous le titre Blasphémateur un brûlot contre l’islam et les religieux «qui ont fabriqué des générations de décervelés à l’ignorance sacralisée, privés d’avenir, de progrès, d’humanisme, de dignité et de liberté.»
Une litanie de noms de libres-penseurs
Sur le Web, c’est désormais toute une litanie de noms d’hommes et de femmes qui se déploie comme autant de ralliements à la libre-pensée. Outre les historiques telles que la Somalienne Ayaan Hirsi Ali, avec près de 40.000 abonnés ou l’Egyptienne Aliaa Magda Elmahdy avec 42.000, on y trouve l’écrivain marocain Kacem el Ghazzali, 4000 abonnés ou le Saoudien Raïf Baddawi, 41.000, actuellement prisonnier de conscience et en attente de l’exécution d’une sentence de coups de fouet.
Même si leur entreprise de soulever le turban d’airain qui pèse sur leur liberté de penser et de croire s'apparente à un des travaux d’Hercule, leur tâche est parfois facilitée par ceux-là même contre lesquels ils s’insurgent.
Dernier exemple en date, à la question d’un téléspectateur qui demandait si c’était grave de continuer à se masturber en étant marié, le prédicateur turc Mucahid Cihad Han a répondu qu’il fallait «résister aux tentations de satan… Ceux qui ont des rapports sexuels avec leurs mains trouveront leurs mains enceintes dans l’au-delà». Ses propos ont aussitôt été tournés en dérision sur la toile.
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