Reportage "Si les gens ne se soucient même pas de Gaza, alors se soucieront-ils de Jénine ?" : la Cisjordanie sous le choc après trois jours de raid israélien

Un communiqué de l’armée israélienne précise qu’il s’agissait d’une opération qui a permis "la découverte de laboratoires, tunnels et fabriques d’explosifs". Douze Palestiniens ont été tués, et les infrastructures du camp ont été largement détruites.
Article rédigé par Alice Froussard
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La ville de Jénine après un raid de trois jours de l'armée israélienne. (ALICE FROUSSARD / RADIO FRANCE)

Les routes du camp de réfugiés de Jénine, au nord de la Cisjordanie occupée, ont des airs de tranchées, boueuses. Elles ont été complètement détruites par les bulldozers israéliens. À l’entrée du camp, sur la devanture de trois petites échoppes, des étoiles de David taguées sur la devanture. "Pendant trois jours, ils ont ouvert tous ces magasins. Ils ont dessiné ces signes et écrit '7 octobre'. Ils ont détruit ma boutique, vous voyez  ?, nous montre un Palestinien. Ils ont détruit ce qu’il y avait à l’intérieur : des caméras, des télévisions... Et nous étions cloîtrés chez nous, sans pain, sans lait pour les enfants, pendant trois jours."

Trois jours durant lesquels l'armée israélienne a mené un raid sur Jénine et son camp de réfugiés. Un communiqué de l’armée précise qu’il s’agissait d’une opération qui a permis "la découverte de laboratoires, tunnels et fabriques d’explosifs". Mais lors de cette incursion, douze Palestiniens ont été tués, et les infrastructures du camp ont été détruites. Pour beaucoup d'habitants, c'est une punition collective, une de plus. 

L'heure est désormais au constat des dégâts, et au deuil. "Là, il y a un martyr qui arrive", pointe le même habitant, en désignant un cortège. Des hommes portent un corps sans vie, tué lors du raid. Direction la mosquée pour les funérailles. Dans les maisons, les femmes pleurent un fils, un frère, un neveu. Pendant trois jours, c’était l’horreur.

"L'armée s'en prend aux ambulances"

À l’hôpital gouvernemental de Jénine, Samah, volontaire du Croissant-Rouge palestinien, raconte que même les ambulances et les blessés, ne pouvaient pas être pris en charge. "Ma mission, c'était d’essayer d’évacuer les gens jusqu’à l’hôpital. À un moment, j’étais à un rond-point proche du camp de réfugiés. Il y avait des blessés et on a vu les lasers des tireurs d’élite sur nous. Puis, ils sont sortis et ils ont commencé à nous attaquer", témoigne Samah. 

"Ils tiraient sur tout le monde. Même les oiseaux qui volaient, s'ils avaient pu, ils auraient tiré."

Samah, volontaire du Croissant-Rouge palestinien

à franceinfo

"En ce moment, l’armée est de plus en plus aux abords des hôpitaux, et s’en prend aux ambulances, les empêchant de circuler. Ça a été le cas à l’hôpital Ibn Sina et à l’hôpital gouvernemental", raconte encore Samah. À Jénine, tout ça laisse une impression de déjà-vu. Pire, celle d’une vengeance des soldats israéliens depuis le 7-Octobre. "Mais si les gens ne se soucient même pas de Gaza, alors, se soucieront-ils de Jénine ?", confie, las, un jeune devant l'hôpital.

Jénine, en Cisjordanie, sous le choc : reportage d'Alice Froussard

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