"Bon cinéaste, mais pas excellent fiscaliste" : l'avocat de Jean-Jacques Annaud réagit aux révélations des "Paradise Papers"
Les "Paradise Papers" révèlent, mercredi, que le réalisateur Jean-Jacques Annaud a créé un trust aux îles Caïmans, qui lui permet de soustraire de l'argent au fisc français.
Depuis dimanche 5 novembre, les "Paradise Papers" désignent la fuite massive de documents confidentiels provenant principalement du cabinet d'avocats Appleby, situé aux Bermudes. Ces révélations ont pu être publiées grâce à une enquête menée conjointement par 381 journalistes du monde entier, et supervisée pendant des mois par le Consortium international de journalistes d'investigation (ICIJ), dont la cellule Investigation de Radio France est membre. L'avocat Éric Delloye, mandaté par le réalisateur Jean-Jacques Annaud, mis en cause par les dernières révélations des "Paradises Papers", a répondu à la cellule Investigation de Radio France sur l'argent caché par le cinéaste français.
Radio France : Pourquoi Jean-Jacques Annaud a-t-il créé un trust aux îles Caïmans ?
Éric Delloye : À partir des années 1995, Monsieur Annaud a été lié à un studio de cinéma qui dépend du Groupe Sony et notamment de Columbia. Ce studio lui a versé une rémunération, en lui indiquant qu'il devait la percevoir à travers une structure montée par l'avocat-conseil du studio. L'argent a donc été versé sur ce compte détenu par l'intermédiaire d'un trust qui n'était donc pas créé à l'initiative de M. Annaud, mais à la demande du studio. Ce dernier souhaitait le rémunérer de cette manière. Je ne pense pas qu'il y ait eu d'autres rémunérations. Je n'ai pas d'informations précises sur ce point.
Pourquoi avoir viré l'argent de ce trust vers une société de Hongkong en 2014 ?
M. Annaud est bon cinéaste, mais pas excellent fiscaliste. Je pense qu'il a été conseillé par des avocats anglo-saxons, mais aussi par la banque. Or, au cours des années récentes, il y a eu une pression sur les banques à la suite des décisions de transparence fiscale concernant les résidents des pays du G20. En conséquence, les banquiers ont préféré éloigner d'eux l'éventuelle responsabilité de manquements aux obligations fiscales.
Quelle a été la décision de votre client lorsque nous lui avons fait part de notre découverte par courrier recommandé ?
Saisi de votre courrier, M. Annaud a souhaité que nous étudiions précisément ses obligations fiscales, afin de vérifier la conformité de sa situation fiscale vis-à-vis de l'administration fiscale française. Afin d'éviter toute discussion, nous avons, au cours du mois d'octobre 2017, transmis l'ensemble des informations à l'administration fiscale. Nous leur avons dit que nous étions en train de procéder à un audit de la situation fiscale de M. Annaud et que nous voulions, en toute transparence, signaler l'existence de ces structures et de ce compte bancaire détenu à l'étranger.
Cela peut faire penser que sans l'enquête des "Paradise Papers", le fisc ne serait toujours pas au courant.
Il est probable que vous ayez eu une contribution assez favorable à l'intention de M. Annaud de procéder à un audit de sa situation fiscale.
Cellule Investigation de Radio France / ICIJ / Süddeutsche Zeitung
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