Peut-on toucher Daech au porte-monnaie ?
Peut-on mobiliser l’arme économique pour toucher Daech ? Encore faut-il connaître l’origine de ses revenus. Parmi les premiers postes de financement du groupe, l’or noir.
Comment l'organisation terroriste se finance-t-elle ?
L’organisation terroriste contrôle une dizaine de champs pétroliers en Irak et en Syrie et pomperait chaque jour en moyenne 48.000 barils. Le mois dernier, une enquête du Financial Times montrait que l’organisation Etat islamique (OEI) parvenait, vaille que vaille, à maintenir en activité des installations vieillissantes, avec l’aide d’ingénieurs et de spécialistes grassement rémunérés. Le pétrole extrait est ensuite revendu localement pour les besoins des transports et de l’agriculture ou en Turquie par des filières de contrebande. Les raffineurs viennent se fournir à-même les tranchées, où l’or noir est stocké, près des puits. Les files de camions citernes peuvent atteindre plusieurs kilomètres de long.
Mais le pétrole n’est pas l’unique source de revenus de Daech, qui s’appuie également sur un "impôt révolutionnaire de type mafieux, prélevé sur les populations locales ", explique Christian Chavagneux, docteur en économie. "L’Etat couvre un territoire équivalent au Royaume-Uni, il y a 10 millions de personnes. C’est une armée d’occupation qui pratique l’impôt mafieux : ‘je vous donne ma protection si vous payez’ ."
A quoi sert cet argent exactement ? "A priori, cet argent est détenu localement pour faire tourner l’économie ", indique Christian Chavagneux. "L’Etat islamique se voulant un Etat, il paye des fonctionnaires pour s’occuper de la police, de l’école, des tribunaux. Et puis ils paient leurs soldats, entre 300 et 500 dollars par moi ce qui, localement, est vraiment un montant énorme. On verse aussi des allocations familiales aux femmes et aux enfants de combattants. S’ils décèdent, on continue à les aider ."
Peut-on geler les avoirs de Daech ?
Parce que l'argent reste, pour l’essentiel, localisé sur le territoire de Daech et ne circule pas tellement dans le système financier international (comme ce fut le cas pour Al Qaeda par exemple), il est compliqué de geler les avoirs de Daech, explique encore l’éditorialiste à Alternatives économiques. "Ce qui vient des donateurs internationaux est relativement faible ". Néanmoins, les services de renseignement ont, semble-t-il, pu localiser certaines banques sur le territoire de Daech, qui "peuvent avoir accès au système financier international. Là, il faut bien sûr couper toute forme accès ."
Depuis janvier, la plupart des grands pays industrialisés font preuve d’une plus grande vigilance, en particulier du côté de la City, premier centre financier situé à Londres, où l’on sait, d’après Christian Chavagneux que "de l’argent qui finance Daech circule ". Autre piste à creuser pour toucher Daech au portefeuille : lutter contre la corruption de certains financiers à Londres. "Une étude du Ministère des finances britannique a révélé il y a un 15 jours que les gens de Daech corrompaient des financiers à Londres pour pouvoir recevoir de faux prêts " indique Christian Chavagneux. "Ces faux prêts sont ensuite retirés un peu partout dans le monde, ce qui permet de nourrir le terrorisme ."
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