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Guerre Israël-Hamas : y a-t-il une différence entre un "cessez-le-feu" et une "trêve humanitaire" ?

Ce débat sémantique contribue à diviser le Conseil de sécurité de l'ONU, qui échoue à s'accorder sur les moyens de protéger la population de Gaza. L'Assemblée générale de l'ONU a de son côté voté une résolution, non contraignante, en faveur "trêve humanitaire".
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des Palestiniens collectent des sacs de légumineuses séchées dans un centre géré par l'ONU à Deir al-Balah (Gaza), le 28 octobre 2023. (MOHAMMED ABED / AFP)

Assiégée par Israël, la bande de Gaza a presque épuisé ses réserves d'eau, de nourriture, de médicaments et de carburant. Pour permettre aux ONG d'apporter de l'aide à la population de l'enclave palestinienne, l'Assemblée générale de l'ONU s'est prononcée à une large majorité, vendredi 27 octobre, en faveur d'"une trêve humanitaire immédiate".

Emmanuel Macron a également appelé vendredi à une "trêve humanitaire" afin de protéger les civils gazaouis, lors de sa tournée au Proche-Orient. De leur côté, des organisations internationales, dont Médecins du monde, appellent à un "cessez-le-feu". Y a-t-il une différence entre ces deux expressions ? 

"Il n'y a aucune différence. C'est juste de la sémantique politique ou diplomatique pour faire accepter l'idée d'une interruption, même temporaire, des bombardements", tranche auprès de franceinfo Johann Soufi, avocat spécialiste du droit pénal international et ancien responsable des activités juridiques du bureau de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens au Proche-Orient. 

Sur son site, l'association Médecins sans frontières précise qu'un cessez-le-feu consiste à un "accord organisant la cessation de toute activité militaire durant un temps donné et dans un espace donné. Il peut être déclaré de façon unilatérale ou bien être négocié entre les parties au conflit". Il implique en général un processus politique formel, avec des engagements pour désamorcer le conflit : retrait d'armes, repositionnement des forces… Un cessez-le-feu n'a pas forcément une fonction humanitaire. Il est aussi à distinguer d'un accord de paix, car il ne met pas fin juridiquement à l'état de guerre.

"Pas la même chose", pour Washington

Le débat sémantique compte pour les Etats-Unis. "Un cessez-le-feu à ce stade-ci ne bénéficierait qu'au Hamas", a déclaré mardi à la presse le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby. "Nous voulons voir les mesures de protection pour les civils. Or des pauses dans les opérations sont un outil, une tactique, qui peuvent y parvenir pour une période temporaire (...) mais cela n'est pas la même chose qu'un cessez-le-feu", a-t-il ajouté.

L'Allemagne aussi défend l'idée de "fenêtres humanitaires". Berlin estime que "dans la situation actuelle, faire comme s'il fallait faire la paix ou instaurer un cessez-le-feu n'est pas à la hauteur", selon les mots du porte-parole du chancelier Olaf Scholz, Steffen Hebestreit.

Cette nuance a même exposé les divisions au sein du Conseil de sécurité de l'ONU. Les Etats-Unis ont d'abord soutenu une proposition soutenant le droit d'Israël à se défendre, sans évoquer de trêve, avant d'inclure dans une deuxième version un appel "à toutes les mesures nécessaires, telles que des pauses humanitaires" pour acheminer l'aide vers Gaza. La Russie s'est opposée au texte américain justement parce qu'il n'incluait pas "un appel à un cessez-le-feu rapide et inconditionnel".

Moscou a toutefois échoué à faire adopter sa propre résolution, soutenue par les Etats arabes, qui appelait à un "cessez-le-feu humanitaire" immédiat et condamnait les "attaques abominables du Hamas". Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont voté contre ce texte.

Une image "d'impuissance" de l'ONU

Après quatre échecs en dix jours du Conseil de sécurité à agir, l'Assemblée générale a pris le relais sur ce dossier. La résolution votée vendredi, non contraignante, "demande une trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant à la cessation des hostilités". Sur les 193 membres de l'ONU, elle a recueilli 120 votes pour, 14 contre, dont Israël et les Etats-Unis qui ont déploré l'absence de mention du Hamas, et 45 abstentions.

Le texte, préparé par la Jordanie au nom du groupe de 22 pays arabes, a reçu le soutien de la France, de l'Espagne et de la Belgique, tandis que l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie et la Finlande se sont abstenues. L'Autriche, la République tchèque et la Hongrie ont voté contre. Qualifiée d'"infamie" par Israël, la résolution a en revanche été saluée par l'ambassadeur palestinien auprès de l'ONU, Riyad Mansour, et par le Hamas.

"Le fait que le vote intervienne juste au moment où Israël promet d'accroître ses opérations au sol donne à l'ONU une image d'impuissance", a commenté auprès de l'AFP Richard Gowan, directeur des questions onusiennes à l'International Crisis Group. Le Conseil de sécurité arrivera-t-il à reprendre la main et à se mettre enfin d'accord ?

"Nous allons utiliser l'autorité morale de l'Assemblée générale et travailler au Conseil de sécurité sur une proposition [des 10 membres non permanents] pour tenter de sortir de l'impasse", a assuré l'ambassadrice des Emirats arabes unis, Lana Zaki Nusseibeh. Pour être adoptée, une résolution du Conseil nécessite au moins neuf voix et aucun veto des membres permanents (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Chine).

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