: Reportage "La peur est entrée dans ma maison" : depuis le 7 octobre, la vie entre parenthèses de ces milliers d'Israéliens relogés loin des régions attaquées
La guerre entre Israël et le Hamas est entrée dans son troisième mois. Le conflit s’installe dans une durée jamais encore atteinte dans la région. Pour ces dizaines de milliers d’habitants des régions proches de la bande de Gaza attaquées par le Hamas le 7 octobre qui ont été relogés dans l’urgence, par villages entiers, dans des hôtels de luxe au bord de la Mer Morte, le temps semble long. C’est le cas par exemple dans la station balnéaire d’Ein Bokek.
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"La mer morte ? Non, je n’aime pas", tranche Louis. Malgré l'hôtel de luxe dans l’une des destinations de vacances les plus prisées d’Israël, il préférera toujours son kibboutz de Be'eri. "D’abord il fait trop chaud, et puis l’hôtel, c’est très bien trois nuits et quatre jours, mais là, deux mois, c’est comme une prison !" Louis vient de l’un des villages les plus meurtris par les attaques du 7 octobre. Il explique que tout le monde ici, sur le sable ocre et dans l’eau huileuse de la Mer Morte, traîne une histoire terrible et traumatisée. Shoshie, par exemple, a dû fuir, sans son mari mais avec deux enfants, la ville de Sdérot toute proche de Gaza. "Ici ce ne sont vraiment pas des vacances", confirme-t-elle, mais elle "ne sai[t] pas" si elle pourra rentrer chez elle : "Pour l’instant, non. Si, vraiment, ils nettoient Gaza comme il le faut, alors oui..."
"Ça fait très peur de rentrer maintenant, après le traumatisme qu’on a subi. Ils ont beaucoup tué là-bas, beaucoup..."
Soshie, réfugiée israélienne de Sdérotfranceinfo
Shoshie parle à franceinfo sur le chemin de l’école où elle va chercher son fils. Un établissement improvisé en quelques jours, sur un terrain à côté de la plage, pour 170 enfants du CP à la 4e, et dirigé par Eyal. "Non, ici ce n’est vraiment pas une école normale, estime-t-il. On a des élèves qui ont perdu des frères, des parents, des amis. Même dans l’équipe des enseignants." Et puis, il y a les enfants pris en otages par le Hamas. "Leurs copains de classe sont nos élèves ici. C’était très difficile pour certains d’étudier alors que leurs amis étaient otages à Gaza. Maintenant on espère que d’anciens otages vont venir étudier ici, mais ça va prendre un peu de temps", souffle Eyal.
"On attend, on attend..."
"On se prépare à accueillir les enfants jusqu’à l’été prochain", conclut le directeur. Pourtant, ce n’est pas vraiment ce qu’espèrent les déplacés de la Mer Morte : "On attend, on attend...", soupire Baruch, assis sur un banc, devant son hôtel. "On n’a pas l’impression d’être dans un hôtel, on se sent tout le temps comme des réfugiés. Le 1er novembre, ils ont dit que ça serait terminé le 15, maintenant ils disent fin décembre. J’espère que la guerre va finir." Pour la suite, Baruch a déjà pris sa décision : "La peur est entrée dans ma maison, on ne veut plus retourner vivre à Sdérot." Après la mer Morte, lui et sa femme prendront un appartement, près de Tel Aviv.
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