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A Beyrouth, l'enjeu de la restauration des toiles et vitraux endommagés par l'explosion

Maya Husseini et Gaby Maamary font partie des artistes et artisans qui s'affairent depuis l'explosion à sauver le patrimoine et l'âme de Beyrouth.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
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Maya Husseini, maître-verrier, travaille sur un vitrail pour une cathédrale, en septembre 2020.   (ANWAR AMRO / AFP)

Maya Husseini espérait prendre sa retraite après des décennies de conception de vitraux, mais cette artiste est submergée de demandes de restauration depuis l'explosion massive qui a ravagé des pans entiers de la capitale Beyrouth. "Je ne peux pas ne pas essayer de restaurer ce qui est parti", affirme cette maître-verrier de 60 ans aux cheveux courts et bouclés rouge vif. 

L'explosion gigantesque au port le 4 août a fait plus de 190 morts et des milliers de blessés. Sous l'effet d'un souffle monumental, elle a également endommagé des centaines de structures sur plusieurs kilomètres à la ronde. Les bâtiments historiques n'ont pas été épargnés. Maya est l'une des artistes qui s'affaire depuis à sauver le patrimoine et l'âme de Beyrouth.

Un vitrail déjà restauré après la guerre civile

Dans son atelier en sous-sol dans la banlieue de la capitale, elle montre ce qui reste de fenêtres d'une église du XIXe siècle qu'elle avait déjà restaurée après la guerre civile de 1975-1990. Des tiges métalliques contorsionnées, abritant quelques morceaux de vitraux orange et bleu, gisent dans une boîte en carton. "Au moins sept projets sur lesquels j'avais travaillé ont volé en éclats", déplore-t-elle. Parmi eux, des scènes bibliques sur verre pour une église et d'éblouissants vitraux jaunes et oranges pour le musée Sursock, très réputé. Avant l'explosion, elle avait prévu de prendre sa retraite après avoir mis les dernières touches à la conception des vitraux d'une cathédrale en construction en Jordanie.

Pour certaines demandes, je ne pourrai rien faire avant au moins deux ans.

Maya Husseini, maître-verrier libanaise

AFP

Sur sa table de travail, Maya Husseini prend un morceau de verre vert et l'insère entre des bandes de plomb pour reconstruire une fenêtre représentant un jardin de fleurs et de feuilles pour une maison privée. Malgré l'aide de ses nouveaux apprentis, elle dit manquer de temps pour répondre à toutes les sollicitations. Dans les quartiers les plus sinistrés près du port, une course contre la montre s'est engagée pour couvrir jusqu'à 100 bâtiments historiques avant l'arrivée des pluies diluviennes. 

Sauver le patrimoine

Une conférence parrainée par l'Unesco est prévue pour collecter des centaines de millions de dollars destinés aux travaux de restauration et de reconstruction, avait annoncé la directrice de l'organisation, Audrey Azoulay, depuis Beyrouth. Entretemps, les Libanais tentent de sauver leur patrimoine. A l'image de Gaby Maamary, qui a décidé de restaurer gratuitement des toiles endommagées. Sa source de motivation, dit-il, est le dévouement de la jeunesse libanaise au lendemain du drame, qui s'est mobilisée pour balayer les décombres dans la rue et aider les sinistrés.

Gaby Maamary, restaurateur d'art libanais, examine une peinture de l'artiste Elie Kanaan, endommagée pendant l'explosion au port de Beyrouth.  (ANWAR AMRO / AFP)

L'héritage est "quelque chose que vous pouvez facilement perdre si vous n'y prêtez pas attention", affirme l'artiste et universitaire de 58 ans. Dans son atelier à Beyrouth, il examine soigneusement une nature morte du XVIIe siècle de l'artiste italienne Elena Recco, représentant un chat lorgnant avidement des poissons morts.


La toile a été entaillée par des éclats de verre. Portant des gants blancs, il montre une autre toile qu'il a commencé à nettoyer, dont la partie non traitée est légèrement plus foncée et couverte d'une fine poussière de verre scintillante. A proximité, une peinture de l'artiste libanaise disparue, Sophie Yeramian, a craquelé durant l'explosion.

Manque d'équipements

"Nous ne nous attendions pas à autant d'appels", confie Gaby Maamary, qui évalue les dégâts dans des galeries d'art et chez des particuliers. Lors d'une visite à domicile, il a récupéré une toile endommagée valant des dizaines de milliers de dollars qui allait être jetée. Une deuxième avait été recouverte de ruban adhésif.
La propriétaire s'était rendue à l'hôpital avec son fils gravement blessé après l'explosion et la personne ayant aidé à balayer les décombres n'avait pas réalisé leur valeur.

Nous continuerons à faire ce travail quotidiennement jusqu'à ce que nos matériaux ou moyens s'épuisent.

Gaby Maamari, restaurateur

AFP

La restauration implique des heures de planification préalables, explique Gaby Maamari. Ensuite pendant la remise en état, "parfois, la même étape doit être répétée plusieurs fois, car nous ne disposons pas de l'équipement de pointe des musées". L'acheminement de matériaux depuis l'étranger est aussi compliquée par la suspension depuis près d'un an des virements par des banques touchées de plein fouet par la crise économique. Mais l'artiste refuse d'abandonner. Il a recours aux aides d'amis et aux produits disponibles localement.

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