Témoignages "Je n’ose plus tenir mon téléphone portable" : après les nouvelles explosions au Liban, la psychose gagne la population

Article rédigé par franceinfo
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Une ambulance se rend à l'hôpital libano-italien dans la ville de Tyr (Sur), au Liban, le 18 septembre 2024. Photo d'illustration. (STRINGER / ANADOLU / VIA AFP)
Une nouvelle vague d'explosions d'appareils de transmission du Hezbollah a eu lieu mercredi au Liban. Tous les regards sont tournés vers Israël alors que le chef de la milice chiite Hassan Nassralah doit s’exprimer jeudi.

Après les bipeurs, les talkies-walkies. Des membres du Hezbollah ont été victimes mercredi 18 septembre de l'explosion simultanée de talkies-walkies, notamment dans la banlieue sud de Beyrouth, au lendemain des explosions de bipeurs appartenant à des membres de la milice chiite. Selon le dernier bilan du ministère de la Santé, jeudi, on dénombre au moins 37 morts et plus de 3 500 blessés dans ces deux attaques.

Quand le bruit d'une seconde vague d'explosion s'est répandu à travers le Liban, l'inquiétude et la méfiance ont gagné la population. "J'ai très peur, c'est dur d'essayer de rassurer ses enfants quand toi-même tu as peur, explique Hoda, Beyrouthine et mère de deux enfants. On a peur mais on ne sait pas de quoi, on a peur de tout."

"Tout autour de toi fait peur. Tu rentres chez toi, tu as peur. Tu sors, tu as peur. Il n'y a pas de sécurité."

Hoda, Beyrouthine

à franceinfo

"C'est vraiment la panique totale"

Mona gère un café à proximité de l'un des hôpitaux de la capitale qui accueille des blessés de ces attaques aux bipeurs et aux talkies-walkies. Elle fume nerveusement un narguilé en regardant son téléphone d'un air perplexe. "Je n'ose plus tenir mon téléphone dans mes mains, avant je le posais à côté de moi pour dormir, mais maintenant je n'ose plus", raconte Mona.

"J'ai acheté un billet d'avion. Je veux partir. Je ne reste plus ici. Maintenant, j'ai peur de tout."

Mona, gérante d'un café à Beyrouth

à franceinfo

Si les vols sont maintenus, Mona partira pour la Turquie. Face au risque d'escalade, le ministère des Affaires étrangères demande aux ressortissants français de ne pas se rendre au Liban. "C'est horrible, on ne sait plus quoi faire, explique Dana, 25 ans, habitante de Beyrouth et à bout de nerfs. Tous les jours, il y a quelque chose de nouveau qui nous prend par surprise. C'est vraiment la panique totale. Mes parents ont peur d'utiliser le wifi, ils craignent que les ordinateurs ou les téléphones mobiles explosent. Depuis deux ans, je pense à partir, mais là, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase."

Un discours très attendu

Le mode opératoire inédit par son ampleur terrifie les Libanais : des milliers d'explosions simultanées et meurtrières, des mains arrachées, des visages défigurés, des blessures hors du commun, selon les médecins. Elie habite à Batroun, dans le nord du Liban, il oscille entre colère et stupeur : "C'est un crime, ce n'est pas la guerre. La guerre, ce n'est pas comme ça. Dans la guerre, il y a des règles. Hier, ce sont les bipeurs ; aujourd'hui, ce sont les talkies-walkies ; demain, on ne sait pas. Ce sera peut-être les téléphones, les ordinateurs ou les appareils ménagers. On ne pouvait pas imaginer qu'ils voulaient faire ça. C'est comme dans un film, c'est une idée incroyable."

Les Libanais accusent Israël d'être à l'origine de ces attaques sophistiquées mais l'Etat hébreu garde le silence et n'a fait aucun commentaire sur le sujet. Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, doit prendre la parole jeudi après-midi. Son discours est très attendu et alimente les spéculations sur une possible riposte du Hezbollah, sur des cibles en Israël. Hassan Nasrallah, connu pour ses discours calibrés, donnera des pistes. Il reviendra évidemment sur ce fiasco sécuritaire, un camouflet qui a déstabilisé le Hezbollah au bord d'une guerre totale contre Israël. Mais avant les éventuelles représailles, pour l'instant au Liban, l'heure est aux funérailles et au deuil.

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