Cet article date de plus de neuf ans.

Ryad intervient au Yémen pour contrer l'Iran

L’Arabie Saoudite a volé au secours du gouvernement légitime du Yémen en lançant des frappes aériennes contre les rebelles houthis. Ce faisant, il s’en prend indirectement à l’Iran qui soutient la rébellion. Bref, la réponse du berger à la bergère, quand en Irak, l’Iran soutient le pouvoir dans sa lutte contre Daech, le groupe sunnite réputé proche de Ryad.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Les habitants constatent les dégats suite à une frappe aérienne saoudienne contre les rebelles Outhis, le 26 mars 2015. (AFP/Mohammed Huwais)

Les forces en présence

Les Houthis
C’est un mouvement politico-religieux installé au nord du pays et de la capitale Sanaa. En fait, ils appartiennent au zaïdisme, une branche du chiisme. Depuis 2004, les Houthis ont pris les armes, se plaignant de marginalisation. Un cessez-le-feu, signé en 2010, a volé en éclats avec l’arrivée au pouvoir de Rabbo Mansour Hadi, un sunnite au poste de président, jusqu’alors réservé à un chiite.

Le gouvernement légitime du président Hadi
Abd Rabbo Mansour Hadi a succédé au président Ali Abdallah Saleh, chassé du pouvoir en février 2012 par la pression de la rue. Mais, dans un pays divisé, il n’a pas pu conserver le pouvoir face à la poussée des rebelles, et a fui Sanaa pour rejoindre Aden, l’ancienne capitale.

L’Iran
Bien que Téhéran le nie, l’Iran chiite est fortement soupçonné de soutenir les rebelles houthis de même obédience. D’ailleurs, le ministère iranien a vite réclamé la cessation de toutes les «agressions» militaires au Yémen, dès que l’Arabie Saoudite a lancé des frappes aériennes.

L’Arabie saoudite
Ryad fait le gendarme dans la région. L’Arabie protège notamment sa frontière avec le Yemen, où elle a même érigé un mur. Sa construction a été interrompue en 2004, au bout de 42 km, en raison de l’intervention des Etats-Unis. D’une manière générale, elle intervient dès que des mouvements chiites se font menaçants. En 2011 déjà, l’Arabie Saoudite était intervenue à Bahreïn, où la population majoritairement chiite voulait renverser la monarchie sunnite des Khalifas.

Daech et Al Qaïda
Les deux mouvements djihadistes sont présents au Yemen. Al Qaïda a longtemps été la cible des Etats-Unis qui ont régulièrement frappé ses chefs par drones interposés. Récemment, Daech a fait son apparition de façon sanglante, revendiquant des attaques contre des mosquées le 20 mars 2015. Trois attaques suicides ont fait 142 morts parmi des fidèles chiites de Sanaa.

Les enjeux

Incontestablement, l’Arabie saoudite a marqué les esprits en intervenant au Yémen. D’une part en raison de l’ampleur de l’opération. «Tempête décisive» a mobilisé 150.000 hommes et plus d’une soixantaine d’avions (majoritairement des autres monarchies du Golfe).
 
D’autre part, Ryad a réussi à réunir une grande coalition de dix pays où on trouve l’Egypte, la Jordanie, le Soudan, et même des pays éloignés : Maroc et Pakistan. Les Etats-Unis ont assuré apporter un soutien logistique à l’opération. Ryad réaffirme ainsi son leadership dans la région.

La division nord-sud
Le pays a été réunifié en 1990. Mais plus que jamais l’opposition entre nord et sud est consommée. Au nord de Sanaa, l’actuelle capitale, se trouvent les zaïdistes. Chiites, ils sont majoritaires dans cette région alors que le reste du pays est dominé par les sunnites. La fuite vers Aden (au sud) du président Hadi, n’a fait que renforcer ce sentiment de partition de facto.

Le pétrole 
Les observateurs s’accordent tous sur le fait qu’Iran et Arabie Saoudite se livrent une guerre d’influence au Proche-Orient. Ryad se devait de bloquer l’influence croissante de Téhéran, en Irak, Syrie, Liban et désormais Yémen. On évoque également le contrôle des détroits : Ormuz vers le golfe Persique et Bab al-Mandeb à l’entrée de la mer Rouge, c'est-à-dire la route du pétrole. Une route dont l’Arabie Saoudite ne peut pas laisser le contrôle à l’Iran et ses alliés.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.