Frappes en Syrie : "C'est toute la chaîne qu'on a frappée, pas uniquement les moyens chimiques"
Le général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU, a assuré, samedi matin sur franceinfo, que les frappes occidentales étaient "plus importante que celle de l'année dernière" menée par les États-Unis.
Les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont lancé dans la nuit de vendredi à samedi 14 avril une opération militaire conjointe en Syrie, en représailles à une attaque chimique présumée le 7 avril à Douma, près de Damas. "Ceci reflète le travail de plusieurs années de coopération", estime samedi sur franceinfo le général Dominique Trinquant, conseiller défense d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle.
franceinfo : En avril 2017, Donald Trump avait fait bombarder une base militaire syrienne, en riposte à une attaque au gaz sarin imputée au régime, qui avait tué plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (nord-ouest). Est-ce différent cette fois-ci ?
Dominique Trinquant : Il y a un ton qui est haussé. Pour la frappe d'il y a un an [Donald Trump] devait décider seul et attaquer seul. Là, il attaque avec ses alliés britanniques et français. Emmanuel Macron a été très clair sur le fait qu'il ne faisait la guerre ni à la Russie, ni à l'Iran, ni réellement au gouvernement de Bachar al-Assad, mais qu'il condamnait l'attaque chimique et que c'était contre les attaques chimiques. Ces attaques sont contre un laboratoire, l'autre contre des dépôts et une troisième est intéressante : celle contre la garde républicaine, parce que c'est le premier cercle de décision de Bachar al-Assad. La garde républicaine peut être identifiée comme un organe décisionnel. Donc à partir de ce moment-là, c'est toute la chaîne qu'on a frappée, pas uniquement les moyens chimiques qui peuvent être dispensés, mais également ceux qui décident de cette utilisation. Donc, la frappe est plus importante que celle de l'année dernière.
L'état-major français a confié la mission de bombardement à plusieurs Rafale. Paris n'a donc pas qu'un rôle passif ?
Cela illustre bien la coopération avec les armées britanniques qui est très approfondie depuis longtemps, aussi bien en Afghanistan, au Moyen Orient, que dans le Sahel. Les liaisons établies entre la France et les États-Unis sont excellentes et je pense que ceci reflète le travail de plusieurs années de coopération.
Après sept ans de guerre civile, Donald Trump et ses alliés décident d'intervenir. N'y a-t-il pas un risque de revenir après à un statu quo qui est le piège dans lequel entraîne Bachar al-Assad ?
Il y a quatre ans, Bachar al-Assad était en train de perdre la guerre et des frappes auraient pu complètement déstabiliser et remettre la donne sur la table en Syrie. Depuis les Russes sont intervenus et ont réussi à remettre en scène le président Bachar al-Assad et la donne a changé. Aujourd'hui on peut dire au gouvernement de Bachar al-Assad d'arrêter les frappes et la brutalité, mais on sait que l'avenir se fera forcément avec une coordination entre Bachar al-Assad, les Russes et les Iraniens. Les Américains, les Français et les Britanniques cherchent à revenir dans cette négociation.
Ces frappes sont terminées. Le chef du Pentagone attend la réaction du régime syrien. Quelle peut-elle être ?
Le régime syrien a déjà dit qu'il avait tiré une trentaine de missiles, mais à ma connaissance aucun n'a atteint sa cible. Donc, le régime a réagi avec ses moyens de défense immédiats. Je pense que la réaction est plus à attendre de la Russie et de l'Iran que du régime syrien. Le régime syrien a atteint ses objectifs, il a repris la Ghouta donc maintenant les objectifs sont ailleurs.
Est-ce la première opération militaire d'envergure pour Emmanuel Macron ?
Il a très bien ciblé son message sur l'armement chimique avant. Il a montré qu'il était plus qu'un suiveur. Et il a toute de suite annoncé qu'il y aurait un débat au Parlement. Donc je ne me fais pas de souci de ce côté-là.
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