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Comment la Suisse a enterré son mini «Brexit»: un exemple pour Londres?

La Suisse avait approuvé en février 2014 un référendum limitant l’immigration. Elle se mettait ainsi en porte-à-faux avec l’Union européenne qui impose la libre circulation. Deux ans plus tard, Berne a voté une loi qui oublie l’essentiel du référendum et satisfait l’UE. Un exemple qui pourrait être suivi par Londres après le vote du Brexit?
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Affiche de l'UDC en faveur du vote contre «l'immigration de masse» en 2014. (UDC)

En Suisse, certains avaient espéré que le Brexit voté en juin 2016 donne du poids aux pays en relation avec l’UE sans être dedans, comme la Suisse ou la Norvège. En fait, le vote n'a pas du tout pesé sur les négociatrions entre la petite Suisse et la puissante Union européenne sur les conséquences du référendum de février 2014 contre «l'immigration de masse». 

Pour Bruxelles, ce texte voté par le peuple suisse remettait en cause la libre circulation des personnes, un des fondements de l'UE, clause acceptée par la Suisse dans le cadre des accords bilatéraux négociés entre la Suisse et l'UE. Résultat: le parlement suisse, qui devait voter une «loi d'application» pour mettre en œuvre la volonté du peuple a accepté un texte qui avait l'aval... de Bruxelles. 

L'UE veut le respect de la «libre circulation»
«L'équilibre trouvé autour de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2016 devrait permettre de préserver l'intégrité des engagements contractuels qui lient l'Union européenne et la Suisse.» Ce communiqué de la Commission européenne devrait mettre fin aux tensions qui régnaient entre l’UE et la Suisse après l’adoption du référendum suisse de 2014 sur les étrangers, pour le plus grand soulagement du monde économique helvétique.

A la suite de ce référendum, dont les conséquences pouvaient ressembler à celle du Brexit, même si le référendum n’évoquait pas les rapports avec l’UE, les autorités helvétiques ont tout fait pour édulcorer le texte voté. Elles ont mené des discussions avec Bruxelles et finalement réussi à faire adopter une loi qui permet à la Suisse et l’UE de s’entendre. Il faut dire que l'UE avait vivement réagi au référendum suisse, allant jusqu'à suspendre des coopérations déjà en œuvre comme Erasmus. 

Finalement, entre la volonté populaire et les oukazes européens, le parlement helvétique a voté un texte qui garantit la libre circulation tout en imposant aux entreprises quelques règles nouvelles et peu contraignantes sur l'emploi des étrangers. 


Comme au Royaume-Uni avec le Brexit, le vote du référendum avait été un choc en Suisse et le monde économique avait été très déçu par ce vote voulu par le parti nationaliste-libéral suisse, l'UDC, premier parti du pays. Commentant cette votation au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit avait prédit que les Suisses «reviendront à genoux parce qu’ils ont besoin de l'Europe» et que leur richesse dépend de l’UE, précisant que «60% des exportations suisses vont dans l’UE». 

Brexit: Londres attend des negociations «dures»
A genou ou pas, les Suisses ont finalement accepté les règles européennes entraînant quelques faibles protestations de l'UDC suisse qui a parlé de «violation crasse de la Constitution suisse» et de «capitulation devant l’Union européenne»... sans toutefois déposer un référendum de recours. Il n'en reste pas moins que la Suisse n'a pas réglé définitivement ses rapports avec l'UE.

Pendant ce temps, à Londres, le débat continue après le Brexit. «Hard brexiters» et «low brexiters» s’opposent sur les négociations à mener avec Bruxelles tandis que l’opposition au Brexit semble gonfler dans l’opinion selon les sondages… mais ceux-là étant totalement discrédités…

La tension est symbolisée par la démission du représentant permanent britannique à Bruxelles Ivan Rogers qui dénonce les «arguments mal fondés et la pensée confuse» de Londres. Le diplomate semble critiquer «le complexe de supériorité» de Londres qui juge mal «la remarquable unité dont font preuve les Vingt-sept pour rejeter – pour l’heure  les tentatives de négociations séparées lancées par Mme May», note Le Monde.

Le ministre des Finances britannique, Phipip Hamond, s'attend d'ailleurs à des négociations «dures» et «compliquées» avec l'Europe. Ce ne sont pas les Suisses qui vont dire le contredire. 

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