Deux cents ans après Waterloo, Londres refuse de prêter un Velázquez à Paris
"Le porteur d'eau de Séville" restera cette année à Apsley House, la demeure londonienne du duc de Wellington, l'adversaire de Napoléon et vainqueur de l'empereur en Belgique. Francetv info vous raconte les coulisses de cette opposition britannique.
Deux cents ans après la bataille, Waterloo reste un symbole de la rivalité qui perdure de part et d'autre de la Manche. En cette année de bicentenaire, le Royaume-Uni a refusé de prêter à la France un tableau de Velázquez, raconte Le Figaro, jeudi 29 janvier. Le porteur d'eau de Séville restera donc dans la demeure londonienne du duc de Wellington, l'adversaire de Napoléon qui a défait l'empereur en Belgique.
Francetv info vous raconte les coulisses de cette opposition britannique.
Le "refus le plus original" de la carrière du conservateur
C'est un "grand regret" pour Guillaume Kientz, conservateur au musée du Louvre. Commissaire de la prochaine rétrospective de Velázquez au Grand Palais, qui doit débuter le 25 mars prochain, il souhaitait à tout prix pouvoir exposer Le Porteur d'eau de Séville, "très grand chef-d'œuvre" du peintre espagnol, représentative de "la vivacité" de ses premières toiles. Guillaume Kientz espérait faire découvrir la toile, "connue des amateurs d'art", à un public plus large.
"Comme pour toutes les demandes de prêts, nous avons envoyé une lettre à Apsley House", la demeure de Wellington, qui expose actuellement l'œuvre, raconte-t-il à francetv info. "Nous avons reçu un courrier, qui justifiait le refus par le bicentenaire de Waterloo, détaille Guillaume Kientz. Ils ont accepté que je les rencontre, je suis revenu à la charge à plusieurs reprises, mais ils ont fini par opposer un non catégorique." Surpris, le conservateur confie qu'il s'agit là "du refus le plus original" de sa carrière.
"Dommage", réagit un héritier de Napoléon
Contactée par francetv info, la fondation English Heritage, qui gère le patrimoine d'Apsley House, confirme. "Le porteur d'eau de Séville est la peinture la plus importante des lieux et elle est exposée dans la pièce principale, la galerie Waterloo, justifie un porte-parole. Nous ne pouvions simplement pas prêter cette œuvre à l'occasion du 200e anniversaire" de la bataille. Le gestionnaire tient cependant à préciser que les descendants du duc de Wellington n'ont rien à voir avec cette décision. Apsley House a pourtant accepté de se séparer d'une autre toile de Velázquez, confiée au musée de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg, assure Le Figaro. Une "faveur", estime le journal, qui a été accordée car, en 1815, la Russie était alliée de la Grande-Bretagne.
Tout cela est "un peu dommage", estime Charles Bonaparte. L'homme a un illustre aïeul, puisqu'il est le descendant du frère cadet de Napoléon, Jérôme. "Au contraire, c'était le moment ou jamais de prêter cette œuvre et de montrer que ces conflits sont dépassés, affirme-t-il, interrogé par francetv info. Que la bataille de Waterloo reste dans les mémoires, c'est normal, dans les rancunes non : l'histoire ne doit pas être revécue aujourd'hui."
"Une ironie de l'Histoire"
Guillaume Kientz voit, lui, dans ce refus "une ironie de l'Histoire". "Ce tableau aurait très bien pu se retrouver au Louvre, raconte le conservateur. En fuyant l'Espagne, Joseph Bonaparte [frère de Napoléon] avait tenté de l'emporter, mais la carriole dans laquelle se trouvait l'œuvre a versé. Lord Wellington a mis la main dessus et elle lui a été offerte par le roi d'Espagne en guise de récompense." Malgré ce petit accroc, le commissaire compte toujours faire découvrir à des centaines de milliers de visiteurs l'œuvre de Velázquez.
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