Pour les indépendantistes écossais, le plus dur va commencer...
Ils sont, avec les conservateurs, les grands gagnants des législatives britanniques. Mais les indépendantistes écossais pourraient rapidement voir leur ciel s'obscurcir.
Une victoire éclatante et historique. Les indépendantistes écossais du SNP (Scottish national party) ont réussi plus qu'un exploit lors des législatives britanniques du 7 mai. En remportant 56 des 59 sièges écossais à la Chambre des communes, ils laissent un Labour exsangue : les travaillistes passent de 40 à un seul député en Ecosse. Le SNP, lui, n'en possédait que 6. Aujourd'hui, il devient la troisième force de la Chambre des communes, derrière les conservateurs et les travaillistes.
La presse écossaise, britannique et internationale salue le tour de force alors qu'on pensait les indépendantistes affaiblis, après l'échec du référendum de septembre 2014. Au contraire. Le raz-de-marée écossais fait du SNP une force incontournable dans le jeu politique britannique. Pourtant, une fois la victoire fêtée, le ciel risque de s'obscurcir pour les indépendantistes.
La politique de Cameron à digérer
Si le succès des indépendantistes écossais est impressionnant, ils vont devoir faire avec la victoire incontestable de David Cameron. Les conservateurs ont obtenu la majorité absolue, de quoi avoir les mains libres pour appliquer leur programme pendant cinq ans. Or, Nicola Sturgeon, Première ministre d'Ecosse et leader du SNP, a bâti sa campagne non sur l'indépendance de l'Ecosse mais sur la fin de la politique d'austérité menée par le gouvernement sortant. Bien plus à gauche que le Labour, elle a tendu la main aux travaillistes pour qu'ils réduisent ensemble les inégalités. Finalement, le SNP va devoir encaisser l'application des promesses de Cameron : de nouvelles coupes de 12 milliards de livres (16,4 milliards d’euros) dans les programmes sociaux (aides sociales, retraites, allocations familiales, aides sociales) et la poursuite des réformes engagées.
Des députés de seconde zone ?
Les 56 députés SNP vont-ils voir leur pouvoir réduit ? C'est en tout cas l'ambition de David Cameron. Après le rejet de l'indépendance écossaise lors du référendum, le Premier ministre britannique a présenté une loi "vote anglais pour les lois anglaises" qui imposerait que seuls les députés anglais de la Chambre des communes votent pour les compétences qui les concernent. C'est le cas actuellement pour les Ecossais qui disposent d'un Parlement, compétent pour les questions de justice, de santé, d'éducation et bientôt d'impôts. Mais la loi de Cameron "créerait deux types de députés à Westminster en privant les élus écossais du droit de vote sur certaines législations", souligne Le Figaro (article payant). La loi n'a pas pu être adoptée avant les élections législatives, mais la mesure figure dans le programme des conservateurs. Sturgeon a déjà prévenu qu'"ignorer les voix écossaises à Westminster serait un camouflet à la légitimité du Parlement britannique", rapporte Le Figaro.
Un deuxième référendum écossais délicat à organiser
Paradoxalement, la question de l'indépendance écossaise est au point mort ou presque. Après l'éclatante victoire de jeudi, plusieurs responsables du SNP ont réclamé la tenue d'un nouveau référendum. Mais Nicola Sturgeon s'est bien gardée de leur emboîter le pas. Car si le SNP bénéficie d'un soutien impressionnant chez les Ecossais, son succès n'est pas entièrement dû à la question nationaliste. Le SNP se démarque par sa politique sociale volontariste, son rejet des armes nucléaires, ses sensibilités écologistes… Rien ne dit que si un nouveau référendum sur l'indépendance écossaise était organisé demain, le oui l'emporterait.
D'autant que Sturgeon est piégée, comme l'explique le Guardian (en anglais). Très populaire et charismatique, elle a acquis une aura qui dépasse le jeu politique écossais. Un 'non' à l'indépendance entraînerait sa chute. Comme son prédécesseur (Alex Salmond) l'a fait après l'échec de septembre 2014, Nicola Sturgeon serait contrainte de quitter le poste de Première ministre et celui de cheffe de parti.
Le casus belli du référendum sur l'Union européenne
C'est une promesse ancienne de David Cameron : en cas de réélection, il organisera un référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. En cas de "Brexit" (Britsih exit), le SNP a déjà prévenu qu'il organiserait alors un référendum sur l'indépendance de l'Ecosse. Pro-européens, les indépendantistes refuseraient de se voir imposer la sortie de l'UE par les Anglais. Une marche forcée vers un deuxième référendum sur l'Ecosse s'organiserait donc. Comme si les sujets de tensions entre Edimbourg et Londres manquaient...
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