Centrafrique : "C'est un pays sous emprise de la Russie", témoigne un journaliste lanceur d'alerte

Cette enquête sur les opérations d'influence russe en Afrique a été menée par un réseau international de journalistes d'investigation Forbidden Stories, dont Radio France fait partie.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Ephrem Yalike, journaliste centrafricain lanceur d'alerte. (VALERIE CROVA / FRANCEINFO)

La Centrafrique est "un pays sous emprise de la Russie", témoigne Ephrem Yalike, un journaliste centrafricain lanceur d'alerte, dans une enquête sur les opérations d'influence russe en Afrique du réseau international de journalistes d’investigation Forbidden Stories, dont fait partie Radio France. La mission de ce consortium de journalistes et de médias est de poursuivre le travail de reporters réduits au silence.

Ephrem Yalike a dû quitter son pays après avoir été menacé de mort par les hommes du groupe Wagner, l'organisation paramilitaire créée par Evguéni Prigojine, l'oligarque russe tué en août 2023 dans un accident d’avion. "En France, je me sens en sécurité, mais je ne sais pas ce qui peut advenir et ils sont capables d'utiliser tous les moyens pour m'atteindre", explique le journaliste qui accepte de témoigner pour la première fois.

Fin 2019, il est approché par un homme russe, accompagné d'un traducteur francophone, qui lui commande des articles en faveur de l'armée centrafricaine et de ses nouveaux partenaires russes. "Il me donne une thématique et moi, je suis censé rédiger cet article positivement" et le publier dans les médias, raconte Ephrem Yalike. "Il me demande aussi de contacter certains leaders favorables aux actions des Russes en Centrafrique pour une manifestation devant le siège de la Minusca" (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique), poursuit-il.

Des personnalités payées pour dire du bien

Ephrem Yalike était aussi chargé de trouver des personnalités payées pour dire du bien des mesures prises par les autorités centrafricaines sur la radio Lengo Songo, créée par les Russes en 2018.

Dans une conversation qu'il a enregistrée, un homme lui demande : "Nous attendons de ta part cette petite liste de cinq personnes qui pourraient exprimer leur opinion positive au sujet des deux décrets d'avant-hier."

"Si aujourd'hui j'ai décidé de dénoncer, il en va de ma dignité", souligne Ephrem Yalike. "La présence russe en Centrafrique n'est pas une présence pour aider", ajoute-t-il.

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