Législatives en Russie: l'économie en berne fait redouter une abstention record
Vladimir Poutine avait parié sur la fin du pic de la crise en décembre 2015, mais la dévalutation du rouble, qui a perdu près de la moitié de sa valeur face aux devises occidentales, s'est poursuivie. Faute de budget pour indexer les pensions sur l'inflation, le gouvernement a annoncé, peu avant le vote du 18 septembre, qu’il verserait une prime aux retraités. Car ces derniers représentent la part la plus active de l'électorat. Les fonctionnaires doivent eux aussi se serrer la ceinture.
Depuis fin 2014, le pays est plongé dans une grave crise monétaire, suivie de la plus longue récession (de 3,7% en 2015) depuis l'arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir en 1999. Les sanctions économiques imposées à la Russie par les Occidentaux à la suite de la crise ukrainienne n’ont joué qu’un rôle marginal dans les difficultés économiques du pays. La chute de la rente pétrolière et gazière et le ralentissement de la croissance en Chine ont frappé de plein fouet une économie peu diversifiée.
Baisse des revenus de 10%
Tous les progrès économiques accomplis pendant une décennie ont été gommés par cette crise, relèvent les experts de la Haute Ecole d'Economie de Moscou. Le taux de pauvreté ou les ventes de voitures sont revenus à leurs plus bas niveaux depuis dix ans, constatent-ils. D’après un institut proche du pouvoir, le nombre de familles pauvres a doublé en 2015 passant de 22 à 39%, dont 14% ont des revenus inférieurs au minimum vital. La tendance s’est aggravée en 2016.
Les réserves accumulées en période faste ont jusqu'ici permis de financer le déficit, mais diminuent drastiquement. Les nouveaux députés devront donc voter des budgets très austères, assortis de hausses d'impôts et d’un relèvement de l'âge de la retraite, en attendant d'éventuelles réformes plus radicales. «Pour la première fois depuis 15 ans, les élections se tiennent dans un contexte de baisse des revenus réels des ménages», constate la politologue Ekaterina Schulmann, de l'Académie russe d'Economie nationale et d'Administration publique. Une baisse de 10%, selon l'Iris.
Risque d'abstention élevée
«Pour l'instant, cela n'a pas eu de conséquence politique sérieuse (...) mais on peut observer des signes de mécontentement dans l'évolution des cotes de popularité du parti au pouvoir et du gouvernement, mais pas dans celle du président», poursuit-elle. Pour cette experte, faute de «réel choix» électoral et de sentiment que le vote compte, l'abstention devrait être importante.
Seulement 9% des Russes déclarent suivre la campagne électorale, 43% disent l’ignorer complètement, selon l’institut de sondages et centre d‘études Levada, cité par Euronews. La baisse de participation prévue s'explique, selon le directeur du Centre d‘étude de l’opinion publique (WCIOM ), Valeri Fiodorov, interrogé par Euronews, notamment par le fait que «la campagne n'a duré que deux-trois semaines, alors qu'avant elle était plus longue durant un mois et demi-deux mois».
Changement de calendrier électoral
Le président russe a, en effet, promulgué une loi, en juillet, avançant ces législatives au troisième dimanche de septembre, soit deux mois et demi avant la date initialement prévue en décembre. Le parti Russie unie de Vladimir Poutine est donné vainqueur avec de 31 à 44% des intentions de vote. Le Parti communiste, crédité de 17% dans les sondages, le Parti libéral-démocrate de Vladimir Jirinovski et Russie juste se disputent la deuxième place.
Contrairement aux législatives de septembre 2011, dénoncées comme frauduleuses par les manifestants pendant de nombreuses semaines, ces élections ne devraient pas être précédées de manifestations. Vladimir Poutine a montré des signes d'ouverture, en nommant notamment Ella Pamfilova, une personnalité respectée y compris chez les adversaires de Poutine, à la tête de la Commission électorale centrale.
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