Transport maritime : la réduction de la vitesse "a un effet", mais il faut "une unité des armateurs"
Emmanuel Macron a proposé de baisser la vitesse des cargos et porte-conteneurs pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. "Ce n'est pas une solution pérenne", selon une journaliste d'un site spécialisé, invitée sur franceinfo.
Baisser la vitesse des pétroliers, des cargos, des porte-conteneurs sur les mers, doit permettre de réduire les émissions de gaz à effet de serre. C'est l'une des propositions faites dimanche 25 août lors du sommet du G7 à Biarritz. En avril dernier, la France avait déjà proposé cette mesure à l'Organisation maritime internationale (OMI).
La réduction de la vitesse des navires "a un effet" sur les émissions de gaz à effet de serre, mais "n'est pas spectaculaire" et "ce n'est pas une solution pérenne", a expliqué lundi 26 août sur franceinfo Caroline Britz, journaliste à meretmarine.com, un site spécialisé dans l’actualité maritime. Selon elle, il faut "une unité au sein des armateurs" de la planète "pour faire des règlements qui s'appliquent à l'ensemble du monde maritime".
franceinfo : Que changerait la réduction de la vitesse de ces super cargos ?
Caroline Britz : Pour l'instant, pour pouvoir mettre en place cette réglementation, il faut un accord de l'ensemble des pays membres de l'OMI. C'est très long. Cela voudrait dire que des bateaux qui fonctionnent actuellement à une vitesse de 15, 16 nœuds, principalement des bateaux qui transportent du vrac, pourraient baisser leur vitesse de un ou deux nœuds. Ça rajouterait entre cinq et dix jours à un voyage au long cours. Ça pourrait donc se faire progressivement. Cela a déjà été mis en place par les armateurs eux-mêmes, quand le pétrole est devenu brutalement très cher il y a quelques années. On a mis en place ce qu'on appelle le "slow steaming", c'est-à-dire la réduction de la vitesse pour moins consommer. Ça a rajouté quelques jours sur le transport, ce qui n'était pas forcément très critique.
Est-ce que baisser la vitesse de un ou deux nœuds a déjà un effet sensible sur les émissions de gaz à effet de serre ?
Cela a un effet. Ce n'est pas spectaculaire mais ça permet de rentrer dans le calendrier progressif de l'OMI qui a mis en place des objectifs de baisse du CO2. Cette solution permet progressivement de les atteindre mais ce n'est pas une solution pérenne. C'est plutôt une solution de transition qui va permettre d'atteindre une nouvelle technologie dans quelques années ou une nouvelle façon de voir le transport.
Qu'est-ce qui bloque très concrètement ? Est-ce que ce sont des pays qui utilisent énormément le trafic maritime et qui ne veulent pas perdre ces quelques jours précieux ?
Ce qui bloque, c'est qu'il n'y a pas une unité au sein des armateurs eux-mêmes. Les Français, qui ont été un peu précurseurs, ont mis beaucoup de temps à essayer de convaincre les autres grandes nations maritimes. Ils ont réussi à en convaincre quelques-unes, la Grèce ou le Japon, qui sont des grandes nations.
Le milieu maritime est très atomisé. Il y a énormément de pavillons, des petits pays qui ont des pavillons qu'on appelle parfois de complaisance. Ces gens-là ne veulent pas risquer de se mettre à dos un certain nombre de compagnies maritimes qui ne sont pas prêtes à faire cet effort. Ce qui risque de ralentir ce processus, c'est la recherche de l'unanimité qui est nécessaire à l'OMI mais qui est en cours.
Rodolphe Saadé, PDG de l'armateur français CMA CGM, assure qu'il renonce à faire passer ces bateaux par l'Arctique. Il a appelé sur franceinfo ses concurrents à en faire de même pour relier la Chine à l'Europe. Peut-on avoir une sorte d'Internationale de la protection de la planète ?
C'est un signal positif qui vient de CMA CGM. C'est vrai qu'on voit une prise de conscience. Les images assez spectaculaires, qu'on voit actuellement sur le réchauffement climatique, ont un impact sur l'opinion publique. Cela a aussi forcément un impact sur les acteurs du monde maritime. Maintenant, encore une fois, le vœu de certains acteurs même majeurs du transport maritime peut parfois se heurter à cette nécessité d'unanimité pour faire des règlements qui s'appliquent à l'ensemble du monde maritime.
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