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Sous le cessez-le-feu, la guerre fait rage entre Assad, la rébellion et Daech

Malgré un cessez-le-feu très relatif, selon les régions et les forces en présence, le «cauchemar», comme l’appelle Ban Ki-moon, se perpétue en Syrie. Alors que le régime poursuit son assaut contre la rébellion à Daraya, aux portes de Damas, et en pleine offensive contre Raqqa, fief de l’Etat islamique, Daech revendique une série d’attentats qui ont fait un carnage en pays alaouite.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
La gare routière de Jablé sur la côte syrienne, entre Tartous et Lattaquié après la série d'attentats revendiquée par Daech, le 23 mai 2016. (STRINGER/AFP)

Défiant les forces armées, les services de renseignements et autres milices loyalistes ou alliées du régime de Bachar al-Assad, ainsi que la présence de Moscou sur le littoral syrien, l’Etat Islamique a revendiqué une série d’attentats qui ont provoqué un véritable carnage en plein fief de la communauté alaouite.

Pour la première fois des morts et des corps démembrés à Tartous 
Cinq attentats suicides et deux voitures piégées ont fait, lundi 23 mai 2016, près de 150 morts et des dizaines de blessés, pour la plupart des civils, dans les deux villes côtières de Tartous et Jablé. Deux agglomérations qui abritent respectivement la base maritime et l’aéroport militaire du contingent russe venu prêter main-forte au régime.
 
«C’est la première fois qu’on entend des explosions à Tartous et qu’on voit des morts et des corps démembrés», a témoigné à l’AFP un employé de banque qui s’est rendu sur les lieux.
 
«C’est la première fois que Tartous est rattrapée par la guerre, racontait un autre. J’ai vu de ma fenêtre des gens courir, terrorisés, les magasins ont fermé et la ville est entièrement paralysée.»
 
L’Etat Islamique a revendiqué, via son Agence Amaq, des attaques menées par ses combattants contre «des rassemblements d'alaouites (communauté religieuse de Bachar al-Assad) dans les villes de Tartous et de Jablé».

Des coups d'éclats du Califat soumis à de fortes pressions 
Des coups d’éclats du Califat qui interviennent au moment où ses combattants sont soumis à de fortes pressions tant en Syrie qu’en Irak.
 
Outre la bataille de Falloujah, lancée par l’armée irakienne pour reprendre ce fief aux djihadistes, une offensive de la coalition emmenée par les Etats-Unis est en cours contre la ville de Raqqa tenue par Daech en Syrie.
 
Elle avait été précédée d’un largage de tracts par avion le 20 mai, «s’adressant pour la première fois aux résidents pour leur demander de partir», selon un fondateur du groupe «Raqqa est massacrée en silence».
 
Sur leur site, les membres de ce groupe, résistant à la mainmise de Daech, ont rapporté des raids aériens à la périphérie de la ville et l’interdiction faite aux habitants d’emporter leurs affaires en partant.
 
Une manière pour l’organisation djihadiste d’affirmer sa présence sur le terrain en dépit des informations les donnant en recul. Une réalité confirmée sur France Info par Jean Pierre Filiu, universitaire spécialiste des mouvements islamistes.

«Le recul de Daech, une illusion d'optique» selon Jean Pierre Filliu 
«La coalition anti-Daech veut justifier un an et demi de bombardements en disant que Daech reculerait, mais ce n’est qu’une illusion d’optique, et dans cette bataille où tous les coups sont permis, Daech a de très loin l’initiative», a-t-il indiqué, en comparaison à al-Qaïda plutôt sur la touche.
 
Des propos qui n’excluent pas que l’organisation de l’Etat islamique soit mise en difficulté malgré tout. Ce qui expliquerait les multiples attentats meurtriers de ces derniers jours en Irak, le long de la côte syrienne, mais aussi au Yémen où la double explosion d’un Kamikaze et d’une bombe a fait 41 morts dans les rangs de jeunes recrues de l’armée à Aden.

Par ailleurs, si l’organisation de l’Etat islamique est exclue officiellement du très relatif cessez-le-feu, cela n’empêche par le régime syrien de poursuivre son offensive contre la rébellion à Daraya, à la périphérie de Damas.
 
Assiégée depuis fin 2012 pour avoir été à la pointe de la contestation anti-Bachar, la population de cette ville, ou ce qu'il en reste (environ 8000 personnes), est toujours soumise aux bombardements et à la famine.
 
L’ONU n’a toujours pas réussi à y faire entrer l’aide alimentaire, médicale et scolaire tant attendue. Et une trentaine de groupes de l’opposition exigent désormais des parrains russe et américain du cessez-le-feu de faire stopper l’offensive, sous peine de faire voler en éclat le fragile accord qui prévalait jusque là.
 

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