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Un ex-détenu syrien sonne l’alarme sur 150000 disparus aux mains du régime Assad

A l’occasion de l’opération annuelle «10 jours pour signer» en faveur des droits humains dans le monde, Amnesty International revient sur la question des disparitions forcées en Syrie. Hussein Ghrer, ancien disparu et réfugié en Europe, a lancé un appel pour les 150.000 disparus dans les oubliettes du régime. «Pas de paix sans justice», dit-il, et «pas de justice sans leur remise en liberté».
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Hussein Ghrer, membre du Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression, avec Geneviève Garrigos, présidente d'Amnesty France, lors du lancement de l'opération «10 jours pour signer» en faveur des droits de l'Homme, le 4 décembre 2015 à Paris. (Alain Chémali)

Les bombardements américains, français, russes et désormais britanniques contre Daech, devenu «objectif prioritaire en Syrie», ont largement occulté un problème remis en lumière par Amnesty International.
 
Les Syriens disparus dans les prisons du régime, une priorité
L’organisation de défense des droits de l’Homme a invité cette année le blogueur syrien, Hussein Ghrer, au lancement de l’opération «10 jours pour signer» afin d'évoquer une autre priorité, celle des disparitions forcées.
 
Membre du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression à Damas et formateur de journalistes citoyens pour la BBC World service, Hussein avait «disparu» lui-même une première fois en 2011 en raison de son activité de collecte d’informations sur les violations graves et systématiques des droits des Syriens.
 
Arrêté une seconde fois par les services de renseignements du régime en février 2012 avec une quinzaine de personnes du Centre syrien des médias, il passera neuf mois au secret, puis deux ans et demi à la prison d’Adra dans la banlieue de Damas, avec le lot de tortures et maltraitances que cela comporte.
 
«Personne ne sait si on est vivant ou mort»
Relâché en juillet 2015 et réfugié avec sa femme et ses deux enfants de 7 et 5 ans en Europe, il n’en poursuit pas moins un objectif très clair. «Pas de paix sans justice, dit-il, et pas de justice sans la libération des 150.000 disparus en Syrie.»
 
«Disparaître en Syrie signifie que personne ne sait si on est vivant ou mort», précise-t-il, pour rappeler la souffrance de deux millions de personnes supplémentaires, parents, proches et amis de ces disparus, qui sont sans nouvelles et qui vivent dans la terreur.
 
Inversant la logique en cours pour trouver une solution au conflit syrien, il estime que «les bombardements doivent cesser si nous voulons instaurer la justice. Les bombardements de tous, qui ne font que tuer la population.»
 
Ne pas se laisser piéger par la peur qui sert la dictature et le terrorisme
Pour lui, la mission d’Amnesty International et de chaque citoyen dans le monde est de rester uni face aux ennemis communs que sont les dictatures et le terrorisme. «J’ai été très ému par les attentats et les morts de Paris, tient-il à dire, mais nous, c’est tous les jours que nous souffrons du régime d’Assad, de Daech et des tortures en prison.»
 
En connaissance de cause, il recommande aux Français de «ne pas se laisser piéger par la peur. Nous avions peur d’Assad, explique-il, c’est ce qui lui permettait de nous contrôler.»
 
A ceux qui pensent aujourd’hui que le système Assad est plus acceptable que celui de Daech, il rappelle que Bachar al-Assad avait libéré, en 2011, quelque 600 militants islamistes radicaux en même temps qu’il emprisonnait les contestataires pacifistes et laïques. Il en tire même une formule quasi-mathématique: «Tant que le régime d’Assad existera, Daech existera.»
 
«Personne en Syrie ne veut de Daech, ajoute-t-il, les gens sont musulmans mais ils ne veulent pas de ce système. Nous voulons vivre, et c’est parce que nous voulions vivre que nous avions déclenché la révolution.»
 

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