Le Conseil constitutionnel censure les "mesures de sûreté" pour les terroristes sortant de prison
Pour la majorité LREM, ce texte devait protéger les Français contre le "risque terroriste", alors qu'environ 150 détenus de ce type doivent sortir de prison d'ici fin 2023.
Un camouflet pour la majorité et l'exécutif. S'il juge qu'imposer des "mesures de sûreté" pour les détenus terroristes sortant de prison est possible, le Conseil constitutionnel a censuré, vendredi 7 août, l'essentiel des dispositions voulues par le législateur, car elles "portent atteinte" à plusieurs libertés fondamentales.
Adoptée fin juillet, cette proposition de loi controversée devait permettre à l'autorité judiciaire d'imposer aux personnes condamnées à au moins cinq ans de prison pour des infractions en lien avec des faits de terrorisme, et jugées "particulièrement dangereuses", une série de mesures. Celles-ci allaient de l'interdiction de paraître dans certains lieux ou de rencontrer certaines personnes, au port d'un bracelet électronique, en passant par l'obligation de pointer régulièrement auprès des forces de l'ordre ou d'établir sa résidence en un lieu déterminé.
Des obligations et interdictions liberticides
Saisi avant la promulgation du texte, le Conseil constitutionnel estime dans sa décision que cette loi "permet d'imposer diverses obligations ou interdictions (...) qui portent atteinte à la liberté d'aller et de venir, au droit au respect de la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale". L'institution pointe également d'autres problèmes. Si le texte permet de prendre des mesures de sûreté après la peine d'un détenu, "il n'est pas exigé que la personne ait pu, pendant l'exécution de cette peine, bénéficier de mesures de nature à favoriser sa réinsertion".
Autre irrégularité, selon le Conseil constitutionnel : ces mesures peuvent être renouvelées "sans qu'il soit exigé que la dangerosité de la personne soit corroborée par des éléments nouveaux ou complémentaires".
Eric Dupond-Moretti désavoué
Pour la majorité LREM, le texte permettait de protéger les Français contre le "risque terroriste", alors qu'environ 150 détenus de ce type doivent sortir de prison d'ici fin 2023. Mais plusieurs avocats et juristes redoutaient la création d'"une peine après la peine", remettant en cause les principes de l'Etat de droit.
Les Sages désavouent ainsi le nouveau ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti. Nombre d'observateurs estimaient que le texte allait à rebours des convictions de l'ancien avocat, mais face aux parlementaires, l'intéressé avait défendu "une solution d'équilibre" et avait assuré ne pas avoir été pris "soudainement d'une aveuglante folie liberticide".
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