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Toujours au stade de la recherche, le «riz doré» n'a pas fait ses preuves

L’histoire du riz doré a presque trente ans. Imaginé en 1984 pour lutter contre les carences en vitamines A, qui provoquent de graves lésions de la cornée dans les pays émergents, ce riz transgénique est présenté par ses partisans comme une «méthode révolutionnaire». Mais pour Greenpeace, le riz doré pourrait contaminer le riz naturel et généraliser les OGM dans les pays en développement.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Imaginé en 1984, ce riz transgénique devait être commercialisé en 2014. (INTERNATIONAL RICE RESEARCH INST / IRRI / AFP)

Contrairement au riz naturel, garanti sans OGM, le riz doré est enrichi en vitamine A. La carence de cette vitamine est connue pour être une cause de cécité, mais aussi pour exacerber la vulnérabilité aux infections comme le sida, la rougeole et différentes maladies infantiles, comme l'explique le site Science et pseudo-sciences.

Le processus d'obtention de ce riz transgénique, qui devait être commercialisé en 2014, est détaillé dans un article de la revue américaine Science, publié le 14 janvier 2000. Greenpeace estime alors que donner le feu vert au riz doré revient à prendre le risque que les biotechnologies végétales soient reconnues comme un outil potentiellement utile dans la lutte contre certaines maladies. 

Opération de communication des pro-OGM?
Dans une lettre ouverte parue en juin 2016, une centaine de prix Nobel, dont quatre Nobel de médecine français, ont appelé les gouvernements du monde entier «à désavouer la campagne de Greenpeace» contre le riz doré et à faire «tout ce qui est en leur pouvoir» pour «accélérer l'accès des agriculteurs à tous les outils de la biologie moderne».

Dans leur message, également adressé à l'ONU, ils assurent que «toutes les agences scientifiques et réglementaires dans le monde ont établi de manière répétée et cohérente que les cultures et les aliments améliorés grâce aux biotechnologies sont aussi sûrs, sinon plus, que ceux provenant de toute autre méthode de production»

Les lauréats ont donné une conférence de presse à Washington, une semaine avant un vote important sur l'étiquetage des produits OGM aux Etats-Unis. Ils vantent alors les «qualités» du riz doré qui a, selon eux, «le potentiel de réduire ou d'éliminer la plupart des décès et maladies» causés par une carence en vitamine A dont souffrent 250 millions de personnes dans le monde et notamment 40% d'enfants de moins de cinq ans dans les pays en développement. «L'opposition basée sur l'émotion et le dogme et contredite par les faits doit être stoppée», concluent-ils.

Le riz doré, «cheval de Troie du lobby pro-OGM»
«Le riz doré est un cheval de Troie du lobby pro-OGM qui espère, grâce à celui-ci, ouvrir la voie vers une autorisation globale des plantes génétiquement modifiées», rétorque Greenpeace. «On nous attaque dans le monde entier parce que nous travaillons de concert avec des agriculteurs et des communautés sur la menace constituée que font peser sur eux les OGM», a réagi Charlie Cray, chercheur membre de l'ONG.

Le Monde s'est intéressé le 16 juillet 2016 à la lettre ouverte des Nobel qui a fait couler beaucoup d'encre dans les médias. Le journal souligne que «l’outrance du message qu’elle véhicule est proportionnelle au prestige de ses signataires». «En dépit de ce que ces lauréats du prix Nobel ont été amenés à penser, le riz doré n’est pas, et n’a jamais été, bloqué par l’opposition publique ou par Greenpeace», explique au quotidien l’anthropologue Glen Stone, professeure à l’université Washington de Saint-Louis (Etats-Unis). 

L'efficacité du riz doré n'a «pas été prouvée»
Le 8 août 2013, un groupe d’activistes anti-OGM, dirigé par deux militants radicaux d’extrême-gauche aux Philippines, avait saccagé l’une des cinq parcelles expérimentales de ce riz génétiquement modifié dans le cadre de recherches menées par l'Institut international de recherche sur le riz (IRRI) dans l'archipel. Cette attaque «s’est produite après l’achèvement de l’essai et n’a concerné qu’une petite parcelle de test, parmi des dizaines», précise Mme Stone.

Quoi qu'il en soit, l'efficacité du riz doré pour combattre la carence en vitamine A «n'a pas été prouvée» de l'aveu même de son concepteur, l'IRRI, souligne Greenpeace«Les sociétés font le forcing sur le riz doré pour ouvrir la voie à une approbation globale d'autres cultures génétiquement modifiées plus rentables», ajoute l'organisation écologiste pour qui la «seule solution garantie» pour régler le problème de la malnutrition est «une alimentation saine diversifiée».

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