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Inculpation de Donald Trump : "La base des électeurs républicains est toujours avec lui et le suit dans son récit de persécution", estime un spécialiste

Ce nouvel événement judiciaire pour l'ancien président des États-Unis pourrait même l'aider à reconquérir la Maison Blanche en 2024, selon Corentin Sellin, professeur agrégé d’histoire.
Article rédigé par franceinfo
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  (YUKI IWAMURA / AFP)

"La base des électeurs républicains est toujours avec Donald Trump et le suit dans son récit de persécution", a estimé sur franceinfo Corentin Sellin, professeur agrégé d’histoire et spécialiste de celle des États-Unis, mercredi 14 juin. Donald Trump a été inculpé mardi pour sa gestion négligente de secrets d'État après son départ de la Maison Blanche. Une inculpation que l'ancien président des États-Unis a qualifiée "d'abus de pouvoir odieux".

Si le républicain est accusé d'avoir mis la sécurité de son pays en péril en conservant des documents confidentiels et en refusant de les restituer, "il fait de cet événement pourtant négatif un événement de campagne", a jugé Corentin Sellin. Selon lui, l'ex-président septuagénaire "a peut-être intérêt, politiquement, à faire durer cette affaire".

franceinfo : Donald Trump dénonce un procès politique, une chasse aux sorcières. Est-ce que le parti le suit dans cette voie ?

Corentin Sellin : Il a fait lui-même de cet événement, pourtant négatif, un événement de campagne puisqu'il s'est rendu après l'annonce de son inculpation hier soir dans un restaurant cubain très fameux pour essayer de séduire la population cubaine de Miami, de Floride. On voit bien que pour lui, ça colle parfaitement dans son récit de campagne. Il est de toute façon en guerre contre "l'État profond", c'est-à-dire contre l'État fédéral qui l'accuse de le persécuter et qu'il veut reconquérir au terme "d'une guerre à mort" comme il le dit lui-même. Ce récit de la persécution s'inscrit parfaitement dans sa nouvelle campagne. Et le camp républicain, face à ça, est très ennuyé. La base est toujours avec Trump et le suit dans ce récit de persécution. Les électeurs républicains sont en grande majorité avec lui. Et on voit bien que, à de très rares exceptions, ceux qui essayent de faire une sorte de droit d'inventaire, comme son ancien vice-président Mike Pence ou son ancienne ambassadrice à l'ONU Nikki Haley, rentrent vite dans le rang. Mike Pence, cette nuit, a dit que c'étaient des charges très graves, mais qu'il fallait attendre le procès et qu'il ne se sentait pas en position de le condamner.

Un des arguments soulevés par les supporters de Trump, c'est qu'on a aussi retrouvé chez Joe Biden des documents classés secret défense. Peut-on y voir un traitement de défaveur appliqué à Donald Trump ?

C'est une question que l'on peut se poser et qui explique aussi la très grande discrétion de Joe Biden et de la Maison Blanche. Mais il y a une différence de taille : dans le cas de Joe Biden et même de Mike Pence, l'ex-vice-président de Trump chez qui on a aussi retrouvé des documents, ce sont eux-mêmes qui ont signalé l'oubli de remise des documents et qui, une fois que les autorités compétentes se sont mises en rapport avec eux, ont rendu tout de suite les quelques documents oubliés. Là, ce qu'on reproche à Donald Trump, c'est d'avoir tout mis en œuvre pour, même quand on lui réclamait les documents manquants, ne pas les rendre. Il a donc empêché la restitution des documents aux autorités, documents qu'il n'aurait jamais dû avoir. C'est ce qui explique d'ailleurs qu'il est inculpé aussi pour des charges de conspiration, de fausses déclarations.

Est-ce que Donald Trump va plaider la négligence ?

Ce qu'il va surtout plaider, comme souvent, c'est que l'accusation repose en grande partie sur les déclarations et sur les documents d'un de ses avocats. Son principal argument sera de dire que les poursuites n'auraient jamais dû être engagées parce que cette relation avec son avocat était protégée et que donc l'accusation ne peut pas s'appuyer là-dessus. Et Donald Trump a peut-être intérêt, politiquement, à faire un peu durer cette affaire. Certes, judiciairement, il risque beaucoup, mais chez les militants républicains, plus cette affaire dure, plus il peut installer son récit de la persécution.

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