Pourquoi vous devriez vous intéresser de près au discours de Donald Trump devant le Congrès
Donald Trump s'exprime pour la première fois devant le Congrès des Etats-Unis, dans la nuit de mardi à mercredi, à Washington. Le nouveau président devra préciser son programme politique et définir les priorités de son mandat.
"Mister Speaker, the President of the United States !" C’est par cette traditionnelle formule que le 45e président des Etats-Unis, Donald Trump, sera annoncé au Capitole, à Washington, mardi 28 février, pour son premier discours devant le Congrès, à 21 heures (3 heures, heure française).
Le nouveau chef de l’Etat américain a évoqué lundi des dépenses militaires, dont des précisions devraient être apportées lors de son discours au Congrès. "Ce sera un événement majeur, un message au monde en ces temps dangereux, sur la force et la détermination de l'Amérique", a-t-il encore prévenu.
Donald Trump devrait également dévoiler ses autres priorités politiques devant les représentants et les sénateurs, dans une cérémonie très codifiée qui existe depuis 1790. Franceinfo vous explique pourquoi ce discours devra être scruté avec attention.
Parce que c'est une tradition très importante pour la démocratie américaine
L'intérêt de cette traditionnelle déclaration prend tout son sens lorsque le président vient d'être élu. En fonction depuis 39 jours, le président Donald Trump n'a jamais précisé ses priorités en matière de nouvelles lois. Il n'a avancé que de grandes pistes lors de la campagne, comme la suppression du système de santé "Obamacare", ou encore la construction d'un mur entre les Etats-Unis et le Mexique.
Tout en précisant sa méthode politique, le fantasque homme d'affaires devrait s'inscrire mardi soir dans une tradition vieille de plus de deux siècles. L'allocution est la seule fois où le président américain peut s'exprimer devant les deux chambres. Elle est prévue par l'article 2 de la Constitution, qui dispose que le président "informe périodiquement le Congrès sur l'état de l'Union et recommande à son attention toute mesure qu'il jugera nécessaire et opportune".
En 1790, George Washington est le premier président à s'exprimer devant le Congrès, réuni cette année-là à New-York, l'ancienne capitale des Etats-Unis. Parfois sous forme de texte lu ou à une date différente, la tradition est ensuite suivie sous différentes formes.
Mais depuis le discours de Jimmy Carter en 1977, le président nouvellement élu ne fait plus de déclaration sur "l'état de l'Union", comme le rappelle la radio NPR (en anglais). Depuis cette date, l'intervention est devenue à chaque début de mandat un discours de politique générale. Le nouvel élu précise les thèmes qu'il souhaite voir traités en priorité par les deux chambres législatives. Il spécifie également le contenu des lois qu'il veut proposer.
"Depuis Roosevelt en 1933, les présidents s'astreignent à faire passer leurs projets majeurs dans les 100 premiers jours", précise à franceinfo Vincent Michelot, professeur d'histoire politique des Etats-Unis à Sciences-Po Lyon.
L'enjeu pour les nouveaux présidents est de montrer leur capacité à peser dès le début de leur mandat.
Vincent Michelotà franceinfo
Sans avoir d'obligation constitutionnelle, les nouveaux présidents ont à cœur de marquer de leur signature le mandat qui s'ouvre. Donald Trump, qui est resté flou sur ses priorités jusqu'à maintenant, devrait justement annoncer les siennes mardi soir.
Parce que Donald Trump doit détailler sa politique générale
"On attend des propositions concrètes", pose Vincent Michelot. Donald Trump sera notamment attendu sur sa capacité à financer ses projets. Lui qui avait lancé de nombreuses propositions très coûteuses pendant sa campagne, comme la suppression de l'impôt sur le revenu, ou la relance économique par des investissements dans les infrastructures. Un programme qui devra faire l'objet de lois budgétaires, dont les contours sont attendus lors de son discours. "Est-il prêt à faire déraper le déficit ?" s'interroge le spécialiste des présidents américains.
Mais le Congrès n'est pas obligé de suivre les demandes du président. Ses initiatives sont indépendantes du pouvoir exécutif. Cependant, les deux chambres comptent actuellement une majorité républicaine, et rien n'indique à cette heure que les parlementaires ne suivront pas le président américain dans ses choix. Pour le moment...
Donald Trump n'arrivera jamais à appliquer son programme s'il n'obtient pas le soutien du Congrès.
Vincent Michelotà franceinfo
Sans le vote des lois par le Congrès, Donald Trump n'aura pas la possibilité d'appliquer ses grandes propositions. A l'inverse, les parlementaires devront faire avec ce président déroutant, qui signe les décrets d'application, et bénéficie d'un droit de veto. Chaque partie est donc liée.
"Le positionnement se fera dans un premier temps sur les thématiques", explique Vincent Michelot. Les annonces faites par le président lundi indiquent qu'une des priorités sera l'investissement dans le budget militaire. Selon un responsable de l'administration, il proposera une hausse de 54 milliards de dollars pour la Défense, soit une hausse d'environ 9%, qui sera compensée par une baisse équivalente des dépenses non-militaires.
Ensuite, le calendrier devrait être annoncé. Avec le vote des lois par ordre de priorité. Mais Donald Trump n'est pas un président comme les autres. "Je ne m'attends à rien d'autre que son discours inaugural du 20 janvier, où il était combatif, sans doute sous une forme plus précise", prédit le spécialiste des Etats-Unis.
Parce que "The Donald" est totalement imprévisible
C'est un président "extraordinaire", rappelle Vincent Michelot. "The Donald" (son surnom) est imprévisible. Lors de ses premiers jours à la Maison Blanche, les observateurs avaient noté plusieurs revirements dans ses positions sur la politique extérieure, comme le rappelle "L'Œil du 20 heures" dans la vidéo ci-dessous.
Qu'en sera-t-il de ses propositions en matière de politique intérieure ? "Donald Trump se nourrit du conflit, lance Vincent Michelot. C'est le mode qui lui permet de justifier la désorganisation de son administration." Le professeur s'attend donc à un discours "combatif", de "dénonciation de l'immobilisme des élites, pour répondre au peuple dont il se considère comme un messager".
Malgré des sondages d'opinion plus bas que ses prédécesseurs (38% des électeurs estiment qu'il fait du bon travail, selon une étude de l'université Quinnipiac), le président bénéficie encore largement du soutien de son électorat. "Les gens qui ont voté pour Donald Trump sont patients, ajoute Vincent Michelot. Ils jugeront son action lors des premiers bilans de son action, dans 3 ou 6 mois." Pour l'instant, ses promesses, du maintien de la couverture maladie gratuite pour les pauvres, ou l'amélioration du sentiment de sécurité dans le pays, sont toujours au stade d'annonces. "Vous en saurez plus [mardi] soir", a promis Donald Trump.
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