Primaires américaines : les super-délégués vont-ils faire gagner Hillary Clinton ?
En juillet prochain, ces cadres du parti démocrate participeront à la désignation du candidat à la Maison Blanche de leur camp. Et ils ne sont pas forcés de suivre le choix des électeurs dans les urnes lors des primaires.
Les dés sont-ils pipés dans la course à la Maison Blanche ? Avant même le début des primaires démocrates, lundi 1er février, Hillary Clinton bénéficiait déjà d'une avance considérable sur son adversaire, l'autoproclamé "socialiste" Bernie Sanders. L'ancienne secrétaire d'Etat peut en effet compter sur le soutien de nombreux "super-délégués", des cadres du parti, qui participeront en juillet à la convention chargée de désigner le candidat démocrate à la présidentielle.
Ces 712 hommes et femmes peuvent choisir de soutenir le candidat de leur choix, indépendamment du vote des électeurs dans chacun des 50 Etats durant le processus des primaires. Francetv info a interrogé quelques-uns des rares super-délégués à soutenir Bernie Sanders, pour expliquer leur rôle – essentiel – au cours du scrutin.
Qui sont ces super-délégués ?
Il existe au moins une vingtaine de façons de devenir super-délégué, listées dans la charte du parti démocrate (PDF). Le sont automatiquement les anciens présidents ou vice-présidents démocrates des Etats-Unis, ainsi que le président et le vice-président en exercice, s'ils sont démocrates. Barack Obama et Bill Clinton peuvent ainsi participer à la sélection du candidat de leur parti.
Parmi les autres super-délégués figurent aussi les élus démocrates au Sénat ou à la Chambre des représentants. Candidat aux primaires démocrates, Bernie Sanders est aussi un super-délégué en sa qualité de sénateur du Vermont. Ce n'est pas le cas de sa rivale Hillary Clinton.
S'y ajoutent d'autres cadors démocrates, ainsi que des représentants sélectionnés par les sections du parti dans chacun des Etats américains.
Pourquoi ont-ils été mis en place ?
Tout cela n'a rien d'un complot échafaudé par les partisans d'Hillary Clinton. La sélection du candidat démocrate à l'élection présidentielle par des délégués est une invention récente, explique le Washington Post (en anglais) : jusqu'en 1968, il pouvait être investi sans passer par l'épreuve des primaires.
Une réforme est mise en place et dès 1972, les délégués, chargés d'investir le candidat, sont sélectionnés par le processus des primaires et des caucus que l'on connaît aujourd'hui. Mais cette année-là, le candidat démocrate essuie une humiliante défaite face à Richard Nixon. Rebelote en 1980 face à Ronald Reagan. En 1976, le démocrate Jimmy Carter est élu, certes, mais s'entend mal avec les cadres de son parti, rappelle le Washington Post.
Un système mixte est alors mis en place, avec la création des super-délégués. Rien de problématique, à en croire les rares super-délégués qui soutiennent Bernie Sanders, interrogés par francetv info. "C'est une façon de montrer du respect aux responsables du parti, explique Chad Nodland, membre du parti démocrate du Dakota du Nord. En ce qui me concerne, ça fait très longtemps que je suis impliqué en politique. C'est un peu différent de quelqu'un qui se présente juste à une primaire et dit 'je suis démocrate'."
Ce n'est pas pas parfait, mais cela a du sens de donner un peu d'influence aux gens qui sont allés au charbon, en passant des coups de fil, en participant à des meetings, en faisant du porte-à-porte...
"Ce n'est pas surprenant, abonde Christopher Regan, lui aussi super-délégué et vice-président du parti démocrate de Virginie occidentale. Dans notre Constitution originelle, il y a une chambre des représentants élue par les citoyens et un Sénat nommé par les Etats. Il y a toujours eu des systèmes à deux niveaux comme cela."
Pourquoi préfèrent-ils Hillary Clinton ?
Le décalage entre Hillary Clinton et Bernie Sanders est impressionnant : pour l'instant, 465 super-délégués lui ont apporté leur soutien contre seulement 25 au sénateur du Vermont, selon le décompte de Bloomberg (en anglais). Le déséquilibre est tellement important que dans certains Etats, il modifie le résultat des urnes.
Dans le New Hampshire, par exemple, Bernie Sanders a largement dominé la primaire et remporté 15 délégués, contre 9 seulement pour son adversaire. Sauf que 6 des 8 super-délégués de l'Etat ont déjà apporté leur soutien à Hillary Clinton, explique NPR (en anglais), et les deux autres n'ont pas encore exprimé leur choix. Résultat : égalité, les deux candidats peuvent à l'heure actuelle revendiquer 15 délégués chacun dans cet Etat du nord-ouest des Etats-Unis.
"Hillary Clinton est en quelque sorte la candidate de l'establishment", juge Chad Nodland. "Elle a un lien beaucoup plus fort, beaucoup plus ancien avec le parti, complète Christopher Regan. Elle a été secrétaire d'Etat, son mari est un ancien président... et elle est démocrate depuis longtemps. Il faut se souvenir que Bernie Sanders est un sénateur indépendant, qui concourt aujourd'hui sous la bannière démocrate."
Mais alors, c'est plié, Hillary Clinton a déjà gagné ?
Non, car les super-délégués peuvent changer d'avis jusqu'à la convention du parti démocrate. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons décidé de ne pas les inclure dans notre tableau des résultats. Officiellement d'ailleurs, Bernie Sanders ne s'en inquiète pas plus que ça. "Si nous continuons à bien nous en sortir à travers le pays et si les super-délégués comprennent que je suis le candidat – et je pense l'être – le plus à même de battre le candidat républicain, je pense qu'ils finiront par venir à nous", explique le sénateur sur la chaîne CBS (en anglais).
Leur principal préoccupation dans la vie, c'est de s'assurer qu'un républicain ne s'installe pas à la Maison Blanche.
Mais Bernie Sanders pourrait-il remporter la majorité des voix lors des primaires et tout de même perdre l'investiture démocrate à cause des super-délégués ? "En théorie, c'est possible, mais c'est peu probable en pratique", juge Christopher Regan. "Je ne pense pas que les super-délégués puissent se permettre de ne pas être en phase avec les électeurs", abonde Chad Nodland. Tous deux pensent qu'ils finiront par se ranger derrière Bernie Sanders en cas de victoire dans les urnes.
Le Washington Post estime également qu'une telle issue ne se présentera "probablement pas". "Ils peuvent changer d'avis et ils l'ont déjà fait il y a huit ans", martèle Erin Bilbray, super-électrice du Nevada. En 2008, en effet, de nombreux super-délégués avaient affiché leur soutien à Hillary Clinton durant la campagne, avant de voter pour Barack Obama lors de la convention, explique le journal. Une pétition a tout de même été lancée sur internet, pour demander aux super-délégués de soutenir le candidat choisi par les électeurs lors des primaires : elle a recueilli 179 000 signatures jusqu'à présent.
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