Victoire de Donald Trump à l'élection américaine : le républicain est-il débarrassé de ses affaires judiciaires ?
Ses ennuis avec la justice ne l'ont pas empêché d'être de nouveau élu président des Etats-Unis. Donald Trump a remporté l'élection présidentielle américaine face à la candidate démocrate, Kamala Harris, mercredi 6 novembre. Le candidat républicain, qui était visé par 88 chefs d'accusation, n'a pas été sanctionné dans les urnes par les électeurs américains pour les multiples affaires judiciaires le visant depuis son premier mandat. Bien au contraire. "On peut se demander si ses multiples procès n'ont pas contribué à augmenter la popularité de Donald Trump, analyse pour franceinfo André Kaspi, historien spécialiste des Etats-Unis. Car il est apparu comme une sorte de victime de la volonté des démocrates d'abaisser le principal rival" de leur candidate.
Selon le spécialiste, Donald Trump se retrouve désormais à l'abri des poursuites judiciaires dont il fait l'objet car "il peut se gracier lui-même [dans les affaires fédérales].Tous ses procès vont être effacés du calendrier politique". Un ultime obstacle l'attend néanmoins le 26 novembre à New York avant son retour officiel à la Maison Blanche le 20 janvier : le prononcé de sa peine dans le seul des quatre procès au pénal que ses avocats n'ont pas réussi à retarder au-delà de 2024. Reconnu coupable le 30 mai par la justice de l'Etat de New York de "falsification comptable aggravée pour dissimuler un complot visant à pervertir l'élection de 2016", il encourt en théorie jusqu'à quatre ans de prison.
Les deux affaires fédérales "enterrées"
Cette affaire concerne le paiement de 130 000 dollars, maquillé en frais juridiques, à l'ex-star de films pornographiques Stormy Daniels, pour taire une relation sexuelle en 2006, que Donald Trump dément. "Le juge [Juan Merchan] a bien fait d'attendre pour décider de la peine. Il avait sans doute des meilleures connaissances du terrain politique que les sondeurs", ironise auprès de franceinfo Anne Deysine, professeur à l'université Paris Nanterre. Il est peu probable, selon cette spécialiste des questions politiques et juridiques aux Etats-Unis, que le magistrat opte pour de la prison ferme. Non seulement parce qu'il s'agit d'une première condamnation pénale pour Donald Trump, mais surtout parce que l'incarcération d'un président en exercice soulèverait des difficultés pratiques insurmontables. Ses avocats devraient quoiqu'il en soit solliciter un report de la condamnation, précise CNN.
Concernant les deux procédures fédérales qui le visent (dans le cadre des tentatives illicites d'inverser les résultats de l'élection en 2020, qui avaient abouti à l'assaut du Capitole, et pour les documents classifiés emportés dans sa résidence floridienne après son premier mandat), l'horizon judiciaire de Donald Trump s'était déjà spectaculairement éclairci cet été, avec la décision de la Cour suprême sur l'immunité présidentielle. Il apparaît désormais complètement dégagé, au moins pour les quatre années de son nouveau mandat. "Ces deux affaires fédérales vont être enterrées dès son arrivée au pouvoir le 20 janvier. Donald Trump va ordonner à son ministre de la Justice de limoger le procureur spécial chargé de ces dossiers et il n'y aura plus de crédits alloués pour ces enquêtes", explique Anne Deysine.
Le candidat républicain avait déclaré fin octobre vouloir, s'il était élu, "virer" Jack Smith, nommé par le ministre de la Justice de l'actuelle administration démocrate, Merrick Garland. "Je le virerai en deux secondes", a-t-il lancé lors d'une interview en réponse à la question de savoir s'il se gracierait lui-même ou ferait limoger le procureur spécial.
Pas de poursuites contre un président en exercice
Dans l'affaire des résultats de l'élection présidentielle 2020, la Cour suprême a reconnu le 1er juillet au milliardaire une large présomption d'immunité pénale, obligeant Jack Smith à présenter fin août un acte d'accusation révisé puis à batailler sur le calendrier avec les juristes défendant le républicain. Au final, la juge dans le dossier, Tanya Chutkan, a pris acte de l'impossibilité de fixer une nouvelle date proche pour la tenue d'un procès.
Dans le second dossier, en Floride, la juge Aileen Cannon a annulé la procédure le 15 juillet au motif que la nomination du procureur spécial était illégale. Elle suivait en cela l'avis des avocats de Donald Trump, qui avaient mis en lumière que le cabinet de Jack Smith était en partie financé par le département de la Justice et que sa nomination contrevenait à la législation. Cette décision fait actuellement l'objet d'un appel.
Pour Claire Finkelstein, professeure de droit à l'université de Pennsylvanie, ces procédures fédérales ne peuvent toutefois pas être annulées puisqu'elles ont été engagées avant son retour à la Maison Blanche. "En l'état actuel des choses, il ne pourrait être jugé qu'après avoir quitté le pouvoir", estime-t-elle auprès de l'AFP. "Un nouveau ministre de la Justice nommé par Donald Trump peut classer ces affaires mais elles pourraient être rouvertes dans quatre ans par un successeur nommé par les démocrates", appuie pour franceinfo Jacques Maillet, docteur en politique américaine.
Le procès en Géorgie repoussé sine die
Restent les poursuites dans l'Etat clé de Géorgie, où Donald Trump est poursuivi avec 14 autres personnes pour des faits similaires à ceux de son dossier fédéral à Washington, à savoir des tentatives d'inverser les résultats de l'élection de 2020. L'enquête a été déclenchée par un appel téléphonique en janvier 2021 du président sortant, demandant à un haut responsable de Géorgie de "trouver" les quelque 12 000 bulletins de vote à son nom qui lui manquaient pour remporter cet Etat clé.
Inculpé, Donald Trump avait été contraint de se présenter dans une prison d'Atlanta pour une prise de photo d'identité judiciaire, une première humiliante pour un ancien président américain. Mais l'avancée des poursuites a subi un gros coup de frein quand la presse a dévoilé que la procureure locale, Fani Willis, entretenait une relation intime avec un enquêteur qu'elle avait engagé, Nathan Wade. A la demande de dessaisissement déposée par les avocats de Donald Trump se sont ajoutées les conséquences de la décision favorable de la Cour suprême sur l'immunité présidentielle. Résultat : l'ouverture du procès, un temps envisagée pour le 5 août, a été repoussée sans nouvel agenda.
Entre ces délais, les recours possibles et l'âge de Donald Trump (78 ans), il est peu probable que ces procédures aboutissent, même au-delà de son second mandat, souligne Jacques Maillet. Le spécialiste rappelle une dernière inconnue dans l'équation : le "Projet 2025", qui dessinait les priorités du républicain s'il retournait à la Maison Blanche. S'il était appliqué, il pourrait "changer encore les règles du jeu avec une instrumentalisation du département de la Justice pour renforcer encore les pouvoirs du président".
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