Mort de Benoît XVI : le vice-président de la conférence des évêques de France salue un "grand théologien", "qui a traversé pratiquement un siècle d'histoire"
L'archevêque de Tours et vice-président de la conférence des évêques de France, Vincent Jordy, salue un "grand théologien", samedi 31 décembre sur franceinfo, après la mort du pape émérite Benoît XVI à l'âge de 95 ans. Il rend hommage à "l'homme qui a traversé pratiquement un siècle d'histoire" et qui restera pour lui un pape ancré dans la "culture du XXe siècle" et ses traumatismes, "le nazisme", l'après-guerre et les Trente Glorieuses. Avec sa mort, "c'est un certain type de réflexion sur le monde qui s'éloigne", résume l'archevêque Vincent Jordy.
franceinfo : Que retiendrez-vous de Benoît XVI ?
Vincent Jordy : Benoît XVI, c'est finalement l'homme du passage d'une partie de l'histoire à une autre partie de l'histoire. Il est né bien avant la Seconde Guerre mondiale, il a connu l'histoire complexe du XXe siècle. Il a vécu le nazisme, il était adolescent à cette époque. Il a connu le communisme dans une Allemagne fracturée en deux. Il avait connu les Trente Glorieuses et il a vécu l'entrée dans le XXIe siècle, avec les transformations sociétales et politiques importantes qu'on connaît depuis la chute du mur de Berlin. C'est l'homme qui a traversé pratiquement un siècle d'histoire.
Un homme du siècle passé, qui n'est plus représenté désormais au sein de l'Eglise catholique ?
Ce que j'en retiens, finalement, c'est que c'était en effet un homme de la culture du XXe siècle, quelqu'un qui connaissait des auteurs classiques, qui avait une très grande culture. Il était membre de l'Académie des sciences sociales et politiques en France, c'était aussi un homme qui aimait la musique classique, qui en jouait lui-même. Une sorte d'homme universel, ouvert à l'universalité de la culture et du savoir, une forme d'homme qu'on ne verra peut-être plus dans le futur et qui est vraiment marqué par cette époque, par cette matrice culturelle du XXe siècle. Nous sommes aujourd'hui dans un monde différent, la culture se présente différemment avec d'autres types de défis, donc avec lui, c'est un certain type de réflexion sur le monde qui s'éloigne.
Le pape François aussi est né à cette époque, en 1936, neuf ans après Benoît XVI, et pourtant ils n'ont pas la même vision du monde ?
Les traumatismes du XXe siècle, en Europe, Benoît XVI, lui, les a vécus. Cela l'a conduit à beaucoup réfléchir et à penser à partir de ces traumatismes. Il restera un grand théologien, un homme qui avait cette capacité de pondération, de recul, de réflexion, et c'est certainement ça qui lui a permis de garder sa liberté intérieure et sa lucidité intellectuelle. Il faisait preuve d'une très grande humilité, d'une grande docilité, et c'est certainement ça qui lui a permis de renoncer à la papauté en 2013, de se dire qu'il n'avait plus les moyens de conduire l'Eglise dans sa situation. Cet acte-là, sa décision de renoncer qui a surpris tout le monde, est le fruit de tout ce qu'il a été, pas seulement du pontife qu'il a été.
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