Le président vénézuélien Hugo Chavez est mort
Le vice-président du pays, Nicolas Maduro, l'a annoncé mardi soir. Agé de 58 ans, Hugo Chavez était atteint d'un cancer depuis juin 2011. Retour sur les visages d'"el Présidente", à travers quatre étapes qui résument son parcours.
Le président vénézuélien Hugo Chavez est mort. Le vice-président du pays, Nicolas Maduro, l'a annoncé mardi 5 mars lors d'une allocution télévisée. Au pouvoir depuis 1999, "El Presidente" était atteint d'un cancer, diagnostiqué en 2011. Opéré à quatre reprises depuis l'annonce de sa maladie, son état s'était dégradé ces derniers jours.
Le gouvernement a décrété "sept jours de deuil officiel". La dépouille du président est exposée à compter de mercredi dans à l'Académie militaire de Caracas, avant des funérailles nationales vendredi. Des élections doivent être organisées dans les 30 jours à venir.
Héros pour les uns, provocateur populiste pour les autres, l'homme d'Etat n’a jamais laissé indifférent. Retour sur les multiples visages d'Hugo Chavez, à travers quatre étapes qui résument son parcours.
Un révolutionnaire qui a connu la prison
S'il avait écouté sa mère, Hugo Rafael Chavez Frias, né dans une famille d’enseignants à Sabaneta, une petite ville de l’ouest du pays, serait devenu prêtre. Mais, adolescent, il se passionne pour l’histoire du Venezuela, et particulièrement pour la vie et l’œuvre de Simon Bolivar. Ce héros national, surnommé "El Libertador"("le Libérateur"), restera un modèle pour Hugo Chavez jusqu’à la fin de ses jours. En juillet 2012, il dévoile un nouveau portrait du général. "Une version ultraréaliste, en 3D, obtenue d'après l'analyse des ossements du crâne du héros national", note Slate.fr.
Après avoir intégré l’armée à 17 ans, Hugo Chavez poursuit sa formation à l’Académie vénézuélienne des sciences militaires. C’est là qu’il développe, avec d'autres cadets, une doctrine de gauche nationaliste, dans la lignée du bolivarisme. Son idéologie est inspirée des idéaux progressistes de Simon Bolivar (justice sociale, indépendance, solidarité latino-américaine…), mais aussi de la pensée des socialistes et communistes sud-américains, comme Fidel Castro, le leader panaméen Omar Torrijos ou encore le révolutionnaire Che Guevara.
En 1992, son mouvement tente de renverser le président Carlos Andrés Pérez. Le putsch échoue, Hugo Chavez finit en prison. Il est libéré en 1994, gracié par le président Rafael Caldera.
Un président démocratiquement élu et réélu
Sorti de prison, Hugo Chavez opte pour la voie démocratique et fonde un parti politique socialiste, le Mouvement Cinquième République. En 1998, il remporte l’élection présidentielle, et fait adopter l'année suivante une Constitution bolivarienne. Réélu en 2000 et 2006, il apprend à séduire les masses : il faut être proche des gens, incarner de façon très personnelle le pouvoir. Très vite, il met les médias au service du culte de sa personne.Le charismatique Hugo Chavez devient lui-même animateur de télévision dans le show dominical "Alo, Presidente".
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Ses adversaires évoquent rapidement une dérive autoritaire. On le surnomme "Hugo Boss". L’ex-putschiste devient à son tour la victime d’une tentative de coup d’Etat en 2002, racontée dans le documentaire La Révolution ne sera pas télévisée. Destitué et emprisonné par des opposants au régime et des membres de l’armée, il est libéré quelques jours plus tard.
Hugo Chavez essuie son seul échec lors d’une consultation du peuple en 2007, quand les Vénézuéliens rejettent une réforme constitutionnelle supprimant la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux par personne. Cette limitation est abrogée lors d'un autre référendum deux ans plus tard, ce qui permet au président d'être réélu en octobre 2012. "Merci à mon Peuple aimé ! Vive le Venezuela ! Vive Bolivar !", remercie Hugo Chavez sur Twitter.
Gracias a mi amado Pueblo!!! Viva Venezuela!!!! Viva Bolívar!!!!!
— Hugo Chávez Frías (@chavezcandanga) Octobre 8, 2012
Un socialiste accro aux pétrodollars
Ses réélections, il les doit largement au soutien des plus défavorisés. Après le coup d’Etat avorté de 2002, Hugo Chavez inaugure une série de programmes sociaux, les "missions" (lien en espagnol), pour renforcer sa popularité. Il crée des dispensaires pour les pauvres avec des médecins cubains. Il se donne pour objectif d'éradiquer l'analphabétisme et de faciliter l’accès à l’université. Il entame une redistribution des revenus pour offrir un toit et de la nourriture aux plus démunis. Tout cela en s’appuyant sur ses pétrodollars. Le pays est en effet devenu le premier producteur mondial de pétrole et, comme le notait l'an dernier le blog Regards latinos du Figaro, il "n’a jamais été aussi dépendant du pétrole, dont la part dans les exportations est passé de 80 à 95%".
Le succès de ces missions devient l’un des piliers de la popularité du président. Pourtant, derrière cette vitrine socialiste se cachent plusieurs échecs. La répartition des richesses n'a pas connu de modification profonde. Le pays sombre dans l'insécurité et l’inflation, comme le relate Le Monde. La réputation du héros de l'anti-impérialisme, qui a entamé une vague de nationalisations dès 2009, est entachée par des accusations de népotisme, explique The New York Times (en anglais).
Un populiste obsédé par l'hégémonie américaine
Qu’il qualifie George Bush d'âne, chasse des ambassadeurs "yankees" de Caracas ou mette en doute la version officielle des attentats du 11-Septembre, on se souviendra d'Hugo Chavez comme de l'un des principaux contestataires de la puissance américaine.
Il pousse même la détestation jusqu’à affirmer que les "Américains [lui] ont inoculé le cancer" . Hugo Chavez se pose comme le promoteur d’un nouvel ordre mondial multipolaire. Sur le plan économique, cela se traduit par une coopération étroite avec Cuba, par des accords de libre-échange avec d’autres Etats d’Amérique latine et enfin par un rapprochement avec la Chine et la Russie, comme l'explique Le Figaro.
Hugo Chavez n'a jamais hésité à soutenir les opposants idéologiques aux Etats-Unis. En 2009, il salue ainsi la réélection de Mahmoud Ahmadinejad, son "frère", à la présidence de l'Iran. Il apporte son soutien au Libyen Mouammar Kadhafi ou au Syrien Bachar Al-Assad. Cependant, Hugo Chavez savait faire preuve de pragmatisme, n'ayant jamais suspendu ses livraisons de pétrole aux Etats-Unis.
L'héritage de cette personnalité devenue iconique risque d'être lourd à porter pour son successeur.
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