Policiers en colère cherchent nouveau ministre
Trois journées de protestation sont organisées jusqu'à vendredi. Dans l'attente de la nomination par François Hollande d'un ministre de l'Intérieur, les policiers expriment leur ras-le-bol et leurs espoirs dans la rue.
Pas encore nommé, mais déjà interpellé : le prochain ministre de l'Intérieur ne connaîtra pas d'état de grâce. Divers mouvements et syndicats policiers appellent jusqu'à vendredi 11 mai à trois journées distinctes de mobilisation, afin de redire leur mal-être après l'affaire de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) et la mise en examen de l'un des leurs. Dix ans après l'arrivée de Nicolas Sarkozy place Beauvau, le retour au pouvoir de la gauche pansera-t-il le blues des hommes en bleu ?
• Noisy-le-Sec, le déclencheur
Les rassemblements se multiplient depuis le 25 avril et la mise en examen polémique d'un policier pour "homicide volontaire". Le fonctionnaire, qui a abattu un homme en fuite à Noisy-le-Sec, plaide la légitime défense et bénéficie, malgré des témoignages contraires à sa version des faits, du soutien de nombreux collègues. Des manifestations spontanées ont eu lieu dès le premier soir à Paris, toutes sirènes hurlantes, puis à Marseille, Nice, Lyon, Bordeaux, Pau et en région parisienne. Deux cents à trois cents policiers ont encore manifesté le 4 mai à Paris.
Trois nouvelles journées d'action sont prévues mercredi, jeudi (tract en PDF) et vendredi. Trois dates, et trois ambiances révélatrices du malaise dans les rangs policiers. Comme lors des précédents rassemblements, les appels à se retrouver devant les préfectures ont été relayés en contournant les syndicats, par chaînes de SMS et par des commentaires sur les réseaux sociaux. Un fait rare dans cette profession où le taux de syndicalisation s'élèverait à 80%. "Il s'agit d'appels anonymes derrière lesquels se cachent des discours extrêmement radicaux", met en garde Nicolas Comte, secrétaire général d'Unité SGP Police. Majoritaire chez les gardiens de la paix et classé à gauche, son syndicat est à l'initiative de la journée de jeudi, tandis que le syndicat classé à droite Alliance portera vendredi la revendication d'une "présomption de légitime défense" pour les policiers.
• Sarkozy tombé en disgrâce
Derrière l'épisode de Noisy-le-Sec se cache l'histoire du désamour entre Nicolas Sarkozy et les policiers. Une histoire en deux actes, démarrée en 2002 lorsqu'il devient ministre de l'Intérieur. "Il nous a donné des budgets, des véhicules, des effectifs, se souvient Jean-Marc Bailleul, secrétaire général du Snop-SCSI (Syndicat des cadres de la sécurité intérieure). Puis, à son arrivée à l'Elysée, il nous a retiré tout cela, et le mal-être des policiers a commencé."
Les forces de l'ordre ont alors découvert un ennemi à quatre lettres : RGPP, comme révision générale des politiques publiques. "Les moyens ont été supprimés alors que les objectifs fixés étaient de plus en plus élevés, avec une politique du chiffre dévastatrice", note Nicolas Comte. Autant de doléances qui seront exprimées en cette fin de semaine, à l'attention notamment du futur ministre de l'Intérieur.
• Hollande attendu au tournant
Qu'il s'agisse de François Rebsamen, de Manuel Valls ou d'une autre personnalité, le prochain locataire de la place Beauvau aura du pain sur la planche. Dans une lettre adressée à Unité SGP Police le 18 avril, François Hollande a affirmé qu'il était "urgent de mettre un terme à la révision globale des politiques dans les métiers de la sécurité" et souhaité "la création de 5 000 postes de fonctionnaires dépendant des ministères de l'Intérieur et de la Justice pendant le quinquennat".
Les mises en garde syndicales pleuvent déjà. "Il ne faudra pas politiser les questions de police, car cela n'a jamais marché, prévient Nicolas Comte, que ce soit avec la police de proximité avant 2002 ou la politique du chiffre après, qui ont été élevées en religion." Quant au syndicat d'officiers Synergie, proche d'Alliance, il appelle par la voix de son secrétaire général, Patrice Ribeiro, à une "gestion équitable du ministère, sans sectarisme" et "à un message de fermeté vis-à-vis des voyous, pour affirmer l'autorité de l'Etat".
Des mouvements sont par ailleurs annoncés à la tête des principales directions, avec les départs attendus du directeur général de la police nationale, Frédéric Péchenard, du préfet de police de Paris, Michel Gaudin, ou encore du directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, tous proches de Nicolas Sarkozy.
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