"Corruption passive", "financement illégal de campagne"... On vous explique ce que la justice reproche à Sarkozy (et ce qu'il risque)
L'ancien président de la République a été mis en examen, mercredi, pour "corruption passive", "financement illégal de campagne électorale" et "recel de détournement de fonds publics libyens" dans l'enquête sur les soupçons de financement libyen de sa campagne en 2007.
"Corruption passive", "financement illégal de campagne électorale" et "recel de détournement de fonds publics libyens". Voici ce que les juges d'instruction chargés de l'enquête sur les soupçons de financement libyen de la campagne électorale de 2007 reprochent à Nicolas Sarkozy. Ils ont estimé, mercredi 21 mars, disposer de suffisamment d'indices graves et concordants pour mettre en examen l'ancien président de la République.
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Que cachent ces termes juridiques ? Que risque Nicolas Sarkozy ? Franceinfo décortique ces trois chefs de mise en examen.
"Corruption passive"
La définition juridique. Dans le Code pénal, la corruption par une personne "dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif" – ce qu'était le ministre Nicolas Sarkozy en 2007 – est définie comme le fait "de solliciter ou d'agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour elle-même ou pour autrui, afin d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat".
Comme le précise le ministère de la Justice dans une note (PDF), la corruption est "passive" pour le corrompu, la personne qui reçoit de l'argent ou un service en contrepartie d'un acte accompli dans le cadre de ses fonctions, "active" pour le corrupteur, la personne qui verse de l'argent ou rend un service au corrompu afin d'obtenir une intervention de ce dernier.
Les éléments du dossier. Dans l'affaire libyenne, les juges soupçonnent Nicolas Sarkozy, le corrompu présumé, d'avoir reçu de l'argent de Mouammar Kadhafi, le corrupteur présumé, pour financer sa campagne présidentielle de 2007 ou s'enrichir personnellement. La contrepartie aurait été de sortir la Libye de son isolement diplomatique, avec la libération des infirmières bulgares et la visite du dictateur libyen à Paris.
La peine encourue. Selon l'article 435-1 du Code pénal, Nicolas Sarkozy risque dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende.
"Financement illégal de campagne électorale"
La définition juridique. Les dépenses de campagne présidentielle sont régies par des règles édictées dans le Code électoral et résumées dans le mémo (PDF) que la Commission nationale des comptes de campagne a concocté : dépôt des comptes, dépenses plafonnées, interdiction de certains types de dons, etc.
Les éléments du dossier. Dans l'affaire qui nous intéresse, les principales règles que Nicolas Sarkozy aurait enfreintes sont indiquées à l'article 52-8 : interdiction d'être financé par un Etat étranger – la Libye – et de recevoir des dons en espèces d'une valeur supérieure à 150 euros. Sur ce dernier point, Ziad Takieddine a indiqué avoir livré aux proches de Nicolas Sarkozy des valises de billets et Eric Woerth, le trésorier de la campagne, a reconnu avoir distribué des enveloppes aux membres de l'équipe.
A ces deux éléments, il faut ajouter l'article 52-12, qui demande au candidat de lister l'ensemble des recettes et dépenses engagées dans la campagne, et, éventuellement, le dépassement du plafond des dépenses fixé à l'article 52-11. Sur ce dernier point, si le financement illégal est avéré, les juges devront déterminer s'il a permis à Nicolas Sarkozy de dépasser le plafond de dépenses autorisées.
La peine encourue. Selon l'article 113-1 du Code électoral, Nicolas Sarkozy risque trois ans de prison et 45 000 euros d'amende.
"Recel de détournement de fonds publics libyens"
La définition juridique. Le recel est défini à l'article 321-1 du Code pénal. Il peut prendre deux formes : "Le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit" ou "le fait , en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit".
Le détournement de fonds publics "par une personne dépositaire de l'autorité publique" est défini par l'article 432-15 du Code pénal comme le fait, "par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l'un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission".
Les éléments du dossier. Dans cette affaire, les juges soupçonnent Nicolas Sarkozy d'avoir profité, en toute connaissance de cause, d'un détournement de fonds publics commis par les dirigeants libyens. Car les fonds de cet Etat n'ont pas vocation à financer une campagne électorale à l'étranger.
La peine encourue. Selon les articles 321-4 et 432-15, Nicolas Sarkozy risque dix ans d'emprisonnement et d'une amende d'un million d'euros.
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