L'affaire Tapie expliquée aux enfants
Mais si les adultes n'ont toujours rien compris à cette affaire rocambolesque, ils peuvent aussi lire l'article...
Bernard Tapie a été mis en examen vendredi 28 juin pour escroquerie en bande organisée dans le cadre de l'affaire sur l'arbitrage de son litige avec le Crédit lyonnais lors de la vente d'Adidas. Mais pourquoi ? "L'affaire Tapie" et ses vingt ans de rebondissements peuvent-ils être expliqués simplement ? C'est le pari que fait francetv info en imaginant l'expliquer à des enfants.
Un homme d'affaires, une ministre, des juges-arbitres et des billets. Voilà en substance les principaux acteurs de l'affaire Tapie, dont tu entends parler tous les jours à la télévision ou à la radio. Mais as-tu tout compris ? Francetv info t'explique tout pour briller dans la cour de récré.
1Des baskets très chères
Tout commence il y a vingt ans, quand tu n’étais pas né(e). Un homme d’affaires très célèbre (il a présenté des émissions de télé et chanté quelques chansons), Bernard Tapie, doit choisir : s’il veut devenir ministre, il doit vendre son entreprise, Adidas - la marque de tes baskets.
Sans se poser de questions, il confie la vente à sa banque, le Crédit lyonnais, et en obtient 315 millions d’euros. Parmi les acheteurs se trouve en fait la banque elle-même. Sauf que, normalement, elle n’en a pas le droit. Toujours est-il qu’elle revend la société pour 700 millions d’euros, deux fois plus cher. Elle gagne donc beaucoup d’argent entre-temps.
2La colère de Bernard Tapie
Quand Bernard Tapie apprend cela, il n’est pas content. Du tout. D'autant que le Crédit lyonnais l'a aussi ruiné en s'occupant de ses autres affaires. Mais de son côté, la banque, qui appartenait à la France, a aussi fait faillite. Désormais, l'Etat est responsable de ce qu’a fait cette banque, par l’intermédiaire de ce qu’on appelle le “CDR”. Alors Bernard Tapie se tourne vers la France pour demander de l’argent. Il veut que soit réparé ce qu'il considère comme une injustice.
En 2005, après de très longues discussions, les juges finissent par dire que Bernard Tapie a raison d’être en colère et demandent que 135 millions d’euros lui soient donnés. Tout pourrait s’arrêter là, mais un an plus tard, des juges encore plus importants, ceux de la Cour de cassation, déclarent tout le contraire. Pour eux, le Crédit lyonnais n’a rien fait de mal et Bernard Tapie n’a plus le droit de recevoir de l’argent.
3Une montagne d’or
Au bout de quinze ans, l’histoire commence à être vieille et ne trouve toujours pas de solution. Pour en finir, la nouvelle ministre de l’Economie, Christine Lagarde - qui s’occupe alors de l’argent de la France -, décide de demander son avis à un “tribunal arbitral”, c’est-à-dire privé. Les juges qui le composent ne sont pas ceux de la République, ce sont des personnes choisies par les deux camps. Ce tribunal spécial permet de prendre une décision plus rapidement et de manière plus secrète.
C’est ce que voulait Bernard Tapie, mais ça ne plaît pas aux collègues de Christine Lagarde, qui se demandent pourquoi elle n’utilise pas des juges ordinaires. Malgré ces reproches, trois personnes sont choisies pour décider du sort de Bernard Tapie : Pierre Estoup, Pierre Mazeaud et Jean-Denis Bredin.
Après de longues discussions, ils donnent raison à Bernard Tapie. Pour eux, l’homme d’affaires a été volé lors de la vente d’Adidas. Et pour cela, il reçoit deux fois plus d’argent qu’avant : 403 millions d’euros. C’est la France qui va payer.
4Une histoire trop belle pour être vraie ?
Cela fait beaucoup d’argent. Mais Christine Lagarde refuse de faire appel, c’est-à-dire de demander une nouvelle décision. Rapidement, des députés, ennemis politiques de la ministre et du président de l’époque, Nicolas Sarkozy, se posent des questions. Même chose pour la justice qui s’interroge sur :
Christine Lagarde. Pourquoi a-t-elle choisi de confier l’affaire à des juges-arbitres ? L’a-t-elle fait pour que Bernard Tapie ait gain de cause ? Pour le savoir, des juges lui ont posé des questions et l’ont placée sous le statut de témoin assisté. Cela veut dire qu’ils pensent qu’elle n'a pas fait de bêtise, ou qu'ils n'en ont pas la preuve.
Stéphane Richard. Le plus proche collègue de Christine Lagarde est lui aussi dans le viseur. Il a été mis en examen pour “escroquerie en bande organisée” (un peu comme si tu étais convoqué dans le bureau de la directrice parce qu’elle pense que tu as volé la gomme d’un copain avec Thomas). Lui se défend et assure qu’il n’a rien fait de mal.
Pierre Estoup. Le juge-arbitre a-t-il décidé que Bernard Tapie devait recevoir de l’argent parce qu’ils étaient amis ? C’est ce que cherchent à savoir les enquêteurs, qui l’ont mis en examen, lui aussi pour “escroquerie en bande organisée”. Chez lui, ils ont trouvé un livre de Bernard Tapie. L’homme d’affaires y avait écrit une dédicace, en 1998 : "Je vous remercie avec toute mon affection." Mais les deux hommes jurent qu’ils ne se connaissaient pas.
Nicolas Sarkozy. Derrière toute cette histoire, c’est l’ancien président de la République qui est indirectement visé.
Car avant qu’il soit élu par les Français, Bernard Tapie avait dit qu’il le trouvait super et l'a rencontré avant que la ministre choisisse l'option du tribunal arbitral. Certains pensent même que c’est Nicolas Sarkozy qui a demandé qu’on avantage son ami, pour le remercier de son soutien.
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