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Insultes et doigts d'honneur à Emmanuel Macron : ce que dit la loi quand on s'en prend au chef de l'Etat

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le chef de l'Etat Emmanuel Macron le 19 avril 2023 en visite à Sélestat (Bas-Rhin). (FRANCK DELHOMME / MAXPPP)
Trois personnes seront jugées en septembre pour "outrage à personne dépositaire de l'autorité publique", après avoir injurié le chef de l'Etat lors de sa visite à Sélestat, dans le Bas-Rhin.

Des doigts d'honneur et des insultes. Deux hommes et une femme ont été interpellés et placés en garde à vue à la suite de leurs agissements envers le chef de l'Etat, lors de sa visite à Sélestat (Bas-Rhin), mercredi 19 avril. Ces trois personnes, sans antécédents judiciaires, seront jugées en septembre. La procureure de la République de Colmar (Haut-Rhin), Catherine Sorita-Minard, précise à franceinfo qu'elles comparaîtront pour "outrage à personne dépositaire de l'autorité publique", sur reconnaissance préalable de culpabilité, "un mode de poursuite habituel quand les faits sont reconnus".

Quelle est la différence entre l'outrage et l'injure ?

Selon l'article 433-5 du Code pénal, des "paroles, gestes ou menaces", des "écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l'envoi d'objets quelconques" constituent un outrage, s'ils sont adressés "à une personne chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de sa mission", dès lors qu'ils portent atteinte "à sa dignité", ou "au respect" de sa fonction.

"C'est un délit de droit commun, voisin de l'injure, contrairement à laquelle il doit être adressé en direct, en face de la personne, dans l'exercice de sa fonction, auquel il se rapporte", précise à franceinfo l'avocat Basile Ader, ancien vice-bâtonnier du barreau de Paris. Il n'y a donc outrage qu'en présence physique de la personne insultée.

Le chef de l'Etat est-il protégé par une loi spécifique ?

Ce n'est plus le cas depuis l'abrogation, en août 2013, du délit d'offense au chef de l'Etat. Ce délit, inscrit dans la loi du 29 juillet 1881, préservait "l'honneur et la dignité" du président de la République. "Il n'y a aucune raison qu'il existe une infraction pour lui seul", observe Basile Ader. Désormais, il peut être considéré comme une "personne dépositaire de l'autorité publique", au même titre qu'un ministre, un préfet ou bien un sapeur-pompier.

Pour la diffamation et l'injure, il n'y a pas d'action publique sans plaignant. S'il s'estime injurié, le chef de l'Etat peut donc porter plainte lui-même. Comme le rappelle Le Monde, c'est ce qu'il avait fait en 2021 contre l'auteur de deux affiches collées à La Seyne-sur-Mer et à Toulon (Var), le montrant sous les traits et dans l'uniforme d'Adolf Hitler avec le slogan "Obéis. Fais-toi vacciner". L'afficheur varois avait été condamné à 5 000 euros d'amende pour "injures publiques", avant que la Cour de cassation annule sa condamnation, le 13 décembre 2022, invoquant le caractère "satirique et parodique" mentionné en bas de l'affiche.

En revanche, pour l'outrage, le parquet peut se saisir directement. "A ce niveau-là, il ne laisse pas passer des injures, c'est forcément inacceptable. Au-delà de l'attaque à la personne, il y a la protection de la fonction", avance Basile Ader.

Ces manifestants peuvent-ils aller en prison ?

Théoriquement oui, puisque l'outrage est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, lorsqu'il est "adressé à une personne dépositaire de l'autorité publique". Dans les faits, les personnes jugées pour ce délit, y compris si l'outrage visent le président de la République, sont rarement condamnées à des peines de prison.

En avril 2018, un retraité de 61 ans qui avait fait des doigts d'honneur à Emmanuel Macron, lors d'une déambulation du chef de l'Etat dans les rues de Saint-Dié-des-Vosges (Vosges), a écopé d'un simple rappel à la loi. L'année suivante, deux hommes qui comparaissaient pour "outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique" ont été condamnés à des stages de citoyenneté. Ils avaient participé à une manifestation à Nantes, au cours de laquelle un mannequin à l'effigie d'Emmanuel Macron avait été pendu et brûlé après un faux procès. L'un d'eux avait asséné des coups au mannequin.

En revanche, une personne poursuivie pour injure, si celle-ci n'est pas "précédée de provocations", ni raciste, encourt seulement une amende, qui peut atteindre 12 000 euros, selon l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881. C'est ce que risque une quinquagénaire du mouvement des "gilets jaunes", qui sera jugée le 20 juin au tribunal judiciaire de Saint-Omer (Pas-de-Calais) pour "injure au président de la République", après avoir qualifié Emmanuel Macron d'"ordure" sur sa page personnelle, à la veille de son interview sur TF1 et France 2 à propos de la réforme des retraites.

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