Pourquoi le ton monte entre l’Agence nationale du sport et la Fédération française d’athlétisme ?
Reçus mardi au ministère des Sports, la fédération française d’athlétisme et l’Agence nationale du sport veulent sortir du différent qui les opposent dans la gestion du sport de haut-niveau.
C'était un peu la dernière chance de réconciliation entre l'ANS et la Fédération française d'athlétisme, mardi 12 octobre. Réunis au ministère des Sports, l'objectif affiché est la nomination d’un Directeur technique national (DTN) et d’un directeur de la performance pour impulser un nouvel élan après le flop de Tokyo. Mais le dialogue est à l’arrêt, depuis décembre 2020. franceinfo: sport décrypte le différent qui oppose les deux institutions.
La déroute de Tokyo a laissé des traces
Après le cru exceptionnel de 2016 (six médailles), l'athlétisme français a flanché. Seul Kevin Mayer, en devenant à nouveau vice-champion olympique du décathlon, est monté sur un podium au stade olympique. Pas de bonne augure pour les Jeux à Paris, dans moins de trois ans. “On ne peut pas se permettre que sur des sports comme l’athlétisme ou la natation, on revienne seulement avec une médaille d’argent dans chacun des sports. Ces deux fédérations connaissent une petite baisse de régime et il faut les accompagner au plus près ” indiquait Roxana Maracineanu au micro de France Inter.
“On a un trou générationnel, reconnaît Stéphane Diagana, consultant France Télévision. Il y a des très jeunes, très talentueux, mais qui arriveront tôt à Tokyo. Et il y a des plus anciens, qui ont déjà pris leur retraite ou qui arriveront en fin de carrière à Tokyo. C'est ce sentiment là, en plus des dysfonctionnements d’organisation, qui ont pu être identifiés par l'ANS ou le ministère et qui provoquent ce sentiment d'urgence à agir et cette réunion. Il n'y a plus de temps à perdre pour 2024 ”.
Entre Onesta et Giraud, le torchon brûle
“ Le ton est monté parce qu'on a une vision divergente entre les différents décideurs”, reconnaît Stéphane Diagana. La discorde a repris de plus belle par communiqués interposés. La semaine dernière Claude Onesta, à la tête de l'ANS, a pointé du doigt le bilan de l’athlétisme français, avec son franc parler habituel : “Quand vous voyez que ca représente 150 médailles potentielles et qu’on en fait une, si c’est pas une inquiétude, je ne sais pas comment il faut l'appeler ”. Une pique qui rappelait les propos tenus le 13 septembre par Emmanuel Macron devant les médaillés olympiques : “Il faudra faire beaucoup plus”.
Et sans surprise, ça n’a pas beaucoup plu au directeur de la Fédération française d’athlétisme, André Giraud, qui sans le nommer, adressait une réponse cinglante à Claude Onesta. "Je suis exaspéré par ces attaques répétées et inutiles. Affaiblir la Fédération française d’athlétisme n’apportera pas plus de médailles à la France, qu’on se le dise. [...] Nous prendrons des décisions, certes ensemble, avec l’État, mais nous ne laisserons personne décider seul et à la place de la Fédération. ».
Derrière la joute rhétorique, se joue des divergences profondes quant à la nomination du prochain DTN. Onesta, avec son franc-parler habituel, a laissé entendre que les candidats proposés (principalement Patrick Ranvier, Grégory Saint-Génies et Vincent Rognon) ne le transportaient pas d'enthousiasme.
Une voix qui parait aujourd'hui encombrante pour la fédération d'athlétisme. Pourtant, rien de nouveau dans le mode de nomination du DTN. “ La fédération française d'athlétisme a toujours eu beaucoup de cadres techniques, plus de 80, mis à sa disposition par l’Etat, payés par l’Etat. Ils ont toujours eu une voix sur sa nomination”, reconnaît Stéphane Diagana.
Un plan d'action à redéfinir
Il n’y a pas que le torchon qui brûle. La maison couve des braises. Derrière les dissensions pour la nomination du DTN, c’est la redéfinition du projet de haut niveau et l’organisation de cette dernière qui restent à définir. Et vite.
“On a vu des désaccords entre le directeur de la haute performance et la DTN, ajoute Stéphane Diagana. Donc il faut que les périmètres de responsabilité, de décision et d'autorité, soient mieux définis. Cette idée de duo venait du président André Giraud. Ce n’était pas une mauvaise idée mais est-ce que le directeur de la haute performance peut être autonome et sélectionneur de l’équipe de France ? Visiblement les textes ne le permettent pas. En tout cas, ça ne s'est pas fait comme ça", avance comme explication possible Stéphane Diagana.
La réunion du jour au ministère des Sports espère permettre une sortie de l’impasse. Sur la table, il faut désormais conclure un plan à six mains, et s'accorder sur l'encadrement du haut niveau pour ces trois prochaines années. À savoir, trouver enfin une tête, pour relancer l'athlétisme français d'ici Paris 2024.
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