Eva Joly sera "candidate jusqu'au bout" mais les écologistes la soutiendront-ils aussi longtemps ?
Après sa mise en retrait volontaire, Eva Joly a raté son retour médiatique. En quelques formules, la candidate d'Europe Écologie-Les Verts à la présidentielle s'est mise à dos le PS et une partie de ses propres troupes. Elle s'est fragilisée.
"Je n'ai jamais douté du fait que je serai candidate jusqu'au bout. Cette détermination est solide". En 16 mots, Eva Joly avait cru relancer sa campagne électorale, mardi 22 novembre au JT de 20heures de France 2. Mais c'était sans compter sur le reste de sa prestation médiatique à très forte connotation anti-socialiste.
Dès mercredi matin, sa "détermination" est passée à la trappe car la candidate écologiste en a remis une couche sur RTL. Elle a obstinément refusé de dire si elle appelerait à voter Hollande dans l'hypothèse où le candidat socialiste serait présent au second tour de la présidentielle.
Le sang des partenaires socialistes d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) n'a fait qu'un tour. Cécile Duflot, secrétaire nationale d'EELV, a été quasiment mise en demeure de remettre Mme Joly dans le droit chemin de l'alliance avec le PS. Successivement, Jean-Marc Ayrault et Martine Aubry ont procédé à un recadrage.
"Les mauvais choix politiques"
Mme Joly "est-elle devenue une candidate indépendante, qui vit sa vie toute seule, ou est-ce qu'elle est la candidate des Verts ?", a ainsi demandé le "patron" des députés PS, conseiller spécial de François Hollande. La première secrétaire, pour sa part, a jugé les propos de Mme Joly "absolument incompréhensibles".
Pire, même des dirigeants d'EELV n'ont pas apprécié cette posture de Mme Joly. Son porte-parole, Yannick Jadot, a donné sa démission de son poste. Et Daniel Cohn-Bendit, figure emblématique des Verts, lui a reproché de faire "les mauvais choix politiques".
Ancien candidat écologiste à l'élection présidentielle de 2002, Noël Mamère a mis en évidence une "maladresse" de Mme Joly, avant de préciser que la campagne se ferait sans lui si elle gardait ce ton anti-PS. Dans les couloirs de l'Assemblée nationale, le député (EELV) François de Rugy a précisé qu'il fallait "recaler en quelque sorte la campagne présidentielle, qui en a besoin".
La candidate écologiste a donc fait amende honorable en indiquant qu'elle voterait bien Hollande, si cela se présente, et qu'il n'y a "jamais eu aucun doute" la-dessus. Cependant, elle n'a pas amendé ses propos virulents contre les socialistes "archaïques" ou fabriqués dans le "bois dont on fait les marionnettes".
Un chevalier blanc de la politique
A l'évidence Mme Joly a été meurtrie par l'esprit et la lettre de l'accord électoral entre le PS et EELV. Au-delà des péripéties sur le "caviardage", puis la réintégration dans le texte, par les socialistes du paragraphe sur l'avenir de la filière du combustible nucléaire MOX - séquence à l'origine de son bref retrait de la scène -, elle s'est mise elle-même en opposition avec sa famille politique.
En utilisant une formule - "cet accord ne me fait pas rêver" -, elle est devenue un électron libre par rapport aux responsables d'EELV qui avaient négocié le fameux accord avec le PS. L'allusion au "rêve" vise explicitement M. Hollande qui se propose, justement, de "réanchanter le rêve français".
La question qui se pose aujourd'hui n'est pas de savoir si Mme Joly est sûre d'être "candidate jusqu'au bout" mais si ses propres amis la soutiendront jusqu'au bout. La démission de l'un et la mise en garde des autres poussent légitimement cette interrogation.
L'eurodéputée-candidate, qui se présente volontiers comme un chevalier blanc de la politique, a réussi à semer le doute dans son propre camp. Le clan des "rêveurs" se reconnaitra sans doute dans le discours de Mme Joly mais celui des "réalistes" n'y trouvera probablement pas son compte.
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