Affaire Fillon : "Il y a une banalisation, mais cela ne s'effacera pas"
Mis en examen dans l'affaire des emplois présumés fictifs de sa compagne et de ses enfants, François Fillon a maintenant pour difficulté de séduire au-delà de sa base électorale à la présidentielle, estime le politologue Olivier Rouquan.
Alors que le candidat de la droite et du centre, François Fillon, a été mis en examen mardi 14 mars dans l'affaire des emplois présumés fictifs de sa compagne et de ses enfants, le politologue Olivier Rouquan estime sur franceinfo que cette affaire continuerait à marquer la campagne pour le premier tour de la présidentielle. Selon lui, le problème de François Fillon sera de convaincre au-delà de la base de sympathisants qui ont décidé de le soutenir dans l'adversité.
franceinfo : François Fillon a fait beaucoup d'erreurs de communication depuis le début de la campagne, mais cette fois, est-ce plutôt bien joué d'avoir fait de sa mise en examen un "non-évènement" ?
Olivier Rouquan : Oui, après la période de la dramatisation, la période du bouc émissaire. Il y a la tactique de la banalisation. Tout est fait pour que cette mise en examen apparaisse comme un non-évènement. C'est sans doute la meilleure façon de poursuivre une campagne sur le fond et de reprendre les meetings. Mais on parle quand même du fond de l'affaire. Cette mise en examen signifie sans doute que les juges ont estimé qu'un certain nombre d'éléments sont fondés et que des investigations doivent se poursuivre. Je remarque en feuilletant la presse ce matin qu'on s'intéresse également à d'autres points sur la relation qu'entretient ce candidat à l'argent. Il y a une banalisation, mais cela ne s'effacera pas, cela va continuer à marquer cette campagne pour le premier tour.
François Fillon peut-il encore séduire au-delà de sa base électorale ?
C'est l'élément le plus préoccupant pour lui, y compris quand il a présenté son projet en début de semaine. On a du mal à percevoir une entame sur le fond du projet. On assiste à un premier tour qui a été siphonné par la primaire, aussi bien à droite qu'à gauche. Le débat d'idées a été évidé à ce moment-là. Pour des tas de raisons, les candidats ont du mal à nourrir davantage leur projet. On a l'impression qu'ils ont grillé la totalité de leurs cartouches au moment de la primaire, ce qui fait qu'on a une impression de redite et de stagnation. Pour François Fillon, la difficulté désormais est de dépasser ce fameux noyau qui est en plus assez bas pour un candidat de droite classique. Et il peut d'autant moins le faire qu'il y a quand même l'erreur de fond de communication, en ayant commencé sa campagne sur le thème de l'honnêteté.
Est-ce que cette résistance dans la tempête peut se retourner en sa faveur à la fin ?
Cela cadre avec ce qu'attendent un certain nombre de militants anciens du RPR : le registre un peu bonapartiste, cette idée de l'homme de caractère, qui renvoie un petit peu à la figure gaullienne. Sauf que là, c'est sur le thème du suffrage universel contre l'État de droit. Aujourd'hui, on peut se poser des questions, car un chef de l'État doit garantir l'indépendance de la justice et doit tout faire pour que l'État de droit fonctionne. Cela peut donc fonctionner par rapport à un nombre de militants qui sont passionnés, dans l'émotion, et qui le soutiennent dans l'adversité. Mais cela créé le trouble vis-à-vis du reste de l'électorat. C'est à double tranchant.
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