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Cinq questions pas si bêtes sur l'affaire Penelope Fillon

Alors que "Le Canard enchaîné" a publié de nouvelles révélations sur l'affaire Penelope Fillon, mercredi, franceinfo répond à cinq questions clés sur ce qui lui est reproché.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 10min
François et Penelope Fillon, lors d'un meeting à Paris, le 18 novembre 2016. (ELODIE GREGOIRE / REA)

François Fillon est dans la tourmente. Le candidat à la présidentielle est au cœur d'une violente polémique depuis les révélations du Canard enchaîné sur la rémunération de son épouse Penelope, mais aussi de deux de ses enfants comme assistants parlementaires. Alors que certains élus des Républicains prennent leurs distances avec le vainqueur de la primaire de la droite, franceinfo répond à cinq questions sur l'affaire qui plombe sa campagne.

1Que reproche-t-on à François Fillon, au juste ?

Le Canard enchaîné affirme, mercredi 1er février, que Penelope Fillon a touché 831 440 euros brut comme collaboratrice de son mari lorsqu'il était député, puis de son suppléant, Marc Joulaud, et de nouveau de son époux. Elle aurait également perçu quelque 100 000 euros brut pour un emploi au sein de la Revue des deux mondes. Au total, Penelope Fillon aurait donc touché plus de 900 000 euros brut entre 1988 et 2013.

Problème : selon l'hebdomadaire, plusieurs personnes mettent en cause la réalité de ces postes. Une collaboratrice de François Fillon en 2002 a ainsi assuré au Canard "n'avoir jamais travaillé avec elle". L'ancien directeur de la Revue des deux mondes, Michel Crépu, a quant à lui déclaré n'avoir "jamais rencontré Penelope Fillon" et ne l'avoir "jamais vue dans les bureaux de la revue". Elle n'aurait signé que "deux ou peut-être trois notes de lecture".

Après ces révélations, le parquet national financier (PNF) a ouvert une enquête préliminaire sur la réalité de l'emploi d'attachée parlementaire de Penelope Fillon, mercredi 25 janvier. Si cet emploi s'avérait fictif, les époux pourraient être mis en examen pour détournement de fonds publics. Ils encourraient alors jusqu'à "dix ans d'emprisonnement et une amende d'un million d'euros, dont le montant peut être porté au double du produit de l'infraction".

Autre affaire qui plombe le candidat à la présidentielle : il aurait employé deux de ses enfants comme collaborateurs lorsqu’il était sénateur. Au total, Charles et Marie Fillon auraient reçu près de 84 000 euros brut entre 2005 et 2007, selon Le Canard enchaîné. Leur père a assuré, jeudi 26 janvier, les avoir rétribués "en raison de leurs compétences" en tant qu'avocats. Ils n'étaient pourtant pas encore diplômés à cette époque.

>> Les six affaires qui plombent François Fillon

2Mais il n'est pas le seul parlementaire à employer un proche, si ?

Quelque 10 à 15% des 900 parlementaires français ont un collaborateur issu de leur propre famille, selon une enquête de Mediapart menée en 2014. Au moins 115 députés sur 577 employaient alors un membre de leur famille, en CDD ou en CDI, sur un temps plein ou partiel. "Vous savez, pour ce type de poste, mieux vaut être proche de son employeur", explique Edith Cottel, attachée parlementaire et épouse du député socialiste Jean-Jacques Cottel.

Cette pratique n'est d'ailleurs pas illégale (tant qu'il ne s'agit pas d'un emploi fictif) : chaque député peut employer jusqu'à cinq collaborateurs, qu'il peut payer grâce à une enveloppe mensuelle de 9 561 euros. S'il choisit d'embaucher un proche, la rémunération du salarié ne doit pas dépasser la moitié de l'enveloppe, soit 4 780 euros.

La nécessité d'être aidé par un proche est souvent mise en avant pour justifier l'embauche d'un membre de la famille du parlementaire. "Mais je comprends quand même les interrogations sur ce fonctionnement", reconnaît Patricia Deflesselles, femme du député Les Républicains des Bouches-du-Rhône Bernard Deflesselles. "Si une loi est votée et que c'est terminé, je le comprendrai et suivrai la loi sans problème, abonde Michel Martinel, "chauffeur attitré" de sa femme, la députée socialiste Martine Martinel. Cela ferait du bien à la démocratie."

>> Femmes, mari ou fille de député, ils sont collaborateurs parlementaires : ils racontent (ou pas) ce qu'ils font

3Sa communication de crise, elle fonctionne ?

François Fillon a bien essayé de répondre aux différentes accusations qui pèsent contre lui. Lors de son intervention sur TF1, le 26 janvier, il a assuré que sa femme avait travaillé pour lui "depuis 1981, [sa] première élection". Elle l'aurait d'abord fait "bénévolement", avant de devenir son attachée parlementaire de 1997 à 2013.

Problème : ces dates ne correspondent pas à celles données par Le Canard enchaîné, selon lequel Penelope Fillon a été embauchée une première fois de 1988 à 1990, puis de 1998 à 2007 et enfin de 2012 à 2013. L'épouse de François Fillon a par ailleurs assuré au quotidien Le Bien public, en octobre 2016, qu'elle ne s'était "jamais impliquée dans la vie politique de [son mari]". Autant d'incohérences qui rendent cette défense bancale.

La communication de crise du candidat à la présidentielle s'est retournée contre lui à d'autres reprises depuis le début de la polémique. François Fillon a ainsi affirmé que "les parlementaires ont une enveloppe et ils font ce qu'ils veulent". Le montant maximum qu'un élu peut verser à un proche employé comme collaborateur est en réalité plafonné à 4 780 euros par mois.

"Nous n'avons rien à cacher, notre seul compte en banque est au Crédit agricole de Sablé-sur-Sarthe", a encore martelé François Fillon. L'Assemblée nationale exige pourtant que les députés disposent de deux comptes, dont un réservé au versement de leur indemnité représentative de frais de mandat. Autant d'imprécisions qui entachent la crédibilité du candidat.

>> Affaire Penelope Fillon : cinq fois où la défense de François Fillon s'est retournée contre lui

4Donc c'est fini pour lui, la présidentielle ?

François Fillon continue de faire campagne normalement, malgré la polémique. Mais un sondage le donne pour la première fois perdant dès le premier tour de la présidentielle, mercredi 1er février. Il perd entre 5 et 6 points dans les intentions de vote, selon une enquête de l'institut Elabe pour Les Echos (article payant) et Radio Classique.

Deux scénarios ont été testés, avec ou sans candidature de François Bayrou. Dans les deux cas, François Fillon (19 ou 20%) compte 3 à 5 points de retard sur Emmanuel Macron (22 ou 25%) au premier tour, 7 sur Marine Le Pen (26 ou 27%), et n'a que 3 points d'avance sur Benoît Hamon (16 ou 17%).

Même dans son propre camp, le doute s'installe. "On est très mal, s'inquiète Arlette Grosskost, députée Les Républicains du Haut-Rhin. Défendre à tout prix notre candidat ? Ce n'est pas comme ça qu'on va [lever] tout doute et toute problématique."  "C'est fini", a même estimé un élu LR sous couvert d'anonymat, mardi 31 janvier.

Le lendemain, un premier député a publiquement lâché le candidat à la présidentielle. "Je pense que le résultat des primaires est aujourd'hui caduc face à cet événement imprévisible (…) qui se situe non seulement sur le registre judiciaire mais sur le registre éthique et moral, a lancé Georges Fenech, élu du Rhône. Je crois que la situation est très, très compromise."

>> Affaire Penelope Fillon : "C'est fini", se désolent en coulisses certains membres des Républicains

5Et s'il renonce, quel est le plan B ?

Pour l'instant, François Fillon est toujours dans la course. Mais s'il devait renoncer, Les Républicains commencent déjà à réfléchir à des solutions de secours. Le nom d'Alain Juppé a rapidement circulé. Mais le finaliste malheureux à la primaire de la droite a écarté l'option, vendredi 27 janvier. "La question ne se pose pas aujourd'hui. François Fillon n'est pas en situation de se retirer, a déclaré le maire de Bordeaux. Il a expliqué qu'il le ferait s'il était mis en examen. Il n'est pas mis en examen." "A chaud, il a dit 'non', mais je le vois mal refuser si c'est lui le recours", a toutefois estimé un proche d'Alain Juppé, interrogé par France 2, mardi 31 janvier.

"Il y a un plan B comme Baroin", a assuré anonymement un autre député à France 2. François Baroin a défendu François Fillon lors d'un meeting de campagne, dimanche 29 janvier. Mais certains observateurs voient dans ce discours une volonté de se positionner en tant que remplaçant potentiel.

Xavier Bertrand et Laurent Wauquiez pourraient également être intéressés par cette opportunité, en cas de nouvelle primaire de la droite. Les noms de domaine Baroin2017, Wauquiez2017 et Bertrand2017 viennent même d’être déposésIl n'y a donc qu'une certitude : si François Fillon se retire, "ce sera un Blitzkrieg à celui qui tire le premier", assure un membre anonyme de la direction des Républicains.

>> VIDEO. Juppé, Baroin, Wauquiez… Qui pourrait remplacer François Fillon s'il devait renoncer ?

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