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Cinq questions sur les activités du consultant François Fillon

Douze députés de gauche ont annoncé jeudi avoir saisi le déontologue de l'Assemblée nationale pour réclamer la "transparence totale" sur les activités de consultant du candidat.

Article rédigé par Elise Lambert, Vincent Matalon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
François Fillon lors d'un débat avec des entrepreneurs à Paris, mardi 31 janvier 2017. (THOMAS SAMSON / AFP)

C'est l'autre flanc sur lequel est attaqué François Fillon. Dejà affaibli par les révélations sur les soupçons d'emplois fictifs de sa femme Penelope et de ses enfants, le candidat à la présidentielle est désormais pressé de s'expliquer au sujet de ses activités de consultant. Il avait créé sa société, 2F Conseil, entre son départ de Matignon en mai 2012 et son retour sur les bancs de l'Assemblée quelques semaines plus tard. 

Qui a-t-il conseillé ? Pour quels montants ? Ces activités représentent-elles de possibles conflits d'intérêts ? Douze députés de gauche ont en tout cas annoncé, jeudi 9 février, avoir saisi le déontologue de l'Assemblée nationale pour réclamer la "transparence totale" sur les activités du consultant Fillon. Franceinfo récapitule.

Quelles sont les activités de 2F Conseil ?

D'après les statuts de l'entreprise consultés par Rue89, 2F Conseil a pour activités "le conseil, l'assistance, la formation, la réalisation d'études, de veille, d'audits, d'analyses ou de prestations (...) en faveur de toute personne physique ou morale, tout Etat et de tout organisme international européen, national, étatique, régional, départemental, municipal ou local".

Elle a été créée le 6 juin 2012 et domiciliée avenue Hoche, dans le 8e arrondissement de Paris. Aujourd'hui, elle est officiellement enregistrée au domicile de François Fillon, au cœur du quartier de la Tour-Maubourg, dans le 7e arrondissement, selon Infogreffe.

Capture écran des statuts de la société 2F Conseil, mercredi 1er février 2017. (2F CONSEIL)

Qui sont les clients de 2F Conseil ?

Après s'être longtemps montré très discret sur l'identité de ses clients, François Fillon a profité de sa conférence de presse, lundi 6 février, pour lever le voile sur une partie d'entre eux.

François Fillon s'explique sur ses activités de consultant
François Fillon s'explique sur ses activités de consultant François Fillon s'explique sur ses activités de consultant

Il indique avoir "donné des conférences dans de nombreux pays et conseillé des entreprises". Parmi elles : l'assureur Axa, la banque Oddo et la société Fimalac, dirigée par le milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière, qui est également le président de la Revue des deux mondes, où été employée Penelope Fillon.

François Fillon a ajouté avoir fait partie du conseil de surveillance du cabinet Ricol et Lasteyrie, puis y avoir exercé en tant que senior adviser. Ce dernier point n'était pas une surprise : début février, Le Monde et Mediapart avaient révélé les activités du candidat dans ce cabinet spécialisé dans le conseil aux sociétés du CAC 40 et aux grandes entreprises (Air France, Alstom, EDF, etc.).

Combien François Fillon a-t-il gagné via cette société ?

Selon Le Monde, François Fillon aurait touché de sa société un total de 757 526 euros entre juin 2012 et décembre 2015, en salaires et bénéfices, et "le compteur a continué de tourner en 2016". D'après les comptes de la société que le quotidien a pu consulter, 2F Conseil a réalisé un chiffre d'affaires cumulé d'1,015 million d'euros. Les profits sont versés sur le compte courant de François Fillon, domicilié au Crédit Agricole de Sablé-sur-Sarthe.

Dans la déclaration de patrimoine publiée sur son site de campagne, François Fillon indique de son côté avoir perçu 977 627 euros de "revenus professionnels" entre 2013 et 2016.

Dans le détail, le candidat toucherait une rémunération annuelle comprise "entre 40 000 et 60 000 euros" depuis quatre ans et demi de la part du cabinet Ricol et Lasteyrie, selon le dirigeant de l'entreprise René Nicol, cité par Mediapart.

L'assureur Axa lui aurait en outre versé 200 000 euros grâce à un contrat de deux ans conclu mi-2012, selon BFM Business. D'après la chaîne, François Fillon a aidé l'entreprise sur les négociations de la directive européenne dite "Solvabilité 2", qui concerne la nouvelle réglementation des assureurs en Europe. Il aurait également facilité les échanges pour Axa en Allemagne et à la commission européenne.

Une telle activité est-elle légale ?

Dans sa conférence de presse, François Fillon a assuré avoir agi "en toute légalité". Les activités de conseil font pourtant partie de la liste des activités jugées incompatibles avec celles d’un député nouvellement élu, comme le rappelle l’article 146-1 du Code électoral : "Il est interdit à tout député de commencer à exercer une fonction de conseil qui n'était pas la sienne avant le début de son mandat."

Mais le candidat à la présidentielle a fait les choses dans les règles : il a pris soin de déposer les statuts de son entreprise au greffe du tribunal de commerce de Paris le 6 juin 2012. C'est-à-dire onze jours avant d'être élu député de Paris, le 17 juin. François Fillon est donc dans son bon droit, mais les sommes évoquées dans la presse choquent nombre de ses adversaires, à commencer par Yannick Jadot et Arnaud Montebourg. "Quand on est parlementaire, on ne peut pas avoir d'activités parallèles", a accusé l'ancien candidat de la primaire de la gauche sur franceinfo, le 7 décembre.

Y a-t-il des risques de conflits d'intérêts ?

Lundi 30 janvier, le candidat écologiste Yannick Jadot a posé sur BFMTV la question d'éventuels contrats avec des sociétés russes, qui pourraient expliquer "une telle complaisance [de François Fillon] vis-à-vis de Vladimir Poutine". Lors de sa conférence de presse, l'ancien Premier ministre a tenu à revenir sur ce sujet.

La liste de mes clients ne comprend aucune entreprise russe, ni le gouvernement russe, ni aucun organisme de ce pays et toutes les conférences que j'ai données en Russie l'ont été à titre gratuit.

François Fillon

lors de sa conférence de presse

Mais la collaboration entre le candidat du parti Les Républicains et Axa suscite des questions. Invité d'Europe 1, mardi 7 février, Yannick Jadot a vu dans ce contrat "un conflit d'intérêts manifeste". "On ne peut pas intervenir en même temps comme lobby pour un intérêt privé et en même temps comme législateur censé défendre l'intérêt général", a-t-il ajouté.

Marine Le Pen a également profité de l'opportunité pour dénoncer le programme de son rival en matière de santé : "Le programme de M. Fillon (...), comme par hasard, va exactement au bénéfice des grandes compagnies d'assurance puisqu'il s'agit en réalité de permettre aux mutuelles de prendre la place de la Sécurité sociale", a-t-elle déclaré sur LCI.

Jeudi 9 février, douze députés de gauche ont saisi le déontologue de l'Assemblée nationale sur le même sujet. Ils se demandent si le contrat conclu entre Axa et François Fillon n'a pas influé le vote de celui-ci sur la loi du 30 décembre 2014, qui transpose notamment une directive européenne sur les activités d'assurance.

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