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Six questions sur la "fatwa bancaire" dont le Front national dit être victime

Lors d'une conférence de presse, Marine Le Pen a annoncé un dépôt de plainte contre la Société générale et HSBC, qui ont clôturé les comptes du FN. Les banques, elles, rejettent toute "considération politique".

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le trésorier du Front national, Wallerand de Saint Just, et la présidente du parti, Marine Le Pen, lors d'une conférence de presse à Paris, le 22 novembre 2017. (JACQUES DEMARTHON / AFP)

Les relations entre le Front national et les banques ne sont pas au beau fixe. Plusieurs comptes bancaires du parti, arrivé en deuxième position à l'élection présidentielle, ont été clôturés, comme l'ont révélé, mardi 21 novembre, France Inter et Mediapart. Marine Le Pen a affirmé que ses comptes personnels étaient aussi concernés. La présidente du FN a dénoncé cette situation lors d'une conférence de presse, mercredi, évoquant une "fatwa bancaire". Franceinfo fait le point sur la situation.

Quelles sont les banques concernées ?

La Société générale. Dans un courrier daté du 27 juillet, la Société générale indique n'avoir "plus convenance à maintenir la relation de comptes" avec le FN, et dénonce six comptes du parti ainsi que les comptes d'une quinzaine de fédérations.

HSBC. Marie Le Pen dit avoir reçu "ce matin [mercredi] un coup de téléphone de Thomas Vandeville, le président de la HSBC, qui a racheté la banque Hervet où [elle] avait un compte" depuis "vingt-cinq ans". "Sans aucune justification, il m'a annoncé la clôture de mon compte personnel", affirme-t-elle.

Quels sont leurs arguments ?

Après avoir mis en avant le "secret bancaire", le groupe Société générale s'est finalement exprimé dans un communiqué. Il assure qu'il s'agit d'une décision de nature "exclusivement bancaire" et a rejeté toute "considération politique".

Pas plus d'éléments du côté de HSBC. "Nous ne débattons publiquement pas de nos relations avec nos clients, a déclaré une porte-parole de HSBC France. Les relations que nous entretenons avec eux sont régies par un ensemble d'obligations réglementaires auxquelles nous nous conformons."

Les banques ont-elles le droit de fermer des comptes ?

Si les banques ont plutôt pour habitude d'attirer de nouveaux clients, elles ont tout à fait le droit de clôturer des comptes bancaires. Elles doivent juste en informer le client par écrit "entre 30 et 45 jours avant la date de fermeture effective du compte", explique le site service-public.fr. Ce délai doit permettre au client de trouver une banque afin d'ouvrir un autre compte. En tout cas,  la banque "n'est pas obligée de motiver sa décision", précise le site.

Les raisons pour une banque de fermer un compte peuvent être multiples. "Cela va de l’incivilité à une infraction à la réglementation (comme la non-conformité à la loi), en passant par un défaut de paiement et des opérations douteuses", explique LibérationPour Régis Dos Santos, du Syndicat national des banques (SNB), il y a surtout deux motifs principaux, comme il l'explique au Parisien : "Le premier, c'est que le client est considéré comme trop risqué. Le second, c'est parce qu'il y a des soupçons de blanchiment d'argent." Dans ce cas, la banque doit même alerter Tracfin, la cellule de Bercy chargée de la lutte contre le blanchiment d'argent et contre le financement du terrorisme.

Donc le Front national n'a plus de banque ?

Ce n'est pas si simple. La Société générale a bien envoyé un courrier au parti signifiant la clôture de ses comptes. Mais faute d'avoir trouvé une autre banque dans les délais impartis, le FN a saisi la Banque de France, comme le prévoit la loi bancaire du 24 janvier 1984, qui assure le droit au compte. L'institution a donc enjoint le Crédit du Nord, filiale de la Société générale, d'ouvrir un compte pour le FN.

Mais, selon le trésorier du parti, Wallerand de Saint Just, la banque nordiste refuse au parti de disposer de chéquiers, les sorties d'argent ne pouvant s'effectuer que par virement, et empêche les dons par carte bancaire via le site internet du parti, ne permettant les entrées que par chèques et virements.

"Un mandataire financier du Front national a sollicité la Banque de France pour bénéficier du droit au compte en tant que particulier. Le Crédit du Nord a répondu aux exigences de la Banque de France et a mis en application les services requis dans le cadre de la réglementation du droit au compte", a assuré de son côté la Société générale.

Comment réagissent Marine Le Pen et le FN ?

Le Front national et sa présidente ont dénoncé une "fatwa bancaire". Par ailleurs, le parti refuse de communiquer le solde actuel de son compte, mais selon lui, il est positif. Il s'agit du "secret de notre fonctionnement", déclare Wallerand de Saint Just. "La situation du Front national est tout à fait saine" et le parti "s'est toujours parfaitement conduit sur le plan des règles bancaires", assure le trésorier du FN.

Le parti revendique "plusieurs dizaines de milliers d'adhérents" et "des ressources stables". Il explique en outre qu'il a contracté un prêt de 9,3 millions d'euros, mais que celui-ci arrive à échéance en 2019.

Quels sont leurs recours ?

Lors de sa conférence de presse, Marine Le Pen a annoncé un dépôt de plainte contre la Société générale et HSBC. "Nous déposerons plainte tant au nom du Front national contre la Société générale et sa filiale qu'à titre personnel je le ferai contre la HSBC", a-t-elle déclaré. Elle a appelé "[les] cadres [du FN], [ses] élus, [ses] adhérents, [ses] électeurs à en tirer toutes les conséquences".

Marine Le Pen dénonce une "fatwa bancaire" et annonce des plaintes contre la Société générale et HSBC.
Marine Le Pen dénonce une "fatwa bancaire" et annonce des plaintes contre la Société générale et HSBC. Marine Le Pen dénonce une "fatwa bancaire" et annonce des plaintes contre la Société générale et HSBC.

Dans la foulée, le hashtag #JeQuittelaSG est apparu sur Twitter. Des élus et des partisans du Front national expliquent ainsi qu'ils souhaitent quitter la Société générale.

Enfin, Marine Le Pen a dit avoir "saisi de ce problème" Emmanuel Macron, qu'elle a rencontré mardi à l'Elysée dans le cadre de consultations sur les élections européennes.

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