La mise en scène de la première réunion publique de Marine Le Pen à la loupe
Dimanche 11 décembre, Marine Le Pen, candidate du Front national à la présidentielle, a tenu sa première réunion de campagne à Metz. L'occasion d'étudier la scénographie du meeting et de d'examiner les différences avec son père. Opération décryptage.
Un meeting, c'est comme une pièce de théâtre. Et il faut en roder la mise en scène en province avant de monter à Paris.
A Metz, pour la première représentation, l'équipe du Front national a donc pu effectuer les réglages. Comment amener des nouveautés sans désorienter un public d'habitués ?
Dans ces questions de mise en scène, on retrouve l'enjeu même de la campagne de Marine Le Pen : continuer à séduire les militants de longue date et convaincre de nouveaux partisans.
Culte du prénom
Commençons par le décor. Dans la salle, il est impossible de trouver le logo du FN, la fameuse flamme tricolore. A la place sur les murs, ce sont les maquettes d'une voile de navire stylisée sur laquelle sont projetés le nom de Marine Le Pen et son slogan.
Le nom de la candidate semble donc plus vendeur que celui du parti. C'est aussi la tradition d'une campagne présidentielle de ne pas mettre en avant l'appartenance partisane d'un candidat.
Mais à défaut d'un culte de la personnalité, avec de grandes photos, il y a un culte du prénom qui permet toutes les métaphores maritimes. Car derrière Mme Le Pen, à la tribune, sont projetées des images d'un phare qui éclaire la noirceur de la nuit. Le symbole est évident et somme toute peu modeste. Son père était surnommé le Menhir, deviendra t-elle un jour la Sémaphore ?
Une ambiance presque "zen"
Les projecteurs sont aux couleurs tricolores mais nimbent la salle d'une lumière plutôt douce et tamisée. Il y a manifestement une volonté de ne pas être agressif. Patriote mais pas cocardier.
Posé sur leurs sièges, les militants à leur arrivée, découvre un petit drapeau tricolore qu'ils tiendront d'une main. On ne trouve pas de drapeaux plus importants portés par des gens debout. Cela ferait trop manifestation d'anciens combattants.
Pour ce meeting, le FN a étrenné une nouvelle musique, spécialement composée pour la campagne. "Marine Le Pen ne l'a pas encore entendue", confie son entourage, "elle voulait la tester dans les conditions réelles avec la foule".
L'air est entraînant et légèrement grandiloquent, comme le veut la loi du genre. Mais il est moins solennel et épique que les choeurs d'"Aida" de Verdi sur lesquels Jean-Marie Le Pen faisait quelquefois ses entrées.
"Micros HF"
Justement, lors de ses arrivées, l'ancien président du Front aimait se mettre au bord de l'estrade, au centre de la scène, et lever les deux poings au ciel de façon saccadée. Rien de cela, chez sa fille qui marche vers le pupitre, se contentant de saluer de la main le public. Elle prend juste une pause pour mettre ses bras en croix, dans un geste à la fois protecteur et sacrificiel. Pour un peu, elle minauderait, envoyant un baiser à la foule.
Mme Le Pen lit, plutôt bien ce dimanche, son discours, immobile, accrochée au pupitre. Au contraire, à la grande époque, Jean-Marie Le Pen n'avait pas besoin de notes et arpentait la scène en marchant. La candidate du Front est pourtant équipée de deux micros HF à sa veste qui lui permettraient techniquement de bouger. "Mais pour l'instant, elle ne le sent pas encore", confesse son entourage.
Ce sera peut-être différent à la fin de la campagne. Car, à partir de janvier, Marine Le Pen va sillonner les routes de France pour des meetings le week-end, si possible dans des salles autour d'une jauge de 1 000 personnes.
Meeting payant
Après une Marseillaise, chantée à tue-tête puis jouée dans une orchestration swing, les militants s'en vont. Visiblement, ils en ont eu pour leur argent. L'entrée du meeting était à cinq euros.
Mais dès la sortie de la salle, on retrouve un univers plus familier au FN. Des stands présentent les documents de propagande. Et les militants tendent horizontalement de grands drapeaux tricolores pour faire la quête et recueillir l'argent qui va financer une toute petite partie de la campagne.
C'est une illustration d'un FN aux deux visages. Car si à Metz, Mme Le Pen a dépoussiéré un peu la forme, sur le fond, son discours a repris les classiques du parti.
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