Les salariées de Sodimedical racontent à Mélenchon leur effarant combat
Jean-Luc Mélenchon avait invité lundi matin à l'Usine, son siège de campagne, une quinzaine de salariées en lutte pour leurs indemnités, leurs conditions de travail...Ou même leurs salaires, comme celles de Sodimedical, non payées depuis octobre.
La visite électorale d'usine se décline volontiers au masculin avec casques de chantier ou masques de soudeur en accessoires télégéniques. C'est oublier qu'une bonne partie des travailleurs sont des travailleuses, souvent moins payées et plus précaires.
Une quinzaine d'entre elles, salariées en lutte pour des indemnités de licenciement, des conditions de travail décentes et même, tout simplement, pour toucher leur salaire, étaient lundi 13 février au matin invitées à l'Usine, le siège de campagne de Jean-Luc Mélenchon aux Lilas.
Les salariées de Sodimedical, non payées depuis octobre
Pendant près de trois heures, le candidat du Front de Gauche à l'Elysée a écouté des récits parfois effarants.
Par qui commencer ? Par cette vendeuse de la grande distribution qui manifesta sur un parking, 52 dimanches de suite, contre le travail dominical imposé, avant d'obtenir enfin gain de cause ?
Par cette représentante de 150 licenciées de boutiques 3 Suisses alors que le groupe de vente à distance est florissant ?
Ou par les salariées de Sodimedical, qui nous racontèrent leur combat, avant le début de la table ronde ?
"On vient à l'usine pour ne pas travailler"
Sodimédical, c'est -c'était ?- une usine fabriquant du matériel opératoire à Plancy-l'Abbaye (Aube). La maison-mère, Lohmann & Rauscher France (L&R), filiale d'un groupe allemand, a peu à peu délocalisé la production en Chine. Mais la justice française, constatant la bonne santé du groupe, a interdit à celui-ci de licencier pour motif économique.
Au terme d'un bras de fer judiciaire de deux ans, les 52 salariés (en grande majorité des femmes) ne touchent ni indemnités-chômage, ni salaire depuis le mois d'octobre.
Situation ubuesque, elles se présentent tous les jours à l'usine pour y passer leur journée, sans être payées. Pour Evelyne, 34 ans, cela signifie aussi payer la cantine de sa fille de 6 ans, qu'elle élève seule. Et payer l'essence pour se rendre à l'usine.
Angélique, 33 ans : "on vient à l'usine pour ne pas travailler, mais le plus dur c'est de voir les factures quand on rentre et de savoir qu'on ne peut pas les payer. Parmi nous, il y en a qui sont interdits bancaires, qui ont le téléphone coupé, l'éléctricité en suspens ou qui craignent la fin de la période d'interdiction d'expulsion".
Evelyne ajoute: "on cogite tellement la nuit. On vit dans la peur, le stress". Et les enfants savent désormais qu'"entre aller à la piscine et un paquet de pâtes, le choix est vite fait".
"Qu'est-ce qu'il attend, M. Baroin ? "
Contrairement aux ouvrières Lejaby de l'usine Yssingeaux, elles n'ont pas eu la chance, elles, de retenir l'attention du ministre implanté dans la région.
C'est pourtant un poids lourd du gouvernement : François Baroin, élu de la circonscription avant de devenir ministre du budget, puis de l'économie. "Il a fallu menacer d'envahir le conseil municipal, en juillet, pour qu'il nous reçoive. Depuis, il n'a pas pris de nos nouvelles. Qu'est-ce qu'il attend, M. Baroin ?"
Parmi les candidats à l'Elysée, avant Jean-Luc Mélenchon, elles n'ont vu passer que Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), venue sans la presse les encourager à poursuivre le combat.
Le nom de François Baroin n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. "Pour moi, M.Baroin, c'est une belle cible", relève Jean-Luc Mélenchon, avant d'ajouter : "ça n'existe pas, une boîte qui résiste au ministère des Finances".
"Si le Monsieur (Sarkozy) est reconduit, les gens seront écrabouillés"
Jusque là attentif et relativement silencieux, le candidat ajoute : "j'ai un conseil à vous donner. Allez voir les autres candidats". Et encore : "si le Monsieur (Sarkozy) est reconduit, les gens seront écrabouillés".
Il rappelle qu'il existe une "gauche de combat" plus pugnace que l'autre... Enfin, Jean-Luc Mélenchon aligne des chiffres : "80% des travailleurs pauvres et 85% des smicards sont des femmes. Cette dimension, il faut la rendre visible, pour que les femmes puissent continuer à travailler."
"Parce que le modèle allemand, figurez-vous c'est ça" : les hommes au travail, les femmes à la maison. Et vous savez comment on les appelle, en Allemagne, les mères qui travaillent ? "Des femmes corbeaux".
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