"Licenciement" de Ségolène Royal : "Y voir un complot, à mon avis, est un hors-sujet total"
Matthieu Caron, directeur de l'observatoire de l'éthique publique, estime que le poste de Ségolène Royal exigeait "une loyauté totale" envers l'exécutif.
"Mme Royal avait un devoir de réserve", estime mercredi 15 janvier sur franceinfo Matthieu Caron, directeur de l'observatoire de l'éthique publique appelé à réagir sur la décision de l'exécutif de mettre fin au mandat d'ambassadrice des pôles qu'exerçait Ségolène Royal depuis septembre 2017. "Y voir un complot, à mon avis, est un hors-sujet total", juge-t-il. L'ancienne ministre de l'Écologie avait violemment critiqué la politique du gouvernement en décembre sur franceinfo.
franceinfo : Ségolène Royal avait-elle effectivement un devoir de réserve ?
Matthieu Caron : Naturellement. Il s'agit d'un emploi à la décision du gouvernement. C'est un type d'emploi tout à fait particulier, qui échappe en grande partie au droit commun de la fonction publique.
C'est un emploi très élevé dans la hiérarchie administrative, qui a une fonction un peu hybride entre politique et administratif, et qui nécessite une loyauté totale de la part de ceux qui ont été appelés à exercer cette fonction.
Matthieu Caron, directeur de l'observatoire de l'éthique publiqueà franceinfo
En conséquence, Mme Royal avait un devoir de réserve, elle ne pouvait pas s'exprimer sur la politique nationale comme elle l'a fait.
Ségolène Royal dit que sa liberté d'opinion, d'expression est garantie par la Constitution ?
Oui, comme tout un chacun. Nous avons tous notre liberté d'expression qui est garantie. Mais là, en l'occurrence, il s'agit d'un emploi dans lequel vous travaillez pour le gouvernement. Vous avez donc un devoir de réserve quand vous vous exprimez publiquement.
Il y a aujourd'hui 21 ambassadeurs thématiques, tous rattachés au Quai d'Orsay. Ces fonctions-là posent problème ?
Je ne sais pas si elles posent problème. En tout cas, ce que nous disons depuis longtemps, c'est que là où il y a un responsable public, il doit y avoir un statut. Or, le statut juridique est flou. On ne connaît pas les modalités de nomination : parfois c'est une simple note de service qui porte nomination, ça a déjà été le cas par le passé.
On ne connaît pas vraiment les modalités de rémunération, quels sont les frais de mission et de représentation, c'est-à-dire les moyens matériels, qui sont mis à disposition. Et surtout, il n'y a pas de rapport d'activités qui est publié en open-data et qui nous permet de mesurer l'activité réelle de ces ambassadeurs.
Matthieu Caron
S'ils sont utiles, les rapports d'activités le montreront. Donc il faut que le ministère des Affaires étrangères les publie.
Ne faudrait-il pas réserver les postes d'ambassadeurs à des diplomates de métier ?
Peut-être, il faut y réfléchir. Après, le fait que ce soit toujours des experts qui soient nommés à ce type de poste, ce n'est pas toujours la meilleure chose. Il peut y avoir des responsables politiques qui exercent ces responsabilités. Encore faut-il qu'ils comprennent qu'ils ne sont alors plus dans la vie politique et qu'ils doivent exercer ces fonctions à plein temps. C'est ce qui a posé problème en l'occurrence. Michel Rocard, qui a été ambassadeur des pôles, a fait un travail remarquable. Il a beaucoup pesé pour que le Parlement européen prenne une résolution en la matière. Il a fait avancer le dossier. Et il siégeait au conseil de l'Arctique.
Est-ce que vous voyez là une décision politique ?
Ce n'est pas à moi d'en juger. Mais il y a eu un travail remarquable qui a été fait par la cellule investigation de Radio France, de notre côté, nous sommes un think tank indépendant et transpartisan, il y a des députés de gauche comme de droite qui ont posé des questions là-dessus. Y voir un complot, à mon avis, est un hors-sujet total.
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