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La Loire-Atlantique dit "oui" à 55,17% à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes : et maintenant ?

Article rédigé par Julie Rasplus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un militant pro-Notre-Dame-des-Landes distribue un tract à Nantes, le 22 juin 2016. (LOIC VENANCE / AFP)

Les électeurs de Loire-Atlantique se sont nettement prononcés en faveur de la construction d'un aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Francetv info vous explique ce que cela implique. 

Ils ont dit "oui". Appelés à se prononcer en faveur ou en défaveur du projet très contesté d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dimanche 26 juin, les électeurs de Loire-Atlantique ont voté "pour" à 55,17% des voix. Un sérieux camouflet pour les opposants au projet, qui dénoncent depuis des années un projet démesuré et inutile. Que va-t-il se passer désormais ? Francetv info vous résume ce qui attend opposants et défenseurs dans les prochains mois. 

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Est-ce vraiment une victoire pour les partisans du projet ?

Le camp du "oui" ne pouvait pas rêver mieux. Dès dimanche, les défenseurs du projet se sont félicités du résultat, qui leur donne toute légitimité à œuvrer pour que le projet, dont les travaux sont pour l'instant suspendus, soit rapidement remis sur les rails.

Comment vont réagir ses détracteurs ? A gauche, certains socialistes partisans du projet pensent que le résultat "va désarmer les opposants légitimes, obligés à revoir leurs positions", selon les mots d'un élu interrogé par francetv info. Au PS, on croit même au scénario de la gare de Stuttgart, dont les travaux de rénovation avaient suscité un vif débat chez les écologistes allemands. En 2011, le référendum régional avait finalement validé la poursuite des travaux, et les militants avaient abandonné le combat. 

Reste que, comme le rappelle l'avocat Arnaud Gossement, ce référendum "est par essence consultatif". "Il y a toujours moyen d'en relativiser la portée. D'ailleurs, les opposants, comme les partisans, ont tous prévenu que le combat allait continuer", rappelle ce spécialiste en droit de l'environnement. "Rien ne s'arrête le 26 juin", a ainsi fait savoir, à quelques jours du vote, Françoise Verchère, coprésidente du Cédpa, un collectif d'élus opposés au projet. Et dimanche soir, réunis à Notre-Dame-les-Landes, les opposants à l'aéroport ont d'ores et déjà appelé à un grand rassemblement sur le site les 9 et 10 juillet. 

Quand la ZAD sera-t-elle évacuée ? 

Désormais, pour Bruno Retailleau, président (Les Républicains) de la région Pays de la Loire, plus rien ne s'oppose au début des travaux. Dans cette optique, "on va exiger que la ZAD soit évacuée", assure-t-il à francetv info. A droite comme à gauche, les élus favorables au projet souhaitent que les forces de l'ordre fassent leur entrée dans le bocage d'ici à la rentrée, afin d'en expulser les zadistes.

Mais quatre ans après l'échec de l'opération César, où les policiers et gendarmes mobiles n'étaient pas parvenus à évacuer les militants, et alors que le gouvernement gère tant bien que mal les manifestations autour de la loi Travail, l'hypothèse d'une évacuation manu militari semble périlleuse. "Que voulez-vous... Il y aura forcément de la confrontation. Mais il faut que ça se passe bien, sans morts, sans blessés", glisse un élu socialiste du département, contacté par francetv info. 

Pour certains observateurs, une telle évacuation paraît improbable. "Je n'imagine pas une seule seconde que le gouvernement prenne le risque d'échauffourées dans le bocage et de créer un deuxième Sivens. Surtout à moins d'un an de la présidentielle", observe l'avocat Arnaud Gossement. La ministre de l'Environnement, Ségolène Royal, avait d'ailleurs elle-même assuré, fin janvier, qu'il n'y aurait "pas d'évacuation par la force". "C’est impossible, on ne va pas faire de guerre civile à Notre-Dame-des-Landes", avait-elle insisté.

Les travaux vont-ils pouvoir reprendre bientôt ? 

A en croire différents élus favorables au projet, et contactés par francetv info, "l'idée est de commencer les travaux cet hiver" voire à l'automne. Mais selon Thomas Dubreuil, l'un des avocats des collectifs d'opposants, rien ne devrait se faire avant... "début 2017". En effet, la procédure d'infraction ouverte par la Commission européenne en 2014, pour non-respect de la réglementation européenne, doit encore être réglée. Depuis deux ans, Bruxelles réclame à la France une évaluation environnementale globale du projet, incluant l'aérogare, mais aussi les infrastructures liées (dessertes routières, tram-train, TGV).

Or la France a choisi de régulariser cette infraction à travers la révision du Schéma de cohérence territoriale (Scot) de Nantes-Saint-Nazaire, un document d'urbanisme qui n'a pas été formellement accepté. Cela devrait prendre encore de longs mois, alors que le gouvernement a promis d'attendre la fin de ce contentieux pour démarrer les travaux. Par ailleurs, le projet n'a pas encore reçu les autorisations liées à la protection du campagnol, une espèce présente sur la zone, et le permis de construire de l'aéroport est toujours suspendu.

Concrètement, "ils peuvent faire du débroussaillage, mais pas de bétonnage ou de construction à proprement parler", explique ainsi l'avocat Thomas Dubreuil. "Ils se sont eux-mêmes contraints à des délais visant début 2017. Et d'ici là, les cartes pourraient être rebattues" avec l'élection présidentielle. Le jour où l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes sortira de terre n'est donc pas encore venu. Peut-être même ne se fera-t-il jamais, prédit Arnaud Gossement : "Ce dossier va moisir jusqu'au jour où il sera devenu tellement vieux que les autorisations seront caduques."

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