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Assemblée nationale : on vous résume le "piège" tendu par le RN à LFI sur la réintégration des soignants non vaccinés

Le groupe La France insoumise a finalement retiré sa proposition de loi, reprise par le Rassemblement national.
Article rédigé par Thibaud Le Meneec
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
La députée La France insoumise Caroline Fiat à l'Assemblée nationale, à Paris, le 8 novembre 2022. (THOMAS SAMSON / AFP)

La France insoumise a-t-elle perdu une bataille face au Rassemblement national à l'Assemblée nationale ? Le groupe mené par Mathilde Panot a supprimé, mercredi 7 décembre, sa proposition de loi sur la réintégration des soignants non vaccinés contre le Covid-19. Ce texte, qui avait d'abord été débattu en séance lors d'une journée réservée aux propositions LFI, fin novembre, devait revenir en discussion le 12 janvier, cette fois-ci dans le cadre de la "niche parlementaire" du RN. Pour éviter les accusations de collusion avec le parti de Marine Le Pen, les parlementaires LFI ont préféré abandonner cette proposition qu'ils avaient pourtant ardemment défendue.

Du dépôt de ce texte qui divise les partis aux critiques du Rassemblement national envers le "sectarisme" de La France insoumise, franceinfo retrace en cinq étapes le parcours de cette proposition de loi qui ne concernait que "quelques centaines de personnes", selon les déclarations du ministère de la Santé à Libération.

1 LFI dépose sa proposition de loi pour réintégrer les soignants non vaccinés

Déposée le 11 octobre à l'Assemblée nationale, la proposition de loi de la députée LFI Caroline Fiat reprend une idée qui n'est pas nouvelle chez les Insoumis : la suppression de l'obligation vaccinale faite aux soignants depuis septembre 2021 était déjà l'une des promesses de campagne de Jean-Luc Mélenchon, pendant la présidentielle. La proposition de loi est étudiée en commission des affaires sociales le 16 novembre et reçoit le soutien de plusieurs députés des groupes RN, LR et LIOT. Mais les élus Renaissance parviennent à empêcher son adoption.

2 Le texte, étudié lors de la "niche parlementaire" LFI, est soutenu par les députés RN

Une semaine plus tard, le 24 novembre, c'est le grand jour pour cette proposition de loi. Inscrit par La France insoumise dans sa "niche parlementaire", une journée annuelle pendant laquelle un groupe parlementaire peut fixer l'ordre du jour à l'Assemblée nationale, le texte est débattu à la faveur du retrait d'une autre proposition de loi très médiatique, sur l'abolition de la corrida.

En séance, le ton monte entre les différents députés. Et, comme en commission, le RN appuie cette proposition de loi de LFI. Mais à coups de suspensions de séance, de rappels au règlement et de dizaines d'amendements, le camp présidentiel parvient à empêcher la tenue d'un vote sur le texte en discussion, la "niche parlementaire" se terminant à minuit. "On ne vous lâchera pas", lance Caroline Fiat en direction du banc des ministres, en clôture des débats.

3 Le RN dépose la proposition de loi pour sa propre "niche parlementaire"

Enterrée, la proposition de loi de la députée LFI de Meurthe-et-Moselle ? Pas du tout. Mardi 6 décembre, au moment de présenter le contenu de sa "niche parlementaire", qui aura lieu le 12 janvier, le Rassemblement national explique qu'il prévoit de mettre à l'agenda le texte de gauche qui n'a pas pu être voté douze jours plus tôt. Et ce, sans en changer une virgule.

"J'ai le sentiment que le groupe LFI n'est pas ravi de notre proposition", explique Marine Le Pen en conférence de presse. La présidente du groupe RN impose un choix cornélien aux députés LFI : soutenir un de leurs textes avec l'extrême droite ou abandonner une proposition de loi à laquelle ils sont attachés. "Nous verrons comment nous pouvons déjouer ce qui est un piège grossier et une manipulation perverse et opportuniste du RN", évacue en conférence de presse le député LFI Matthias Tavel.

4 LFI assume et maintient son texte dans un premier temps

Après le choix du RN de porter le texte LFI le 12 janvier, le groupe de gauche assure que Caroline Fiat en restera "l'unique rapporteuse" dans l'hémicycle. "Le texte sera donc examiné lors de la niche RN ; s'ils souhaitent nous laisser la moitié de leur niche, libre à eux", ajoutent les Insoumis. "Ils me donnent leur temps législatif, je n'allais pas dire non", souligne Caroline Fiat devant la presse, démentant tout "accord" avec le parti de Marine Le Pen.

Pour justifier leur volonté de continuer à porter la proposition de loi, les députés insoumis mettent en avant la difficulté technique de voir ce texte adopté lors de la niche parlementaire du RN. "Il n'y a aucune possibilité que ce texte soit adopté dans la niche du RN pour une très bonne raison, c'est qu'ils ont repris le texte en l'état", estime le cadre LFI Manuel Bompard, mercredi matin, rappelant que "le gouvernement y avait déposé plus de 300 amendements".

5 Après un tollé, LFI retire la proposition de loi et essuie les critiques du RN

Dans les rangs de la Nupes, chez les écologistes et les socialistes, plusieurs députés évoquent mercredi matin le "piège" tendu par le Rassemblement national à La France insoumise et invitent Caroline Fiat à ne pas défendre le texte avec le RN, en janvier. En milieu de matinée, le groupe LFI annonce qu'il retire purement et simplement son texte "bloqué par l'obstruction gouvernementale" et qu'il déposera "une nouvelle proposition de loi, cosignée avec les députés ultramarins de tous les groupes politiques qui le souhaitent".

En réaction, le Rassemblement national pointe le "sectarisme" et la "basse reddition politicienne" du groupe La France insoumise, qui "fera toujours passer ses intérêts politiciens avant l'intérêt général. La France Insoumise préfère sacrifier les soignants en retirant son texte. (…) Contrairement à leurs dires, les 59 amendements restants auraient pu être discutés rapidement et le texte voté." En revanche, dans son communiqué, le groupe RN ne mentionne aucune intention de déposer une proposition similaire dans les prochaines semaines.

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