"C'est un rythme d'enfer" : la fatigue pointe chez les députés après trois semaines de débats intenses à l'Assemblée nationale
Depuis le début de la législature, l'agenda a été très soutenu, avec des débats houleux et plusieurs nuits blanches. Et si les députés ont adopté dans la nuit de mardi à mercredi le second volet des mesures en soutien au pouvoir d'achat, l'heure n'est pas encore aux vacances.
Il y a comme un air d'un jour sans fin à l'Assemblée nationale. Après avoir voté dans la douleur le projet de loi sur le pouvoir d'achat dans la nuit du mardi 26 au mercredi 27 juillet, débattu nuit et jour au Palais-Bourbon, les députés siègent encore dans l'Hémicycle jeudi 28 juillet.
Le sujet est moins sensible puisqu'il s'agit de faire le bilan de la présidence française de l'Union européenne. Mais la fatigue s'est déjà bien installée après trois semaines de travaux et à un peu plus d'une semaine de la pause estivale.
"L'impression d'être dans un tunnel"
Dans les couloirs de l'Assemblée nationale, certains députés ont les traits tirés, et des cernes sous les yeux attestent du rythme de travail. "On vous dit bonjour ou bonsoir, on ne sait plus trop", glisse un député à des journalistes croisés dans les couloirs du palais Bourbon. Après trois semaines de débats et plusieurs nuits blanches, les troupes s'épuisent, assure le député insoumis Alexis Corbière : "Vous avez l'impression d'être dans un tunnel, confie-t-il. Ajoutez à cela qu'il y a la chaleur, la campagne présidentielle, la campagne législative, etc..." Résultat : "Vous avez des gens qui ne sont plus en capacité de faire un travail législatif de qualité", affirme le député de La France insoumise.
"Parler à trois jusqu'à trois heures du matin, est-ce que c'est raisonnable pour faire un travail législatif de qualité ?"
Alexis Corbière, député LFIà franceinfo
Un rythme effréné : voilà pourquoi certains députés s'emportent, selon Alexis Corbière : "Réunissez dans une même salle 577 hommes et femmes de caractère à trois heures du matin, qui parlent de sujets aussi passionnés que les inégalités, évidemment, vous créez une ambiance qui peut donner l'impression que ça s'échauffe."
Ils s'y attendaient et ne veulent pas se plaindre
La plupart des députés contactés par franceinfo assurent qu'ils s'attendaient à ce rythme de travail et ne veulent pas se plaindre compte tenu de leurs bonnes conditions de travail. Mais d'autres, hors micro, vident leur sac. "C'est un rythme d'enfer", déplore un nouveau député Rassemblement national qui a dû décaler ses vacances. Il confie s'être endormi dans sa voiture alors qu'il était attendu sur un plateau de télévision. "En séance, on est moins percutant, moins vif", assure ce député.
Pour l'écologiste Sandra Regol, il y a urgence de réformer. "Siéger pendant vingt heures d'affilée et que vous étudiez des textes, on se dit que la démocratie n'est plus efficace sur les dernières heures", souligne la députée.
"Il faut globalement qu'on réfléchisse à une autre organisation de nos séquences, de notre calendrier, pour arriver à avoir un travail parlementaire qui soit réfléchi, éclairé, enfin, qu'il soit le meilleur possible."
Sandra Regolà franceinfo
L'exécutif a déjà tiré une leçon de cette première séquence estivale : à la rentrée, les parlementaires ne siégeront pas avant octobre. Il n'y aura donc pas de session extraordinaire en septembre, une première depuis vingt ans. "Ça nous permettra non pas de nous reposer en septembre, mais de travailler pour préparer les projets de loi qui passeront à partir d'octobre", souligne le député de la majorité Paul Midy, qui estime que, lors des semaines passées, les députés ont "parfois construit des compromis en direct dans l'hémicycle".
"C'est encore mieux quand on peut faire des compromis et des bonnes discussions avec les oppositions raisonnables avant d'arriver dans l'hémicycle", observe ainsi le député. Les discussions seront nécessaires avant le retour dès la rentrée d'octobre d'une réforme explosive : celle de l'assurance chômage.
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