Nouvelle Assemblée nationale : quels sont les avantages à se déclarer comme groupe d'opposition ?
Se placer dans l'opposition au gouvernement qui vient de démissionner ou dans le camp d'une "majorité" qui n'a plus grand-chose de majoritaire ? Voilà la question pas si simple qu'ont dû se poser les groupes parlementaires de la nouvelle Assemblée nationale. Au total, 11 groupes se sont formés, jeudi 18 juillet : un record sous la Ve République et le symptôme d'un hémicycle très morcelé, quarante jours après la dissolution annoncée par Emmanuel Macron. Sur ces 11 groupes, huit ont mentionné dans leur déclaration, disponible sur le site de l'Assemblée nationale, qu'ils se positionnaient, au moins temporairement, dans l'opposition.
C'est le cas du Rassemblement national, de La France insoumise, du Parti socialiste, de La Droite républicaine (ex-Les Républicains), du groupe Ecologiste et Social, de Liot (les indépendants), de la Gauche démocrate et républicaine (les communistes) et de A Droite (les LR ciottistes). Les trois groupes restants, Ensemble pour la République (ex-Renaissance), Les Démocrates (MoDem) et Horizons, restés à l'écart de l'opposition, ne se sont pas pour autant déclarés dans la majorité. Ils sont donc pour l'heure dits "minoritaires".
Il peut y avoir un paradoxe entre le nombre élevé de groupes d'opposition et leur attitude vis-à-vis du pouvoir exécutif. Bien que formellement dans l'opposition, plusieurs forces politiques ont déclaré qu'elles tentaient de former un gouvernement ou au moins d'établir un "pacte législatif". C'est, par exemple, le cas de Laurent Wauquiez et des Républicains. L'explication réside dans le fait que le statut d'opposant confère, à l'Assemblée, de nombreux droits garantis.
Des postes stratégiques réservés à l'opposition
Alors que la répartition des postes clés de l'Assemblée nationale est discutée vendredi, l'une des positions les plus stratégiques est réservée à l'opposition : la présidence de la commission des finances, qui peut contrôler le budget de l'Etat, mais aussi demander l'ouverture d'une commission d'enquête parlementaire. De 2022 à 2024, cette fonction était occupée par Eric Coquerel, député La France insoumise, qui peut donc briguer sa succession. De la même manière, l'élue LR Véronique Louwagie peut prétendre au poste, quand bien même le retrait de Philippe Juvin, candidat de son camp dans la course au perchoir, a permis l'élection de Yaël Braun-Pivet à la présidence de l'Assemblée nationale.
Les droits des groupes d'opposition ne s'arrêtent pas là. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, chacun d'entre eux détient un droit de tirage pour lancer une commission d'enquête ou une mission d'information sur un sujet de son choix lors de la session parlementaire ordinaire, d'octobre à juin. Chaque semaine, ils disposent aussi de la moitié des questions au gouvernement pour interroger l'exécutif sur n'importe quel sujet.
Autre avantage, un jour de séance par mois, un groupe d'opposition ou un groupe minoritaire (le reste des groupes qui ne se sont déclarés ni dans l'opposition, ni dans la majorité) fixe l'ordre du jour des débats, pour tenter de faire voter ses propositions de loi. C'est ce qui s'appelle une niche parlementaire.
Il est toujours possible de changer de camp
Au-delà des droits garantis, il y a aussi un intérêt d'affichage politique. C'est le cas du Nouveau Front populaire, qui revendique toujours sa capacité à représenter une alternance à la précédente majorité du camp présidentiel. "Nous appelons le président de la République à respecter la volonté du peuple français et à nommer un Premier ministre ou une Première ministre désigné par le Nouveau Front populaire. Tant qu'il ne l'aura pas fait, notre groupe se constituera en tant que groupe d'opposition", ont écrit ses différents groupes dans une déclaration commune.
Surtout, il est toujours possible de changer de camp. "La déclaration d'appartenance d'un groupe à l'opposition peut également être faite ou, au contraire, retirée, à tout moment", précise le règlement de l'Assemblée nationale. Même si les droits spécifiques des groupes d'opposition "sont attribués ou non en fonction de la situation des groupes au début de chaque législature puis chaque année au début de la session ordinaire", le coût d'une telle déclaration est relativement faible.
Cela n'interdit pas, comme le montre l'exemple du groupe LR avec le camp présidentiel, une entente pour emporter une grande partie des postes stratégiques à l'Assemblée nationale. Les élus de droite peuvent par ailleurs former ou intégrer un gouvernement dont ils seraient pourtant, sur le papier au moins, des opposants dans l'hémicycle.
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