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Assemblée nationale : Yaël Braun-Pivet écrit aux députés pour leur "rappeler" les "règles" de l'institution

Dans un courrier adressé aux députés, la présidente de l'Assemblée nationale pointe une "inquiétante dégradation de la qualité des échanges" ces dernières semaines.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, le 6 février 2023. (VINCENT ISORE / MAXPPP)

La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a écrit vendredi 7 avril aux députés pour leur "rappeler l'ensemble des règles destinées à encadrer et guider [leur] comportement". Cette piqûre de rappel, sous la forme d'un courrier que s'est procuré France Inter, vient après des mois marqués par de "graves dysfonctionnements individuels ou collectifs" et par "une inquiétante dégradation de la sérénité et de la qualité" des "échanges" au Palais Bourbon.

Yaël Braun-Pivet souligne notamment que "dans l'hémicycle, l'expression est exclusivement orale". Ainsi, "l'utilisation, notamment pendant les questions au gouvernement, à l'appui d'un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d'objets ou instruments divers est interdite". "L'emploi de tout outil de communication avec l'extérieur depuis l'hémicycle", est interdit, rappelle-t-elle également. Cela inclut "les plateformes retransmettant le flux vidéo ou audio des débats" comme Twitch, prisé par le député La France insoumise (LFI) Ugo Bernalicis.

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Shorts et bermudas "prohibés"

Quant à "la tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l'hémicycle", elle "doit être neutre et en adéquation avec la solennité des lieux". "À ce titre, elle doit rester convenable et non détendue ni, a fortiori, négligée", explique-t-elle, exemple à l'appui : "le port du short ou du bermuda" est "prohibé". L'observation de ces règles est indispensable "afin que cette législature se poursuive dans des conditions plus dignes et plus sereines, et que l'on revienne à un fonctionnement apaisé de notre institution".

Ce courrier fait suite aux sanctions décidées mercredi par le bureau de l'Assemblée nationale, sa plus haute instance, rendues publiques dans un communiqué. "Les députés ayant enfreint les règles de l’Assemblée ces dernières semaines, de manière organisée et systématique" écopent "d'un rappel à l’ordre", qui "correspond au premier niveau des peines disciplinaires applicables aux membres de l’Assemblée", selon ce document.

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En tout, au moins 76 députés sont concernés, a précisé une source parlementaire à France Inter. Il s'agit essentiellement de députés de La France insoumise (LFI). "Je suis sanctionné pour avoir retransmis, partiellement, les débats de la commission mixte paritaire sur la réforme des retraites", confirme l'un d'entre eux, Hadrien Clouet. "Le macronisme, ce sont des élus qui veulent cacher leurs décisions aux électeurs", accuse-t-il, estimant qu'un "républicain ne peut l'accepter".

"Nous ne sommes pas des gamins à punir"

La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, est particulièrement ciblée. "OK boomeuse", ajoute ainsi Hadrien Clouet, quand son collègue LFI Paul Vannier, également sanctionné, lui reproche de se comporter "en grotesque cheffe de bande" qui "rabaisse le Parlement". "Nous ne sommes pas des gamins à punir mais des députés qui nous opposons à votre réforme des retraites", s'indigne l'écologiste Sandrine Rousseau, qui a elle aussi reçu un rappel à l'ordre.

"Aucun rappel à l’ordre ne nous fera taire ou peur. Et le penser est une bien lourde erreur", martèle la députée. "Il y a des sanctions qu'on porte comme des médailles", plastronne de son côté le LFI Maxime Laisney. Lui a "entonné l'hymne de la Nation au moment où la Première Ministre tordait le bras à la représentation parlementaire". Certains députés sont en effet sanctionnés, selon le même communiqué, pour avoir "brandi des pancartes (…) lors de la séance du jeudi 16 mars, occasionnant ainsi un tumulte". C'est ce jour-là qu'Élisabeth Borne a déclenché le 49.3 dans le but de faire adopter sans vote la réforme des retraites. Au moment où elle s'apprêtait à le faire, plusieurs élus de gauche ont brandi des pancartes "64 ans, c'est non" dans l'hémicycle, et chanté la Marseillaise.

"Je tiens solennellement à m’excuser d’avoir osé 'brandir un panneau'", ironise l'Insoumis François Piquemal, qui fait partie de ces élus. "Puisse Jupiter me pardonner", ajoute-t-il, faisant allusion à Emmanuel Macron.

La cheffe de file du groupe LFI Mathilde Panot a annoncé contester ces rappels à l'ordre devant le Conseil d'Etat, et "si nécessaire" son groupe "se tournera vers la Cour européenne des droits de l'Homme".


"Ces sanctions prises à l'encontre de députés de l'opposition démontrent que, loin de faire respecter les prérogatives du pouvoir législatif, vous n'êtes plus qu'une exécutante des basses oeuvres de l'exécutif dans son virage autoritaire", assène-t-elle à Mme Braun-Pivet dans un courrier.

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