Nouvelle-Calédonie : "Les Kanaks, très majoritairement, ont envie de construire ce pays qui est le leur"
Le président autonomiste du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, "prend acte du résultat démocratique" en Nouvelle-Calédonie, mais ajoute que "les mécanismes d'aliénation coloniale n'ont pas disparu".
"Les Kanaks, très majoritairement, ont envie de construire ce pays qui est le leur", a analysé dimanche 4 novembre sur franceinfo Gilles Simeoni, président autonomiste du Conseil exécutif de Corse, alors que le "non" l'a emporté lors du référendum d'autodétermination en Nouvelle-Calédonie à 56,4%.
franceinfo : Que pensez-vous des résultats de ce référendum ?
Gilles Simeoni : Je pense qu'il faut prendre acte du résultat démocratique, qui intervient au terme d'un processus qui a été validé par toutes les parties. Un résultat qui a toute sa légitimité. J'ai une pensée pour celles et ceux qui ont eu le courage il y a 30 ans de choisir le chemin de paix. Je pense notamment à Michel Rocard, à Jean-Marie Tjibaou à Jacques Lafleur et dix ans après à Lionel Jospin. Maintenant, que faire avec ce résultat ? Parce que l'écart est beaucoup plus mince que ce qui avait été annoncé.
On se rend compte, si on affine un peu la lecture, que les Kanaks représentent environ 40% de la population totale de la Nouvelle-Calédonie, cela veut dire que la quasi-totalité des Kanaks a voté en faveur de l'indépendance. Ce que démontrent ce résultat et la réalité de l'état actuel de la société en Kanaky, c'est que les mécanismes d'aliénation coloniale n'ont pas disparu, je pense notamment aux disparités économiques et sociales, en matière d'éducation. Le combat du peuple kanak va continuer. Les Corses, celles et ceux qui partagent nos idées, sommes solidaires de ce peuple.
Que doit-on faire et de quelle manière pour garantir le respect de la dignité du peuple kanak et de toutes les composantes de la Nouvelle-Calédonie ?
Dans le discours du président Emmanuel Macron, pas une fois il n'a cité le peuple kanak. Je pense que c'est une omission qui est regrettable. Il suffit de voir les statistiques, notamment le taux de jeunes qui accède à l'enseignement supérieur, je crois que c'est 4% sur les dernières statistiques. On disait que les jeunes Kanaks allaient se désintéresser de ce scrutin et manifestement ils s'y sont largement investis pour revendiquer leur fierté d'appartenir à ce peuple. Les Kanaks, très majoritairement, ont envie de construire ce pays qui est le leur.
On est dans une logique de paix et pas dans une logique d'hostilité, de rejet, mais simplement d'affirmation de la dignité de ce peuple, des prises en compte d'une histoire qui a été injuste, qui a été une histoire coloniale. Il y a aussi la volonté de redéfinir librement le rapport à la France et à la République. L'indépendance ne peut se concevoir en 2018 comme elle pouvait se concevoir dans les années 50.
La Nouvelle-Calédonie est la collectivité la plus autonome de France avec des pouvoirs régaliens, notamment sur les programmes scolaires. Cela explique-t-il le choix exprimé aujourd'hui ?
Je dirais, avec un petit sourire, souvent lorsqu'on revendique pour la Corse l'autonomie, on dit que l'autonomie c'est l'antichambre de l'indépendance. Or, je note qu'en Nouvelle-Calédonie, il y a une autonomie très large et pour autant les électeurs n'ont pas choisi l'indépendance. La situation corse et la situation en Nouvelle-Calédonie ne sont pas identiques, même si il y a des traits de similarité entre les deux peuples et un grand respect. En ce qui concerna la Corse, une très large autonomie comme celle que connaissent actuellement les Kanaks nous suffirait largement, mais la situation n'est pas la même. Nous allons continuer, nous aussi de façon démocratique, pour faire prendre en compte ces attentes.
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