Pourquoi Berlusconi séduit à nouveau les électeurs italiens
On le croyait enterré après les scandales de corruption et les affaires de mœurs. Mais le Cavaliere arrive en deuxième position dans les sondages avant les législatives de ce week-end. Explications.
Il est de retour et il fait trembler ses adversaires politiques. Silvio Berlusconi n'avait pas pu finir son troisième mandat de président du Conseil en 2011, destitué et remplacé par le technocrate Mario Monti. Accusé de corruption, il était englué dans des scandales liés à des affaires de mœurs, et notamment à son recours à des prostituées. Pour fêter son départ, des milliers d'Italiens étaient descendus dans les rues. Et pourtant, à l'approche des élections législatives italiennes des 24 et 25 février, les sondages lui attribuent environ 29% d’’intentions de vote, contre 33% pour la coalition de gauche menée par Pier Luigi Bersani.
Voici quatre raisons pour lesquelles Berlusconi est parvenu à revenir sur le devant de la scène politique italienne.
Il dénonce les mesures d’austerité
Dénoncer les mesures d'austérité imposées par le président du Conseil sortant, Mario Monti, est son leitmotiv. De quoi gagner des points face au "professeur" Monti, ou face à Bersani, le candidat de centre-gauche, qui déclare vouloir poursuivre le travail de Monti. En plus des difficultés des Italiens, Berlusconi attribue aussi la montée de la délinquance à ces mesures d'austérité.
Son cheval de bataille est la taxe foncière IMU (l'impôt municipal unique, qui s’applique sur toutes les habitations), mise en place en 2011 par Monti. Le Cavaliere a promis de l’abolir et de restituer aux Italiens les montants versés en 2012. Sans préciser où il trouverait l’argent nécessaire.
Les circonstances lui sont favorables
Les Italiens ne semblent plus faire confiance à Mario Monti, en chute libre dans les sondages (autour de 12%). "La majorité des gens le voit comme quelqu'un de très lié au monde de la finance", explique le vice-président de l'institut de sondage SWG, Maurizio Pessato, aux Echos. Le "professeur" doit, de plus, faire face à l'absence de reprise économique, explique le New York Times (article en anglais).
Reste Pier Luigi Bersani, leader du Parti démocrate. Mais cet ex-communiste modéré représente pour beaucoup une vieille classe politique usée et corrompue. A cela se mêle le scandale de la banque Monte dei Paschi di Siena. La plus vieille banque au monde a utilisé des contrats de produits dérivés toxiques pour dissimuler des pertes. Problème : le Parti démocrate du candidat Pier Luigi Bersani contrôlait la fondation actionnaire de la banque au moment des faits, explique Le Monde.
Le scandale a entraîné une légère percée dans les sondages pour Berlusconi. Pourtant, avertit Paolo Ceri, professeur de sociologie à l'université de Florence et auteur de l’ouvrage Gli Italiani spiegati da Berlusconi ("Les Italiens expliqués par Berlusconi"), il Cavaliere n’a pas cherché à profiter du scandale. "Il s'est surtout gardé de critiquer trop la gauche parce que il se doutait que des membres de son parti se seraient également retrouvés impliqués dans le scandale", a-t-il estimé.
Il communique mieux que ses adversaires
S'il y a une chose que Berlusconi sait bien faire, c’est communiquer. Il n’est pas seulement le propriétaire de trois chaînes de télévision en Italie, il est aussi un vrai homme de spectacle.
"Une partie de la population, majoritairement des personnes âgées, est plus exposée aux chaînes de télévision. Ces gens sont plus facilement influencés par des promesses de Berlusconi, dont le discours passe surtout par la télévision", explique Paolo Ceri. Les analystes s'accordent sur le fait que sa présence à l'écran a rapporté à son parti environ cinq points dans les sondages, rapporte le journal italien ll Fatto quotidiano (en italien).
Certains détracteurs estiment même que Berlusconi a tenté de gagner en popularité sur le plan politique grâce à son club de l'AC Milan. Le Cavaliere a acheté le footballeur Mario Balotelli courant janvier. De quoi séduire les supporters lombards, mais aussi les électeurs de cette région-clé pour des élections, explique The Guardian (en anglais).
Il comprend les Italiens
Dans un article pour Time magazine (en anglais), le journaliste italien Beppe Severgnini a surnommé Berlusconi "le miroir des Italiens". L'ex-président du Conseil aime sa famille, son football, ses amis et la bonne chère. Il aime l’argent et les femmes. Et les Italiens l’aiment parce qu’il leur ressemble.
"Il s’agit d’une image folklorique des Italiens, répandue à l'étranger, qui est exagérée. Pourtant, il y a une partie de vérité : il se comporte souvent de façon à provoquer la complicité chez les gens. Avec des blagues, des phrases suggestives et des remarques sur la beauté physique des femmes. Il sait comment dire aux Italiens : 'Nous nous comprenons'", conclut Paolo Ceri.
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