"Affaires sensibles". Brigades rouges : la fin de l’exil ?
En janvier 2019, à Rome, Matteo Salvini, alors ministre de l’Intérieur d’extrême droite, accueillait le fugitif le plus recherché d’Italie : l'ancien activiste d’ultra-gauche Cesare Battisti, arrêté en Bolivie après trente-sept ans de cavale. Une prise d’autant plus symbolique que Battisti a longtemps été au cœur d’une intense polémique franco-italienne. Dans les années 1980, le président François Mitterrand avait accordé aux activistes italiens la protection de la France, pourvu qu’ils renoncent à la lutte armée. Depuis, beaucoup y ont fait leur vie. Alors qu'Emmanuel Macron a décidé d’avancer dans la restitution de certains d'entre eux à l’Italie, la justice française se penche sur la possible extradition de neuf anciens membres des Brigades rouges et diverses autres factions. La France est-elle en train de revenir sur sa promesse ?
Comme un fantôme entre la France et l’Italie, la question des Brigades rouges est au cœur de l’actualité : Emmanuel Macron a décidé d’avancer dans la restitution de certains criminels et terroristes d’extrême gauche à l’Italie. Ils ont tous été condamnés pour des implications dans des meurtres lors des années de plomb, entre la fin des années 1960 et le début des années 1970. Ils ont trouvé refuge en France depuis plus de quarante ans.
Cesare Battisti, trente-sept ans de cavale
Le 14 janvier 2019, sur le tarmac de l’aéroport de Rome, un avion en provenance de Bolivie se pose devant les caméras du monde entier. Matteo Salvini, alors ministre de l’Intérieur d’extrême droite, a revêtu un uniforme de policier pour accueillir le fugitif le plus recherché d’Italie : Cesare Battisti.
Ancien activiste d’ultra-gauche en cavale depuis trente-sept ans, il a été condamné par contumace par la justice italienne pour sa participation à quatre assassinats pendant les années de plomb. Cette prise est d’autant plus symbolique que Battisti a longtemps été au cœur d’une intense polémique franco-italienne. Réfugié en France, il avait été soutenu par de nombreux intellectuels.
Emmanuel Macron reviendrait-il sur la "doctrine Mitterrand" ?
Alors que depuis 2021, la justice française se penche sur la possible extradition de dix autres anciens membres des Brigades rouges et diverses factions d’extrême gauche, le documentaire d’Emilie Lançon pour "Affaires sensibles" enquête sur le dossier très délicat qui envenime depuis quarante ans les rapports entre la France et l’Italie.
Dans les années 1980, le président François Mitterrand avait accordé aux activistes italiens la protection de la France, pourvu qu’ils renoncent à la lutte armée. Depuis, ils y ont fait leur vie, et beaucoup y ont fondé une famille. Notre pays, est-il en train de revenir sur sa promesse ? Ce film inédit analyse les fondements de la "doctrine Mitterrand" et raconte les péripéties d’anciens activistes ayant voulu échapper à la justice italienne. Certains s’expriment pour la première fois.
Un documentaire réalisé par Emilie Lançon pour France TV Presse.
L'invité en plateau : maître Henri Leclerc, qui a été l’avocat de plusieurs anciens membres des Brigades rouges réfugiés en France.
"Affaires sensibles", une coproduction France Télévisions, France Inter et l’INA, adaptée d’une émission de France Inter.
Parmi nos sources
> Ouvrages
- L’Italie des années de plomb, Le terrorisme entre histoire et mémoire, sous la direction de Marc Lazar et Marie-Anne Matard-Bonucci (Autrement, 2010).
- L'Italie contemporaine : de 1945 à nos jours, sous la direction de Marc Lazar (Fayard, 2009).
- Come mi batte forte il tuo cuore. Storia di mio padre, Benedetta Tobagi (Einaudi, 2009).
- Piazza Fontana, le processus impossible, Benedetta Tobagi (Einaudi, 2019).
- Mes raisons d'Etat : mémoires d'un épris de justice, Louis Joinet (La Découverte, 2013).
- Ordine Nero, Guerriglia Rossa, Guido Panvini (Einaudi, 2009).
- La mémoire du plomb, Karl Laske (Stock, 2012).
- Exil et châtiment : coulisses d'une extradition, Paolo Persichetti (Textuel, 2005).
- Ma cavale, Cesare Battisti (Grasset, 2006).
- Jamais plus sans fusil, Cesare Battisti (Le Masque, 2006).
- Génération Battisti, Guillaume Perrault (Plon, 2005).
- La vérité sur Cesare Battisti, Fred Vargas (Viviane Hamy, 2004).
- L'opéraïsme au crible du temps, Oreste Scalzone et Jacques Wajnsztejn (A plus d'un titre, 2021).
> Tribunes marquantes
- "Les asilés italiens ne doivent pas être extradés", signée par Michel Tubiana, président d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme, Louis Joinet, magistrat, premier avocat général honoraire de la Cour de cassation, Irène Terrel, avocate, dans Le Monde, 4 mars 2019.
- "Cesare Battisti, un coupable", signée Antonio Tabucchi, écrivain et essayiste, dans Le Monde, 15 janvier 2011.
- "La demande d’extradition des exilés politiques par le gouvernement italien a le goût amer de la vengeance", Donatella Di Cesare, philosophe, dans Le Monde, 20 juin 2021.
- "Giustiza non vendetta", Benedetta Tobagi, La Repubblica, 23 avril 2021.
> Articles scientifiques, thèses
- "Face au terrorisme : les lois spéciales à l'italienne", dans la revue Sociologie du travail, le numéro thématique "Violence politique du terrorisme", Anne Schimel, 1986.
- "La 'lutte armée' entre justice, politique et histoire. Usages et traitements des 'années de plomb' dans l’Italie contemporaine (1968-2010)", Federica Rossi, université Paris Ouest Nanterre La Défense, Ecole doctorale de sciences juridiques, administratives et politiques Institut des sciences sociales du politique (ISP/CNRS), 2011.
- "Les réfugiés politiques italiens dans la France des années 80 : enjeux identitaires et politiques d’un exil singulier", Monica Lanzoni, Journée des doctorants de l’ED 31, Saint-Denis, 2016.
> Textes officiels
- Extrait de la conférence de presse de François Mitterrand et Bettino Craxi à l’Elysée, le 22 février 1985. Le président français déclare qu’il n’extradera aucun des intéressés (s'ils rompent avec la violence) hormis ceux accusés ou condamnés par la justice italienne pour des crimes de sang.
- Texte de l'allocution de François Mitterrand, président de la République, à l'occasion du 65e congrès de la Ligue des droits de l'homme à Paris, samedi 20 avril 1985. Dans cette prise de parole, il ne formule plus l'exception des crimes de sang.
Liste non exhaustive.
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